[Infoligue] La bataille des dons fait rage entre les associations
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 6 Déc 09:16:48 CET 2016
La bataille des dons fait rage entre les associations
Publié par : LE MONDE ECONOMIE
Le : 05.12.2016
Par Denis Cosnard
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Décembre concentre entre 30 % et 40 % de la collecte annuelle. Les
grandes institutions s’en sortent le mieux.
Chaque jour, Marie-Carmen Carles croise les doigts. Pourvu qu’aucun
événement ne perturbe la collecte de dons qu’elle orchestre pour le
Secours catholique. En novembre et décembre, l’organisation récolte
environ 35 millions d’euros, autant que durant les dix autres mois de
l’année. « C’est le moment où il ne faut pas se rater ! »
En 2015, les attentats du 13 novembre à Paris avaient tout bouleversé.
« Juste après, il y a eu quinze jours de sidération pendant
lesquels les gens n’ont plus donné, raconte Mme Carles. Décembre a été
meilleur, sans compenser complètement le manque à gagner. »
Cette année, tout a été préparé pour obtenir davantage. Première étape :
la publication en novembre de données sur la pauvreté. Un rapport repris
par les médias, et cité lors du dernier débat de la primaire de la
droite. Deuxième temps, le lancement d’une campagne pour soutenir
l’association. Au programme, affiches, publicités dans la presse et à la
télévision, témoignages dans les paroisses… Enfin, 2 à 3 millions de
Français vont recevoir dans les prochains jours des courriers et des
mails les appelant à faire un don.
L’opération coûte cher au Secours catholique : les frais de collecte
totalisent 14 millions d’euros sur l’année. Mais ils permettent de
recueillir 110 millions de dons et legs. Et il faut bien cela pour se
distinguer sur un marché de la générosité passablement encombré.
Pour tous ceux qui vivent de la philanthropie, décembre est un peu comme
Pâques pour les marchands de chocolat. Le moment clé. Celui où les
porte-monnaie s’ouvrent le plus. Un héritage judéo-chrétien qui fait de
la fin d’année une période de partage et de solidarité. Mais aussi une
conséquence des règles fiscales : pour bénéficier des réductions
d’impôts, les chèques doivent être datés du 31 décembre au plus tard.
Incapacité de l’Etat à tout financer
Résultat, décembre concentre souvent 30 % à 40 % de la collecte
annuelle, et les organisations concernées se disputent le terrain. Ce
mois-là, il n’est pas rare que les donateurs repérés comme généreux
reçoivent trois ou quatre messages par jour, de la part des Restos du
cœur, de la Croix-Rouge, de Médecins sans frontières, de Greenpeace,
mais aussi de partis politiques, d’hôpitaux, de musées, d’universités,
ou encore de laboratoires de recherche. Sans oublier le Téléthon, lancé
vendredi 2 décembre, qui fait de l’Association française contre les
myopathies le premier collecteur de dons du pays.
« On essaie de savoir quand les associations sur le même créneau
que nous vont lancer des appels, et d’envoyer les nôtres avant, confie
un professionnel. En même temps, il ne faut pas trop s’éloigner de Noël… »
Depuis dix ans, le nombre d’institutions faisant appel à la générosité
publique a bondi, en raison notamment de l’incapacité de l’Etat à tout
financer. Mais la population des donateurs, elle, est restée stable.
L’arrivée des baby-boomers à l’âge où l’on donne davantage, l’essor des
collectes de rue ou sur Internet, tout cela aurait pu faire croître le
nombre de donateurs. Or il stagne depuis 2004 autour de 5,4 millions de
foyers fiscaux, constate avec dépit l’association Recherches et
solidarités dans sa dernière étude, publiée en novembre. La faute à la
crise, au chômage ?
4,5 milliards d’euros en 2015
Heureusement pour le monde associatif, ceux qui donnent se montrent
chaque année plus généreux. En dix ans, le don moyen déclaré aux impôts
a bondi de 55 %, pour atteindre 250 euros en 2015. Au total, avec les
quêtes dans les églises, l’argent remis de la main à la main, etc., les
Français ont donné 4,5 milliards d’euros en un an, dont 2,5 milliards
déclarés à Bercy, estime Recherches et solidarités.
« Ce qui tire la hausse globale, ce sont les sommes apportées par
les grands donateurs, les ménages très aisés, qui peuvent donner
plusieurs milliers d’euros par an », analyse Xavier Delattre, directeur
général de la Fondation Entreprendre et spécialiste du sujet.
Un effet de l’essor des grandes fortunes en France et des incitations
fiscales. La moitié des contribuables dont le revenu imposable dépasse
78 000 euros par an effectue des dons.
Toutes les ficelles du marketing sont utilisées. A commencer par les
envois de courriers et de mails, ciblés le plus possible
Autant de donateurs, beaucoup plus d’organismes sur les rangs : la
compétition est chaque année plus forte. Pour sortir du lot, les
professionnels utilisent toutes les ficelles du marketing. A commencer
par les envois de courriers et de mails, ciblés le plus précisément
possible.
« Nous avons une base de contacts, surtout des gens qui ont signé
des pétitions sur des sites comme Change. org, explique Jimmy Minier, de
ActionAid, une association qui milite pour la justice fiscale. En
décembre, nos prospects vont recevoir 7 à 8 mails, les premiers pour
expliquer nos actions, les autres insistant sur la nécessité de donner
avant le 31 décembre. »
D’autres recourent aux fichiers de certains journaux, ou à des bases
croisant les quartiers et les revenus. « On utilise un ciblage très fin
pour adresser les bons messages à chacun », explique Stéphanie de
Beaumont, responsable de la philanthropie à la fondation Apprentis
d’Auteuil.
Prestataires extérieurs, crowdfunding, micro-dons
A côté de ces méthodes éprouvées, d’autres font appel à des campagnes de
rue réalisées par des prestataires extérieurs, au crowdfunding, aux
micro-dons. Ou encore au don par SMS, la nouveauté 2016, testée par
l’Unicef avec l’appui de l’agence TBWA. Et presque tous choient leurs
grands bienfaiteurs de façon spécifique. A l’Institut Pasteur, par
exemple, « nous leur proposons des rencontres à Paris, indique
Frédérique Chegaray, la responsable des dons et du mécénat. Ils peuvent
visiter notre campus, l’appartement de Louis Pasteur, discuter avec nos
chercheurs et toucher du doigt ce que nous faisons de leur argent ».
Qui sont les gagnants de cette bataille ? Avant tout les grandes
associations. Depuis des années, ce sont elles qui voient leur collecte
croître le plus vite, selon Recherches et solidarités. Elles ont les
moyens de mener des campagnes importantes et de soigner les grands
donateurs. Vainqueurs aussi, les organismes qui mettent en avant des
causes touchant le grand public.
« La défense des animaux ou des enfants sont des combats assez
faciles en termes de marketing, relève Alexis Vandevivère, de l’agence
spécialisée Adfinitas. A l’inverse, collecter pour les sans-papiers ou
ceux qui sortent de prison devient quasiment impossible. »
Denis Cosnard
Journaliste au Monde
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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