[Infoligue] Le gouvernement décide de supprimer le Défenseur des enfants
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mer 16 Sep 07:38:31 CEST 2009
Le gouvernement décide de supprimer le Défenseur des enfants
Publié par : http://www.cafepedagogique.net
Le : 16/09/09
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A quelques semaines du 20ème anniversaire de la Convention
internationale des droits de l'enfant, qu'elle est chargée de faire
respecter, la Défenseure des enfants apprend que son institution va être
supprimée. Du 23 au 25 septembre, Dominique Versini accueille à Paris
les 35 défenseurs des enfants européens. Elle invite le gouvernement à
venir s'expliquer. En effet, elle vient de découvrir que deux projets de
loi créant un Défenseur des droits suppriment le Défenseur des enfants.
"Ni consultée, ni auditionnée, déclare-t-elle, elle exprime "son total
désaccord".
Le Défenseur des droits aura une mission générale par rapport aux lois
françaises. Il n'aura pas la spécificité du Défenseur des enfants qui a
aussi pour mission de veiller au respect de la CIDE. Or c'est au nom de
celle-ci que le Défsneur a pu intervenir pour des mineurs retenus en
camp de transit ou menacés d'expulsion.
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Communiqué
DOMINIQUE VERSINI, DEFENSEURE DES ENFANTS, DECOUVRE QUE LE GOUVERNEMENT
A DECIDE DE SUPPRIMER LE DEFENSEUR DES ENFANTS AU MOMENT DU 20ème
ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L’ENFANT
(CIDE)
Paris, le 15 septembre 2009
Lien :
http://www.defenseurdesenfants.fr/communiquePresseAll.php?year=2009&wc=0
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Alors que partout en France et dans le monde, se prépare le 20ème
anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, la
Défenseure des enfants, Dominique VERSINI, découvre avec stupeur les 2
projets de loi présentés lors du dernier conseil des ministres (9/09/09)
qui suppriment l’Institution du Défenseur des enfants créée par la loi
du 6 mars 2000 en tant qu’Autorité indépendante chargée de défendre et
de promouvoir les droits des enfants et diluent ses missions au sein
d’un nouveau Défenseur des droits.
Dominique VERSINI, qui n’a été à aucun moment ni consultée ni
auditionnée (malgré les demandes de rendez-vous qu’elle a formulées
auprès de l’exécutif dès la connaissance du projet de création d’un
Défenseur des droits fin 2007), conteste à la fois la méthode, qui
relève de la maltraitance institutionnelle1 ainsi que les 2 projets de
lois qui posent de nombreuses interrogations :
Le nouveau Défenseur des droits, qui a été institué par la réforme
constitutionnelle du 23 juillet 2008 sans que son périmètre soit défini
au moment du vote, a pour but, selon le projet, de renforcer et de
donner plus de cohérence et de lisibilité à la protection des droits et
des libertés des citoyens en le dotant de pouvoirs renforcés. Si tel est
le but, on ne comprend pas pourquoi le Gouvernement a décidé de limiter
son champ d’intervention aux compétences du Médiateur de la République,
du Défenseur des enfants et de la Commission nationale de déontologie de
la sécurité (CNDS), excluant de fait la protection de droits aussi
fondamentaux pour nos concitoyens que ceux concernant les
discriminations, le contrôle des lieux privatifs de liberté, la
protection de la vie privée menacée par la multiplication des fichiers
informatiques qui resteraient gérés respectivement par la HALDE, le
Contrôleur général des lieux privatifs de liberté (CGPL) et la CNIL.
La Défenseure des enfants exprime son total désaccord sur le fait qu’ait
été décidé arbitrairement et sans aucune concertation de dissoudre
certaines autorités indépendantes et d’aménager une simple articulation
avec d’autres.
Elle demande donc au Gouvernement d’expliciter sur la base de quelles
logiques il a pris la décision de supprimer à mi-mandat une autorité
indépendante de la République en charge de la défense et de la promotion
des droits de l’enfant dont le travail est reconnu unanimement en France
et à l’étranger.
Concernant plus spécifiquement les enfants :
La Défenseure des enfants rappelle que depuis sa création l’Institution
a traité des réclamations concernant près de 20.000 enfants.
1. La Défenseure des enfants considère que cette nouvelle
organisation va affaiblir la mission de défense et de promotion
des droits de l’enfant :
* Les enfants (mais aussi leurs parents) ne s’adresseront
pas facilement à un Défenseur des droits qui n’aura pas
une compétence visible et spécialisée pour les enfants.
Les modèles européens auxquels fait référence le projet
de loi prévoient sous une forme ou sous une autre un
Défenseur des enfants en tant que structure distincte ou
adjointe du Médiateur général.
* En matière de défense des droits de l’enfant le projet
de loi marque un recul par rapport à la loi du 6 mars
2000 qui a confié au Défenseur des enfants la mission de
défendre tous les droits fondamentaux des enfants
consacrés par la loi ou par un engagement international
régulièrement ratifié ou approuvé, et notamment la
Convention internationale des droits de l’enfant à
laquelle il n’est à aucun moment fait référence dans le
projet.
