[Infoligue] Service civique : un dispositif probant, mais fragilisé par sa montée en charge, juge la Cour des comptes

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 13 Fév 14:01:39 CET 2014


Service civique : un dispositif probant, mais fragilisé par sa montée en 
charge, juge la Cour des comptes

Publié par : http://www.localtis.info/
Le : mardi 11 février 2014

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Le service civique est un succès : les jeunes (16-25 ans) volontaires 
(6.000 en 2010, 20.000 en 2012, 19.000 en 2013, objectif 2014 35.000) se 
pressent pour obtenir une mission d'intérêt général dans les nombreuses 
structures d'accueil agréées (1) par l'Agence du service civique. 46% 
des anciens volontaires se disent satisfaits voire très satisfaits (43%) 
de leur expérience et 95% d'entre eux recommanderaient à d'autres jeunes 
de réaliser un service civique (2). Une aubaine, pourrait-on dire, quand 
on sait qu'en France, en juillet 2013, 24,2% des moins de 25 ans étaient 
au chômage, même si l'Agence se défend d'avoir mis en place un 
dispositif qui "substitue à l'emploi" (des structures d'accueil peuvent 
parfois être accusées de constituer un réservoir d'emplois peu 
rémunérateurs pour des personnes en situation précaire). En tout cas, le 
service civique fait des émules et en cette période économique 
difficile, il est de bon ton de l'encourager. Mais l'ambition du 
président de la République d'atteindre en 2017 un chiffre de 100.000 
jeunes engagés risque finalement d'avoir un effet quelque peu pervers : 
la "soutenabilité budgétaire" du dispositif risque alors de se poser, 
tout comme se posera la question de la capacité à faire émerger autant 
de missions de qualité chaque année.

Si elle reconnaît le bien-fondé du service civique, la Cour des comptes 
recommande à l'Etat, dans son rapport 2014, de réduire le coût unitaire 
des contrats de service civique (qu'il finance en grande majorité) en 
fixant une indemnité forfaitaire différente pour les missions à temps 
partiel (24h/hebdomadaire), de celles à temps plein (35h/hebdomadaire), 
aujourd'hui indemnisées de la même manière (salaire mensuel pour le 
volontaire de 467.34 euros ou 573.72 sur critères sociaux), tout en 
faisant participer, pour celles qui le peuvent, les structures d'accueil 
à "leur juste part du coût du service" sous forme de cofinancement comme 
en Allemagne. Selon la Cour, cela "incite les structures à veiller à la 
qualité de leurs missions".

Les dépenses consacrées au service civique  au sein du programme 163 
Jeunesse et Vie associative, rappelle le rapport, se sont élevées à 33,7 
millions d'euros en 2010, 89,7 en 2011 et 123,9 millions en 2012 pour un 
programme dont les crédits représentent 200 millions d'euros en 2012. La 
montée en charge souhaitée par le gouvernement pèse de manière 
croissante sur le programme, au détriment "d'autres actions de l'Etat en 
faveur de la jeunesse" pointe la Cour des compte...  qui préconise donc 
de procéder aux arbitrages indispensables pour assurer "l'adéquation 
entre les objectifs et les moyens budgétaires". Des moyens qui 
dépasseraient, avec la prise en charge des 100.000 jeunes, "les crédits 
alloués aujourd'hui à la mission" (des tensions budgétaires ont déjà 
conduit en 2013 à un calibrage prévisionnel de la durée des missions à 
leur niveau minimum soit 6 mois au lieu de 12, même si la réalité fait 
état d'une moyenne de 7,2 mois, ce qui pour les volontaires est 
insuffisant en termes de temps de formation et d'expériences).

Le rapport insiste aussi sur la nécessité de retenir un rythme de montée 
en charge compatible avec la maîtrise du risque de substitution à 
l'emploi. "La crise économique risque de brouiller les objectifs du 
dispositif", prévient la Cour, qui met ainsi en garde contre "les 
gisements de missions nouvelles qui se trouvent dans des secteurs 
'santé, sports' et dans des catégories de structures où les risques de 
substitution à l'emploi sont importants" et en appelle à une vigilance 
accrue dans l'instruction des dossiers. Elle en appelle également, sur 
le terrain, à  "une meilleure coordination des services en charges des 
dispositifs en faveur de la jeunesse entre le service civique et les 
autres instruments en faveur de l'emploi des jeunes". Il lui semble en 
outre important de recadrer les objectifs initiaux, contenus dans le COM 
(3), qui peinent finalement à être atteints à ce jour : manque de mixité 
sociale (17,7% des volontaires sont issus des quartiers en 2011 pour un 
objectif de 25%) ; en termes de formation, moins de 25% des engagés ont 
un niveau inférieur au bac (objectif 35%) ; la part des handicapés parmi 
les volontaires est de 0,4% (objectif 6%)...

La Cour recommande par ailleurs à l'Agence du service civique d'aller 
vers de nouveaux partenaires, notamment les collectivités territoriales. 
L'agence s'appuie, pour la Cour, sur un nombre insuffisant de réseaux 
associatifs, qui certes ont contribué au succès du service civique mais 
qui doit aujourd'hui se diversifier, notamment au profit des 
collectivités. "Le secteur des collectivités territoriales pourrait être 
un axe important de développement des missions", développe le rapport. 
Mais celles-ci doivent veiller à ne pas confier n'importe quelle tâche à 
ces volontaires. A ce titre, un partage des bonnes pratiques observées 
dans les collectivités qui ont su concevoir des missions de qualité est 
fortement conseillé. Des collectivités partenaires... la Cour y voit 
également l'occasion de faire baisser la part financière de l'Etat dans 
le dispositif. En effet, au titre du tutorat, l'Etat verse 100 euros par 
mois aux associations qui emploient des jeunes volontaires, somme que ne 
perçoivent pas les collectivités qui offrent des missions au sein de 
leurs services.

Sandrine Toussaint

  (1) Personnes morales agréées, organismes sans but lucratif, personne 
morale de droit public.
(2) L'Agence du service civique a fait réaliser une série d'enquêtes en 
2011 et en 2012.
(3) Contrat d'objectifs et de moyens conclu entre l'Etat et l'agence 
pour 2012-2014, qui fixe  des objectifs tels que : la part des jeunes 
engagés non diplômés, la part des volontaires issus des quartiers, la 
part de jeunes handicapés...

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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