[Infoligue] François Chérèque : « Je ne suis pas favorable à une obligation sur le service civique »

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 22 Avr 15:01:53 CEST 2016


François Chérèque : « Je ne suis pas favorable à une obligation sur le 
service civique »

Publié par : http://www.maire-info.com/
Le : 22  avril 2016

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François Chérèque, président de l’Agence du service civique et tout 
récemment nommé Haut-Commissaire à l’engagement civique, a reçu Maire 
info pour faire notamment le point sur la place des collectivités 
territoriales dans le dispositif du service civique. Pour lui, le 
service civique ne doit en aucun cas être « une contrainte » pour les 
maires.


Quel succès le dispositif du service civique rencontre-t-il aujourd’hui 
chez les maires ?
Un succès assez mitigé. Il y a historiquement des grandes mairies qui se 
sont investies dès le départ, et ont un programme de service civique 
important. Mais si on regarde l’engagement global entre associations, 
services publics et mairies, on constate un retard important dans ces 
dernières. Cela ne veut pas dire que les maires ne s’y intéressent pas ! 
Parfois, en particulier dans les petites mairies, ils trouvent cela trop 
compliqué. Il faut que l’on fasse de la simplification administrative, 
que l’on aide les maires dans l’accueil de jeunes en service civique. Il 
est important de comprendre que cela ne doit pas être une contrainte 
pour les maires, au contraire : il y a une forme de démarche 
gagnant-gagnant. Les jeunes sont gagnants parce que cela leur donne une 
expérience de vie collective – ce qui ne veut pas dire de formation 
professionnelle ; et les collectivités sont gagnantes parce qu’elles 
améliorent le service aux usagers, et surtout parce qu’elles créent une 
dynamique avec la jeunesse, qui est positive.

Vous dites que cela ne doit pas être une contrainte. Pourtant, le 
président de la République a récemment parlé « d’obligation ». Se 
dirige-t-on vers une obligation d’embauche, notamment par les 
collectivités ?
Je ne suis pas favorable à une obligation. On ne peut pas obliger une 
structure à accueillir des jeunes en service civique, et on ne peut pas 
obliger un jeune à faire un service civique. Il doit s’agir d’une 
rencontre entre le désir d’engagement d’un jeune et le souhait d’une 
structure de l’accueillir. Au-delà, il se pose un problème 
constitutionnel : l’État ne peut pas imposer une politique ou des 
dépenses à une collectivité territoriale – c’est le principe de libre 
administration. Il faut de la conviction plutôt que de la contrainte.

Si, comme le souhaite François Hollande, toute une classe d’âge devait à 
l’avenir faire son service civique, comment pourrait-on faire sans une 
forme d’obligation ?
Le président de la République a parlé de « la moitié d’une classe d’âge 
», pas de toute une classe d’âge. Sinon, ce serait le service militaire 
! Cela voudrait dire 800 000 jeunes en service civique par an, garçons 
et filles. Et cela supposerait une obligation pour le jeune. C’est un 
choix qui relève des politiques, mais cela amènerait beaucoup de 
considérations nouvelles, notamment financières. Il faudrait les loger, 
se poser la question de ce que l’on fait de ceux qui ne veulent pas le 
faire… Donc, le président a dit 350 000 jeunes [en 2020], c’est déjà un 
objectif énorme. Mais il faut savoir que l’an dernier nous avons eu plus 
de 200 000 demandes, et que l’on a pu leur offrir 53 000 missions. On 
est donc à quatre jeunes pour une mission ! La première responsabilité, 
c’est d’abord de répondre à ces 200 000 demandes.

Si le nombre de jeunes en service civique augmente, ne va-t-il pas finir 
par y avoir un problème financier, pour les employeurs, à un moment où 
les collectivités sont prises à la gorge financièrement ?
L’évolution financière du dispositif relève du Parlement. Actuellement 
cela coûte 800 € par jeune et par mois à l’État, et 106 € à la structure 
qui l’accueille. Cela reste minime, mais il ne faut pas oublier que cela 
nécessite aussi des tuteurs, de l’encadrement, un minimum 
d’organisation. Mais aujourd’hui, le vrai débat est ailleurs : il y a 
des jeunes qui tombent dans la délinquance, qui partent vers le 
radicalisme, qui ont du mal à fonctionner collectivement. Si l’on veut, 
en particulier dans les collectivités, ramener une partie de ces jeunes 
qui s’éloignent du cœur de la République, je pense que ça vaut le coup.

Ne pourrait-il pas y avoir un effet pervers à terme ? Il existe beaucoup 
de jeunes en emplois aidés, n’y aura-t-il pas une tentation de remplacer 
une partie de ces emplois aidés par des jeunes en service civique ?
Il y a toujours un risque, autant d’ailleurs pour les emplois aidés que 
pour les emplois statutaires. Les collectivités, comme les associations, 
font face à une baisse de leurs moyens. Il pourrait être tentant de 
vouloir remplacer un salarié par deux ou trois jeunes en service civique 
– ça ne coûte que 300 € pour trois jeunes ! On a un travail de 
vérification à faire sur ce sujet. Mais l’essentiel c’est que les jeunes 
en service civique ne sont pas là pour exercer une profession : un jeune 
en hôpital ne remplace par l’aide-soignante, un jeune dans un club de 
sport ne remplace par l’éducateur sportif. Il peut l’aider sur 
l’accueil, les aspects pédagogiques, etc., mais en aucun cas il 
n'intervient dans l’exercice de son métier.

L’Agence du service civique sera présente au Salon des maires. Quel 
message allez-vous y délivrer aux maires ?
Je veux leur dire : si l’on veut vraiment développer le service civique, 
les collectivités territoriales et au premier chef les mairies, sont 
incontournables. L’intérêt des mairies, c’est d’avoir une vraie 
politique vis-à-vis de la jeunesse, que les jeunes puissent entrer dans 
des actions positives. Quand nous interrogeons les jeunes à la fin de 
leur service civique, 91 % nous disent qu’ils sont heureux de ce qu’ils 
ont fait. Un jeune qui va dans une maison de retraite rendre visite aux 
personnes âgées, qui aide des personnes handicapées à aller à la 
piscine, tout cela c’est très positif pour le jeune qui le fait comme 
pour la personne qui en bénéficie. C’est un échange entre la population 
et la jeunesse, qui est quand même plus positif que les images de 
violence que l’on voit parfois. Quand le jeune est conscient de la 
valeur qu’il apporte, il est plus respectueux du bien commun. C’est ce 
message-là que je veux faire passer.

Propos recueillis par Franck Lemarc

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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