[Infoligue] « Réinventer l’ESS dans les cinq ans à venir »

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 26 Oct 07:27:09 CEST 2017



« Réinventer l’ESS dans les cinq ans à venir »

Publié par : 
https://www.alternatives-economiques.fr//reinventer-less-cinq-ans-a-venir/00081196
Le : 25/10/2017

*********************************


Entretien - Christophe Itier Haut-commissaire à l'Economie, social et 
solidaire et à l'innovation sociale

Alors que le gouvernement va proposer un pacte de consolidation et de 
croissance de l’économie sociale et solidaire (ESS) pour les cinq années 
à venir, Matignon a convié les associations le 17 octobre dans le cadre 
du lancement d’une concertation de lutte contre la pauvreté des enfants 
et des jeunes. Entretien avec Christophe Itier, le nouveau 
Haut-commissaire à l’Economie sociale et solidaire.

En quoi cela fait-il sens de rattacher l’ESS au ministère de la 
transition écologique et solidaire ?

Ce rattachement non plus à Bercy mais au ministère de la Transition 
écologique et solidaire, traduit la volonté du gouvernement de 
réinscrire l’économie sociale et solidaire (ESS) dans un projet et une 
vision politiques. Si nous voulons transformer notre société, son modèle 
de développement, vers un modèle qui concilie performances économique, 
sociale et écologique, c’est en premier lieu en réaffirmant cette 
ambition politique, ce que fait Nicolas Hulot et ce que je fais à ses côtés.

Quel rôle joueront les acteurs de l’ESS dans la stratégie de lutte 
contre la pauvreté annoncée par Emmanuel Macron ?

L’ESS est déjà pleinement engagée sur ce champ. Il nous revient 
désormais, d’une part, d’accompagner le changement d’échelle des 
entreprises de l’ESS, et d’autre part, de promouvoir et essaimer les 
innovations en la matière pour que nous soyons au ­rendez-vous de 
l’ambition fixée par le président de la République.

Dans les tout prochains mois, nous allons mettre en œuvre une stratégie 
pour consolider le modèle des entreprises de l’ESS, lorsque cela est 
nécessaire, et proposer surtout de nouveaux leviers de développement. Ce 
développement, nous le voulons parce qu’il crée, de manière plus 
dynamique que le reste de l’économie, de l’emploi durable non 
délocalisable et qu’il incarne une manière d’entreprendre plus raisonnée 
et humaniste.

Nous le voulons surtout parce qu’il est porteur de solutions nouvelles 
face aux grands défis de notre société : le vieillissement de la 
population, le décrochage scolaire, l’économie circulaire, la 
digitalisation, la mobilité, le chômage de longue durée et son 
corollaire l’exclusion sociale et la pauvreté. Autant de priorités de 
l’action gouvernementale.

N’y a-t-il pas incohérence entre cette stratégie et la baisse des 
emplois aidés ?

« On sort toujours de l’ambiguïté à ses dépens », dit l’adage. La baisse 
de contrats aidés a clairement révélé une triple ambiguïté : 
premièrement, cet outil de lutte contre le chômage est devenu pour les 
gouvernants un instrument de baisse statistique artificielle du chômage, 
bien peu respectueuse des personnes qui, de loin en loin, enchaînent les 
contrats aidés, sans autres perspectives. Notre responsabilité est de 
mettre un terme à cette pratique purement électoraliste.

Deuxièmement, l’efficacité de ces contrats aidés en termes de retour à 
l’emploi dépend de la nature des contrats – ceux qui intègrent 
systématiquement de la formation ont de bons résultats –, mais aussi du 
professionnalisme de la structure d’accueil. Là encore, notre 
responsabilité est d’évaluer, d’entendre les acteurs, plus de 200 seront 
entendus dans le cadre de la mission ­Borello, et de proposer une 
optimisation de ces contrats sur le triptyque mise à 
l’emploi-accompagnement­-formation. Notre combat, c’est le chômage de 
longue durée. Les 15 milliards du grand plan d’investissement fléchés 
sur la formation seront un atout pour rendre l’insertion professionnelle 
plus performante.

