[Infoligue] Le spectacle vivant en observation

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Lun 5 Fév 08:52:34 CET 2018


Le spectacle vivant en observation

Le ministère de la culture va créer un observatoire afin de centraliser 
les données sur les arts de la scène.

Publié par : LE MONDE
Le : 05.02.2018
Par Sandrine Blanchard

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« Nous sommes incapables de dire combien il y a de créations de 
spectacles par an en France. » Cet aveu de Régine Hatchondo, directrice 
générale de la création artistique au ministère de la culture, lors d’un 
débat, le 17 janvier, aux Biennales internationales du spectacle de 
Nantes, consacré à la diffusion des œuvres théâtrales, n’a étonné aucun 
des participants. D’autant que d’autres interrogations restent sans 
réponse. Combien de personnes assistent-elles chaque année à des 
spectacles ? Quel est le nombre d’entrées payantes et gratuites ? Quels 
publics se déplacent ? Combien de représentations sont données et quelle 
est l’évolution de la diffusion ? Sur tous ces points, la Rue de Valois 
n’est pas en mesure d’apporter des chiffres actualisés et précis.

Contrairement au secteur du cinéma qui livre chaque année, par le Centre 
national de la cinématographie et de l’image animée (CNC), des chiffres 
détaillés de fréquentation, le spectacle vivant apparaît comme le parent 
pauvre des études statistiques. « Actuellement, nous disposons de peu 
d’éléments, nous n’avons pas de vision claire et exhaustive », 
reconnaît-on au cabinet de Françoise Nyssen. « Mais une petite 
révolution est en marche », assure l’entourage de la ministre de la 
­culture. Cette « petite révolution » a pour nom l’« observatoire du 
spectacle vivant ». Il s’agit de créer une sorte de « CNC de la scène ».

Inscrite dans la loi « liberté de la création, architecture et 
­patrimoine » votée en juil­let 2016, l’obligation, pour tous les 
entrepreneurs de spectacles vivants de faire remonter leurs données de 
billetterie (prix, nom et auteur de l’œuvre, localisation et type de 
lieu pour chaque représentation), est désormais sur les rails.

A la suite d’un appel d’offres, l’entreprise Capgemini vient d’être 
choisie pour créer l’interface informatique permettant de collecter ces 
chiffres et de constituer un référent national d’informations fiables 
sur la fréquentation du spectacle vivant. Dès juillet, le système 
devrait se déployer en trois vagues : les structures labélisées ou 
conventionnées, celles relevant du théâtre privé, puis celles déclarant 
leurs chiffres au Centre national de la chanson, des variétés et du 
jazz. Une fois le processus généralisé, un observatoire, regroupant 
notamment des acteurs du secteur et des représentants du département des 
études et des statistiques du ministère, étudiera ces données, qui 
seront rendues publiques.

« Un outil précieux »

Il s’agit aussi d’établir une cartographie nationale des lieux, une 
sociologie des spectateurs et de mesurer la durée de vie des créations. 
« Cet observatoire sera un outil précieux pour améliorer et piloter la 
politique du spectacle vivant, notamment en matière de diffusion et 
d’élargissement des publics, défend-on au cabinet de la ministre. 
L’objectif est d’observer – pas de contrôler – pour partager un 
diagnostic. »

Ce déficit majeur de données exhaustives a été relevé dans maints 
documents depuis près de quinze ans (rapport Latarjet en 2004, 
entretiens de Valois en 2008, rapport Metzger-Martinelli-Murat en 2012). 
« L’idée d’un observatoire est un serpent de mer et une patate chaude », 
résume Fabien Jannelle, ancien directeur de l’Office national de 
diffusion artistique et auteur de Pour une politique du spectacle vivant 
(Les Solitaires intempestifs, 2016).

L’affaire est compliquée : des cafés-théâtres aux centres dramatiques 
nationaux, en passant par les théâtres municipaux, les scènes 
conventionnées, les festivals… le paysage est vaste et hétéroclite. « 
Depuis les années 1980, le nombre de lieux, de compagnies indépendantes 
et de créations s’est multiplié sans tenir compte des possibilités de 
diffusion et sans que l’élargissement du public suive, car la 
démocratisation culturelle a davantage été géographique que sociale », 
résume Fabien Jannelle. Conséquence : le déséquilibre entre l’offre et 
la demande entraînerait une baisse du nombre moyen de représentations 
par création et de la durée des tournées.

Objet de méfiance

« L’économie du spectacle vivant est à réinterroger. Actuellement, la 
diffusion est en crise, les périodes de programmation sont trop courtes 
pour laisser le temps aux œuvres de s’installer et d’attirer un public 
moins averti », considère Michel Orier, ancien directeur général de la 
création artistique, directeur de la musique et de la création 
culturelle à Radio France. « Lorsqu’il y a un spectacle qui suscite de 
l’enthousiasme et de l’émotion, il devrait circuler beaucoup plus 
qu’actuellement », dit Pascal Rogard, directeur général de la Société 
des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), qui milite depuis 2004 
en faveur d’un vrai outil statistique.

Si ce projet d’observatoire a mis tant d’années à voir le jour, c’est « 
parce que l’évaluation n’a jamais été une priorité rue de Valois », 
souligne Michel Orier. Sans compter que la méfiance règne, du côté des 
lieux de spectacles, quant à l’utilisation qui sera faite de ces 
données. « Lorsque j’ai participé à la mission Latarjet, on était 
considérés comme des ­suppôts du capitalisme parce qu’on parlait 
d’économie, d’offre et de demande », se souvient Fabien Jannelle.

Les conclusions de cette mission, qui alertait déjà sur la ­diffusion 
insuffisante des spectacles, « n’ont pas pris une ride », dit Régine 
Hatchondo. «Nous avons aujourd’hui une chance historique de rebattre les 
cartes », ajoute-t-elle. Au Syndicat national des entreprises 
artistiques et culturelles, on redoute que les critères d’évaluation de 
ces nouvelles données aient pour ­objectif, dans un contexte budgétaire 
contraint, de faire des économies.

En savoir plus sur 
http://www.lemonde.fr/culture/article/2018/02/05/le-spectacle-vivant-n-echappera-bientot-plus-aux-etudes-statistiques_5251795_3246.html#xHx8Ke6qdLkZuHgJ.99


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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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