Cela ne pourra qu’entraîner une réduction des
interventions que la Défenseure des enfants est amenée à
faire régulièrement auprès des pouvoirs publics en
faveur d’enfants qui vivent des situations qui ne sont
pas formellement interdites dans le droit français mais
qui sont contraires à leur intérêt supérieur au sens de
la Convention internationale des droits de l’enfant :
par exemple, la présence d’enfants dans les Centres de
rétention administrative, le traitement des mineurs
étrangers isolés, l’accès aux soins des enfants de
Mayotte, ... C’est donc l’Autorité morale et la force
d’interpellation de la Défenseure des enfants à travers
ses interventions et avis qui sont réduites.
* Le projet de loi ne prévoit rien sur le maintien de la
mission de promotion des droits de l’enfant qui est
affirmé dans l’article 5 de la loi du 6 mars 2000, que
la Défenseure des enfants a développé considérablement
en 3 ans - en partenariat avec des conseils généraux de
tout bord politique et avec l’Education nationale - par
la création de 32 « jeunes ambassadeurs » faisant leur
service civil volontaire auprès de son institution et
ayant sensibilisé sur les droits de l’enfant plus de 50
000 enfants en trois ans dans 12 départements.
Elle rappelle qu’elle anime également une équipe de 60
correspondants territoriaux qui la représentent sur tout
le territoire. Leurs attributions (promotion des droits
de l’enfant, médiations interinstitutionnelles de
premier niveau lorsqu’un droit de l’enfant est menacé,
liens avec les différentes autorités publiques, enquêtes
de terrain sur la mise en œuvre des droits de l’enfant,
tutorat des jeunes ambassadeurs...) diffèrent de celles
des délégués du Médiateur de la République. Le projet de
loi ne dit rien sur le devenir de ces hommes et de ces
femmes issus de la société civile qui, souvent depuis la
création de l’institution, se dévouent à la cause des
enfants.
2. Dominique VERSINI rappelle que l’apport du Défenseur des enfants
dépasse le traitement des réclamations et s’inscrit dans une
réflexion de société sur les grandes questions concernant les
enfants
En 3 ans elle a fait des propositions de réformes législatives
sur des questions de société reprises par le Gouvernement (le
statut des tiers beaux-parents, la situation des enfants dans
les séparations parentales conflictuelles,...), des propositions
d’améliorations de politiques publiques (le rapport sur les
Adolescents en souffrance mis en application par la ministre de
la Santé a entraîné la multiplication des Maisons des
adolescents et des équipes mobiles de pédopsychiatrie), des
recommandations relatives aux mineurs étrangers isolés, aux
tests ADN, et à la justice des mineurs.
3. L’Institution du Défenseur des enfants contribue à porter la
parole des enfants au plus haut niveau de l’Etat
En 2009, a été réalisée une grande consultation nationale
donnant la parole aux collégiens et lycéens sur 10 sujets qui
les concernent (famille, éducation, discriminations, violences,
justice, handicap, santé, expression et la participation ...).
Leurs 200 propositions, rassemblées dans un livre d’or de la
parole des jeunes et destinées au Président de la République et
au Parlement, seront rendues publiques par leurs porte-parole à
la Sorbonne le 20 novembre 2009.
La Défenseure des enfants pense qu’il serait particulièrement
opportun que le Gouvernement vienne à cette occasion expliquer
aux jeunes le nouveau dispositif envisagé pour la défense de
leurs droits.
4. Dominique VERSINI va assurer la Présidence du réseau européen
des 35 Défenseurs des enfants (European Network of Ombudspeople
for Children)
Ces Défenseurs des enfants se réunissent en assemblée générale à
Paris du 23 au 25 septembre 2009 pour échanger leurs expériences
en matière de respect des droits de l’enfant en présence de
représentants du Conseil de l’Europe et de la Commission
européenne.
La Défenseure des enfants invite le Gouvernement, le Parlement et la
presse à venir les rencontrer pour comprendre leurs différentes
modalités d’organisation qui, dans tous les cas, identifient nettement
la visibilité de la fonction de Défenseur des enfants.
Dominique VERSINI considère que la suppression du Défenseur des enfants
sous la forme décidée par le Gouvernement marque un recul dans le
respect des droits fondamentaux des enfants et va à l’encontre des
préconisations du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies qui,
dans son rapport du 22 juin 2009, a demandé au Gouvernement de «
continuer à renforcer le rôle du Défenseur des enfants ».
Pour mémoire :
Dominique VERSINI, conseiller d’Etat, ancien secrétaire d’Etat chargée
de la lutte contre la précarité et l’exclusion (2002-2004) et
Co-créatrice du Samu Social de Paris (1993), a été nommée Défenseure des
enfants par décret du Président de la République le 29 juin 2006 pour
une durée de 6 ans (2006-2012). Elle a succédé à Claire Brisset
(2000-2006), actuelle médiatrice de la Ville de Paris.
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Denis Lebioda
Ligue de l'enseignement - Chargé de mission Alpes du Sud
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