[Infoligue] Les après-midi sportifs à l'école, est-ce une si bonne idée ?

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mer 26 Mai 14:47:28 CEST 2010


Les après-midi sportifs à l'école, est-ce une si bonne idée ?

Publié par : LEMONDE pour Le Monde.fr
Le : 25.05.10 | 18h33


Dans une centaine d'établissements scolaires, les élèves pourront suivre 
des cours d'éducation physique tous les après-midi.

Le ministre de l'éducation nationale, Luc Chatel, a annoncé 
l'expérimentation d'après-midi consacrés aux sports au sein d'une 
centaine de collèges et de lycées répartis sur toute la France. Six 
questions sur cette mesure.

1. Sur quel fondement idéologique s'appuie cette initiative ?

Pour le président de la République, Nicolas Sarkozy, "le sport est une 
école du respect des autres, du respect de la règle, de la loyauté et du 
dépassement de soi". Ainsi s'était-il exprimé dans sa lettre aux 
éducateurs de septembre 2007. Il y avait même ajouté un définitif : "Je 
crois à la valeur éducative du sport."

Récemment, au moment de la mise en place des internats destinés aux 
élèves exclus d'un collège, le sport a aussi été présenté comme central 
au sein de ces structures destinées à rescolariser des jeunes en 
difficultés.

2. Pourquoi ouvrir ce débat aujourd'hui ?

Luc Chatel a annoncé un colloque sur les rythmes scolaires pour juin. La 
date n'est pas fixée, mais il s'agira de poser les bases d'un débat de 
longue haleine sur le sujet. Son expérimentation fonctionne aujourd'hui 
comme une entrée en matière dans ce sujet délicat.

3. Est-ce respectueux du rythme naturel des enfants ?

Contrairement à une idée reçue, les débuts de matinée ne sont pas des 
moments idéaux pour les apprentissages. Les chronobiologistes sont assez 
unanimes à estimer que l'élève est intellectuellement disponible en fin 
de matinée et en fin d'après-midi. Ce sont là les moments des pics 
d'attention.

Une organisation qui place les apprentissages fondamentaux le matin et 
les activités physiques l'après-midi ne respecte pas vraiment ces 
données scientifiques.

4. Est-ce que cette organisation améliorera les résultats scolaires ?

A l'issue de sa présentation, le ministre a annoncé espérer "observer 
les bénéfices [de son expérimentation] au profit d'une meilleure 
réussite des élèves". Si l'on en croit les Allemands ce serait l'inverse.

Depuis 2004, ces derniers ont consacré 4 milliards d'euros pour 
permettre à un tiers des écoles primaires et un quart des collèges 
d'offrir une journée complète de classe, en réponse au mauvais 
classement de l'Allemagne à l'évaluation internationale Pisa (qui mesure 
dans une trentaine de pays les compétences des élèves à 15 ans). Les 
après-midi sportifs ont été rendus responsables des mauvais résultats du 
système.

5. Augmentera-t-on ainsi la pratique sportive des jeunes français ?

Un million de jeunes pratiquent déjà un sport au sein de leur 
établissement scolaire, le mercredi après-midi, voire à l'heure du 
déjeuner dans le cadre d'associations sportives. Avec 700 000 inscrits, 
ce sont les collégiens qui nourrissent le plus les rangs. Et les 
comparaisons internationales montrent une France tout à fait dans la 
norme en matière de temps scolaire consacré aux sports.

En primaire, les trois heures théoriques hebdomadaires se réduisent en 
moyenne à deux heures douze minutes selon les données ministérielles, au 
collège, les quatre heures de la classe de 6e deviennent trois dès 
l'année suivante et deux au lycée général et une heure de plus en lycée 
professionnel. Ces horaires ressemblent assez à ceux mis en place par 
nos voisins.

Quant aux sports pratiqués individuellement, les moins de 18 ans sont 
titulaires de 8 des 14 millions de licences signées en France chaque 
année. Ce sont là encore les 10-14 ans qui sont les plus assidus avec un 
quart des licences.

6. Que cache cette expérimentation ?

Cette expérimentation vise-t-elle à modifier à terme le statut du sport, 
pour le sortir du bloc des apprentissages fondamentaux ? La question est 
posée par le principal syndicat des professeurs d'éducation physique et 
sportive (EPS), le SNEP. A l'heure où les restrictions budgétaires sont 
de mises, la tentation pourrait être bien réelle de changer le statut de 
cet enseignement.

Signe avant-coureur, l'EPS a déjà eu du mal à se faire une place au sein 
du socle commun de connaissances et de compétences que doit maîtriser 
chaque élève à la fin de sa scolarité obligatoire.


Maryline Baumard

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Denis Lebioda
Chargé de mission 
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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