[Infoligue] Comment sauver le tissu associatif français ?
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 5 Déc 08:56:53 CET 2014
Comment sauver le tissu associatif français ?
par : STÉPHANE GUÉRARD
Publié par : http://www.humanite.fr/
Le : Vendredi, 21 Novembre, 2014
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Une commission d’enquête parlementaire s’est penchée sur les difficultés
des associations face à la crise. La commission d’enquête parlementaire,
présidée par le député communiste Alain Bocquet, met sur la table
cinquante-cinq propositions pour ce secteur, pris en tenaille par
l’austérité et la marchandisation de ses champs d’activités. Le monde
associatif salue ses propositions publiées jeudi 20 novembre. Mais il
attend du gouvernement des mesures pour faire face à l’austérité et au
désengagement des pouvoirs publics qui touchent tous les secteurs, de
l’insertion au sport en passant par la culture ou la prévention.
Les notes et rapports commencent à s’accumuler. Après celui sur le choc
administratif appliqué aux associations en début de mois, c’était ce
jeudi autour de la commission d’enquête parlementaire sur « les
difficultés du monde associatif » d’émettre ses cinquante-cinq
propositions pour remédier à la sévère crise à laquelle doit faire face
ce secteur. Un secteur qui n’est pas des moindres au vu des chiffres
affichés (voir ci-contre). Les représentants du mouvement associatif ont
jusqu’à présent toujours vanté le caractère résistant et résilient à la
crise de leurs activités. Mais pour la première fois et malgré le nombre
record de création d’associations en 2013 (73000 créées), l’heure n’est
plus à fanfaronner. Après avoir crû deux fois et demie plus vite que
dans le secteur privé entre 2008 et 2010, l’emploi associatif stagnait.
Le premier semestre consacre une première baisse des effectifs. Ce
voyant rouge indique qu’après avoir tapé dans leurs réserves, parfois
dans leurs patrimoines, les structures les plus faibles commencent à
flancher. Si ses homologues restent prudents, le Collectif des
associations citoyennes parle, lui, d’un plan social silencieux à venir,
de 200 000 à 250 000 emplois supprimés. De fait, chaque semaine remonte
des collectivités territoriales une litanie de diminutions des fonds
publics consacrés aux associations. 520000 euros de moins à Montmorillon
(Vienne); moins 10 % de subventions dans le Nord, idem à Montluçon;
moins 5% à Graulhet... Petit à petit, le plan d’économies de 21
milliards annoncé par le gouvernement pour financer son pacte de
responsabilité assèche l’action publique. Les villes, départements,
régions, se voient privés pour l’an prochain de 3,7 milliards d’euros de
dotations de l’État. Chacune de ces strates administratives répercute
l’austérité, mettant à mal le contrat social liant jusqu’à présent la
puissance publique au mouvement associatif pour répondre aux besoins
sociaux et de citoyenneté.
Par un effet de vague, ce tsunami budgétaire commence à toucher au coeur
le mouvement associatif. De haut en bas. Culture du coeur, un réseau de
lutte contre l’exclusion culturelle et l’isolement sociétal, proposait
il y a peu 300000 sorties culturelles et sportives à ceux qui en étaient
exclus. Ce réseau national et ses 40 antennes locales sont aujourd’hui
en péril, après une baisse de 60 % de ses subventions en cinq ans. Plus
localement, dans les Hauts-de-Seine, l’association Espaces a dû
licencier 30 personnes, dont 20 en insertion dans le domaine de la
gestion des espaces verts. La faute aux financements d’État qui se sont
taris dès 2009, ainsi qu’au passage du département de la subvention à la
procédure des appels d’offres pour confier ses chantiers.
Ces deux exemples parmi tant d’autres montrent la vie associative aux
prises avec un redoutable effet de ciseaux. À la lame de la diminution
des financements publics s’ajoute celle du changement de relation entre
les associations et la puissance publique. Cette dernière envisage
désormais ses partenaires comme des prestataires de services chargés de
remplir les missions de service public dont elles ne veulent plus.
« En période de crise, la vie associative est un rempart à
l’individualisme et au repli sur soi ». Alain Bocquet, président de la
commission parlementaire.
L’utilité sociale est passée par pertes et profits. Les associations se
retrouvent souvent en concurrence entre elles ou face à des acteurs
privés sur les marchés les plus rentables, comme ceux dans le tourisme
ou l’aide à domicile. « On croit faire des économies en choisissant le
mieux-disant économique. Mais c’est souvent un choix à court terme qui
coûte cher au final, souligne Benoît Menard, directeur général de
l’Uniopss (tête de réseau dans le sanitaire et social). Un prestataire
privé pour la distribution des repas à des personnes âgées ne va
s’occuper que de la livraison des plateaux. Faudra-t-il passer par un
appel d’offres pour que l’on se soucie aussi de la santé de la personne
livrée, comme nous le faisons? » À cet effet ciseaux s’ajoute une
troisième coupure: celle de la réforme territoriale à venir qui, en
redistribuant les responsabilités entre les collectivités, laisse les
associations dans l’incertitude de l’identité de leurs interlocuteurs.
C’est donc peu dire que le monde associatif attend beaucoup des récents
rapports parlementaires. « Ils donnent du poids à la description de la
situation et à la nécessité de tenir compte de notre secteur », se
réjouit Nadia Bellaoui. La présidente du Mouvement associatif, qui
fédère 600000 associations, y voit une seconde vertu. « Ils formalisent
des propositions que nous avions préconisées, dont la mise en oeuvre est
urgente, pour la sécurisation de nos financements, un accès plus simple
aux fonds européens, pour faire vivre la charte des engagements
réciproques entre pouvoirs publics et associations. »
Les propositions de congé de quelques jours en faveur des salariés afin
de mener des actions de bénévolat, comme l’ouverture d’un fonds de
formation en faveur des dirigeants bénévoles d’association, pour
soutenir l’engagement citoyen, sont aussi appréciées. «Le monde
associatif doit s’emparer de tous ces outils pour qu’il trouve ensuite
un débouché dans la loi ou les réglementations », appelle de ses voeux
Alain Bocquet, président de la commission d’enquête parlementaire. À
entendre Françoise Dumas, rapporteure des travaux rendus par les
députés, certaines mesures pourront s’intégrer rapidement dans les
projets de loi sur la réforme territoriale ou dans les mesures de
simplification.
« Il y a certes des avancées, mesure Didier Minot, membre du Collectif
des associations citoyennes. Mais on ne s’attaque pas au coeur du
problème: l’offensive libérale pour faire entrer l’action des
associations dans le secteur marchand. » Les outils juridiques existent
pourtant déjà. Dans un autre rapport, le député Yves Blein soulignait
que le droit européen permettait de sortir du secteur marchand des «
services d’intérêt général non économiques, des services sociaux
d’intérêt général ou purement sociaux ». Ne manque plus que la volonté
politique.
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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