[Infoligue] Spectacle vivant : l'ancrage dans les territoires, atout ou boulet ?

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Lun 4 Nov 09:54:14 CET 2013


Spectacle vivant : l'ancrage dans les territoires, atout ou boulet ?

Publié par : http://www.localtis.info
Le : jeudi 31 octobre 2013

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Le ministère de la Culture publie, dans le dernier numéro de sa lettre 
"Culture études" (octobre 2013), une étude originale intitulée "Quel(s) 
territoire(s) pour les équipes artistiques de spectacle vivant ?". 
L'étude, à dominante sociologique, s'appuie sur une hypothèse centrale : 
"Le rapport au territoire des équipes artistiques est déterminé 
conjointement par la structuration et le fonctionnement de l'espace 
culturel régional et par la position, la trajectoire et les stratégies 
professionnelles des équipes elles-mêmes (et/ou des artistes qui les 
composent)".
En d'autres termes, il s'agit d'explorer et d'expliciter les liens qui 
unissent - ou non - une équipe artistique de spectacle vivant et son 
territoire. Plus prosaïquement, "l'enjeu est ici de comprendre dans 
quelle mesure et de quelles manières des artistes peuvent trouver, là où 
ils sont, les ressources nécessaires pour vivre de leur art, de leurs 
spectacles".

Un monde très hiérarchisé

Pour cela, l'auteur - docteur en sociologie et chercheur associé au 
laboratoire Sociétés, acteurs et gouvernements en Europe (Sage) de 
l'université de Strasbourg - a mené ses investigations dans deux régions 
: l'Alsace et la Lorraine.
Dans un premier temps, l'étude dresse un portrait de l'espace culturel 
de diffusion du spectacle vivant, qui apparaît comme un lieu à la fois 
structuré et hiérarchisé. Elle distingue trois réseaux concentriques : 
un réseau primaire - correspondant à l'industrie du spectacle (grandes 
salles privées) et aux scènes labellisées -, un réseau secondaire 
regroupant lui aussi des salles privées et des établissements soutenus 
par l'Etat et/ou les collectivités territoriales et, enfin, un réseau 
parallèle de diffusion, à la marge du champ artistique (employeurs 
privés occasionnels, cafés, Education nationale...). Au final, un 
système pyramidal très hiérarchisé, avec un accès difficile, voire très 
difficile, au sommet et, à l'inverse, un accès aisé et des opportunités 
nombreuses dans le réseau parallèle, avec pour contrepartie une faible 
visibilité.

"La mécanique complexe du rapport au territoire"

L'étude s'attaque ensuite à "la mécanique complexe du rapport au 
territoire". Le terme "complexe" n'est pas usurpé, tant les interactions 
et les contradictions sont nombreuses. Ainsi, il apparaît une 
contradiction - au demeurant pas forcément insurmontable - entre 
l'attachement au territoire, qu'il soit volontaire ou subi, et la 
mobilité nécessaire à la création artistique. Comme l'explique l'auteur, 
"l'enjeu est d'articuler un ancrage territorial, comme base de 
production, avec un élargissement du réseau de diffusion au-delà de la 
région d'implantation afin de gagner en visibilité auprès des 
professionnels et des médias".
Sur le premier volet de l'ancrage, l'étude pointe notamment la 
concentration des équipements, notamment sur les métropoles régionales. 
Elle relève aussi l'obligation du travail avec les publics, écoles ou 
établissements locaux, qui est souvent la contrepartie du financement 
des collectivités : "le travail qui suit l'obtention de l'aide publique 
contribue à renforcer encore l'attachement au territoire". Mais l'étude 
montre aussi la dimension positive de cet attachement au territoire, qui 
a souvent "un fondement affectif".

La mobilité, moyen de survie économique et facteur d'épanouissement

Il reste que cet attachement, volontaire ou non, au territoire, entre en 
contradiction avec la mobilité, qui est aussi "un moyen de survie 
économique". La pérennité de nombreuses équipes ne tient en effet qu'à 
leur capacité à vendre leurs représentations, alors que le marché local 
ou régional se révèle souvent insuffisant, surtout pour des productions 
"pointues". La mobilité est aussi un facteur d'épanouissement 
professionnel - et de lutte contre la routine -, à travers les horizons 
qu'elle ouvre et les contacts qu'elle procure.
L'étude s'achève par une tentative de segmentation et de représentation 
graphique du rapport au territoire des équipes artistiques selon leur 
niveau d'intégration professionnelle. Au final, un travail original et 
stimulant, dans lequel les acteurs du spectacle vivant et les 
collectivités territoriales ne manqueront pas de se reconnaître, bien 
au-delà des deux régions étudiées.


Jean-Noël Escudié / PCA

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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