[Infoligue] Contrats aidés : Muriel Pénicaud veut «démontrer que nul n’est inemployable»
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 16 Jan 09:47:16 CET 2018
Contrats aidés : Muriel Pénicaud veut «démontrer que nul n’est inemployable»
Propos recueillis par Séverin Cazes et Catherine Gasté
Publié par : http://www.leparisien.fr/
Le : 16 janvier 2018
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Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, et Jean-Marc Borello, président
du groupe SOS, présentent les grandes lignes du rapport sur la réforme
des contrats aidés.
Les contrats aidés ? Ce n’est pas « l’alpha et l’oméga de la politique
de l’emploi », a lancé mi-novembre Emmanuel Macron aux élus locaux, qui
dénonçaient la baisse des contrats subventionnés par l’Etat (310 000 en
2017, contre 457 000 en 2016). Pour 2018, l’objectif est de 200 000
nouveaux emplois aidés, exclusivement dans le secteur non marchand.
Moins nombreux donc, mais mieux ciblés et plus efficaces. C’est la
philosophie du rapport remis ce mardi à la ministre du Travail, Muriel
Pénicaud, intitulé « Donnons-nous les moyens de l’inclusion ». Son
auteur Jean-Marc Borello, surnommé le Bill Gates du social, est
président du groupe SOS (numéro un européen de l’économie sociale et
solidaire) et aussi celui qui murmure à l’oreille... d’Emmanuel Macron.
Vous avez commandé en septembre un rapport sur l’insertion des personnes
les plus en difficulté. Sont-elles les oubliées de votre politique ?
Muriel Pénicaud. Aujourd’hui, la croissance repart de manière robuste,
mais elle n’est pas inclusive par nature. Les personnes les plus
éloignées de l’emploi n’en profiteront pas forcément. Or, 1,4 million de
chômeurs cherchent un emploi depuis plus de deux ans et 1,3 million de
jeunes ne sont ni en formation ni en emploi. La croissance ne peut pas
tout. Si nous n’avons pas une action vigoureuse, il n’y aura pas d’accès
à l’emploi pour ces publics.
Pourquoi avoir choisi Jean-Marc Borello pour mener cette mission ?
M.P. C’est une grande figure de l’économie sociale et solidaire. Il a
commencé comme éducateur spécialisé, et nos parcours se sont croisés.
Quand il s’occupait de l’insertion des jeunes, j’ouvrais une des
premières missions locales dédiées aux moins de 25 ans. Je connais son
franc-parler. Je ne voulais pas d’un rapport insipide, mais des
propositions ambitieuses et opérationnelles.
Quelles sont ces propositions ?
M.P. Le rapport sera remis ce mardi après-midi. J’annoncerai plusieurs
orientations, dont la transformation des contrats aidés afin qu’ils
soient plus efficaces. Premier grand changement : on va sélectionner les
employeurs — associations et collectivités locales. Pour bénéficier de
ce dispositif unique baptisé Parcours emploi compétences, ils devront
mettre en œuvre tout ce qui permet de s’insérer durablement, à savoir un
triptyque : emploi, formation et accompagnement personnalisé. Je veux
que l’on sorte des politiques publiques qui se contentent de mettre les
gens dans des cases. Ma conviction est que nul n’est inemployable.
Est-ce aussi votre avis en tant qu’homme de terrain ? N’est-ce pas un
peu démagogique ?
Jean-Marc Borello. Non, depuis quarante ans, j’ai vu des gens qui
avaient accumulé toutes les difficultés — des toxicomanes, des personnes
malades, des multirécidivistes, des migrants —, à qui on offrait une
chance et qui s’en sortaient. Mais cela demande plus d’engagement. C’est
ce qui ressort aussi de ma mission. J’ai rencontré plus de 400
personnes. Toutes le disent : on peut insérer tout le monde. Et toutes
font le même constat : cela dépend davantage de la capacité des
employeurs que de celle des gens aidés. Ceux qui s’inscriront dans cette
logique d’engagement — des associations ou des collectivités —, seront «
habilités » à rentrer dans le dispositif. Insérer durablement les gens,
c’est un métier. Ça s’apprend, et il faut avoir un projet inclusif qui
réponde aux trois exigences : mise en situation de travail,
accompagnement et formation professionnelle.
Quelles sont les failles de la lutte contre l’exclusion menée jusqu’à
présent ?
J.-M.B. Le manque d’accompagnement et surtout de formation. 36 %
seulement des personnes en contrat aidé en avaient une, en moyenne de
trois heures par mois... L’autre défaillance tient à ce qu’on a voulu
appliquer la même chose partout. A Mayotte, en Ile-de- France ou dans la
Creuse, la situation n’est pas la même. Il faut faire du sur-mesure,
comme l’on bien compris l’association Mosaïk RH (NDLR : cabinet de
recrutement spécialisé dans la promotion de la diversité), le chef
Thierry Marx avec Cuisine Mode d’emploi ou encore les Epide (un
dispositif pour les jeunes déscolarisés).
Toutes les bonnes volontés peuvent-elles suffire à dessiner une
politique nationale ?
M.P. Il n’y a pas de baguette magique. Il faut une mobilisation de tous
les employeurs concernés, mais aussi celle de tous les ministères. Pas
seulement celui du Travail, par exemple le ministère des Armées a déjà
montré sa capacité d’intégration, il y en a d’autres. Le service civique
a été aussi une surprise. Alors qu’il n’était pas conçu à l’origine pour
être « inclusif », il s’est révélé très efficace.
L’objectif est ambitieux. Le budget sera-t-il à la hauteur ?
J.-M.B. Ce n’est pas parce qu’on dépense plus, qu’on fait mieux. Ce
serait se moquer des Français et des gens dont on veut s’occuper que de
faire croire cela.
M.P. Ça a d’ailleurs été un des défauts des politiques menées par le
passé. L’argent ne fait pas tout. Nous voulons engager une
transformation profonde et cela commence par changer le regard sur les
personnes les plus éloignées de l’emploi. C’est un élément clé de la
réussite. Avec l’engagement des employeurs et leur « employeurabilité »
qui s’inséreront dans les Parcours emploi compétences, qui remplaceront
les contrats aidés, nous aurons des résultats. Pas question de jouer la
politique du chiffre, ni d’afficher des résultats statistiques qui ne
recouvriraient aucune réalité. Notre ambition sera de démontrer dans les
deux années qui viennent que personne n’est inemployable.
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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