Troisièmement, le recours aux contrats aidés est devenu parfois un moyen 
pour les associations de pallier leur manque de financement. Sur ce 
point, notre responsabilité est de sortir les associations de cette 
fragilité et de faire évoluer leur modèle économique. En même temps 
qu’il faut prioriser ces contrats sur les quartiers, les territoires en 
difficulté, l’urgence sociale… et les personnes très éloignées de 
l’emploi dont on sait, malgré tous les efforts en matière de formation 
ou d’accompagnement, qu’elles ne retrouveront pas l’emploi de droit 
commun. Je pense notamment aux personnes qui vivent dans la grande 
exclusion et en fin de carrière active.

Comment faire sans moyens budgétaires supplé­mentaires ?

Pour les associations et les entreprises de l’ESS, qui aujourd’hui 
fondent tout ou partie de leur modèle sur le recours aux contrats aidés, 
notre volonté politique est de créer un écosystème favorable à une 
évolution de leur modèle économique. Et c’est tout l’enjeu de la 
stratégie que nous sommes en train de coconstruire avec le Conseil 
supérieur de l’ESS. Elle consiste à déverrouiller un certain nombre de 
freins et à identifier les leviers de croissance de l’ESS : 
assouplissements réglementaires, mécénat, finance solidaire, commande 
publique… Le bénévolat et l’engagement citoyen en sont aussi, en tenant 
compte des nouvelles pratiques des bénévoles et en profitant davantage 
des opportunités offertes par le numérique.

Ma feuille de route repose d’abord sur une méthode : la co-construction. 
Au lendemain de ma nomination, j’ai réuni le Conseil supérieur de l’ESS, 
pour adresser la vision politique et dire qu’il fallait que nous 
co-construisions une stratégie à cinq ans a minima pour le développement 
de l’économie sociale et solidaire. Je leur ai dit : « Mettons-nous 
immédiatement au travail », des commissions se réunissent au sein de ce 
Conseil qui représentent toutes les familles de l’ESS ; pour qu’au 
bureau du Conseil supérieur le 22 novembre, puis dans un Conseil 
supérieur qui se tiendra mi-décembre ou tout début 2018, nous puissions 
recueillir les propositions pour cette feuille de route, que nous 
l’alimentions et que nous puissions faire les arbitrages pour définir 
cette stratégie.

Quels sont les outils pour promouvoir l’innovation sociale ?

Ainsi, en début d’année 2018, nous aurons construit ce pacte de mesures 
de consolidation et de croissance de l’ESS pour les cinq années à venir. 
Partout en France, des entreprises de l’ESS apportent des solutions pour 
une société plus inclusive et sont prêtes à se développer, à essaimer. 
Leur en donner la possibilité, c’est la première priorité de ma feuille 
de route. La seconde, c’est l’innovation sociale. C’est le sujet du 
moment, la presse spécialisée et professionnelle ne cesse d’en parler. 
Il faut donc peut-être mieux la définir : la définition de la loi ESS 
est extrêmement large. C’est d’autant plus important si nous voulons 
transposer à cette innovation sociale des dispositifs qui ressemblent 
peu ou prou à ce qui existe sur l’innovation technologique – notamment 
en termes de crédit d’impôt recherche ou de statut de jeune entreprise 
innovante.

Nous sommes arrivés à un moment de notre histoire collective où, à 
l’instar des mutations profondes que nous vivons sur le plan 
technologique, écologique, économique ou sur les formes du travail par 
exemple, il nous faut réinventer l’action au service de l’intérêt 
général : l’Etat, les collectivités, la société civile, le monde 
économique, le citoyen lui-même…, nous devons tous nous réinterroger, 
être créatifs pour innover non seulement sur les solutions apportées, 
mais aussi sur la place de chacun. L’ambition est grande, mais la 
détermination aussi.

Propos recueillis par Catherine André

-- 

-----------------------
Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
-----------------------
Nos sites :
http://www.laligue-alpesdusud.org
http://www.laligue-alpesdusud.org/associatifs_leblog
-----------------------





Plus d'informations sur la liste de diffusion Infoligue