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« Le mouvement des “gilets jaunes” révèle un désir inédit
d’association »<br>
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L’erreur de diagnostic a été de croire à un individualisme forcené,
à une société atomisée, analysent Philippe Jahshan et Roger Sue,
spécialistes du monde associatif, dans une tribune au « Monde ».<br>
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Par : Philippe Jahshan (Président du Mouvement associatif) et Roger
Sue (Professeur à l’université Paris-Descartes-Sorbonne)<br>
Publié par : LE MONDE<br>
Le : 11 janvier 2019<br>
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Tribune. Le mouvement des « gilets jaunes » marque un tournant
politique dans le quinquennat, mais aussi, plus profondément, une
volonté commune d’échanger et de vivre ensemble autrement. Un désir
inédit d’association et de lien social se manifeste spontanément,
soutenu dès l’origine par près de 80 % des Français. L’allusion à
1968 n’est pas fortuite ; on se parle sans retenue dans la rue entre
inconnus. Sur les places, les ronds-points, on interpelle sur les
salaires, les fins de mois, les retraites ; on mange ensemble, on
partage l’ordinaire dans un moment extraordinaire où on se sent
aussi pleinement citoyen en réinventant une démocratie à échelle
humaine.<br>
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On ne comprendrait pas la résistance et la persistance des « gilets
jaunes », jour et nuit, dans le froid et sous la pluie, en dépit du
travail, des enfants, du quotidien, si ne se manifestait aussi le
plaisir d’être associé ensemble, sous aucune autorité, commandement
ou organisation centrale. Des milliers d’associations informelles à
l’échelle des ronds-points se réunissent le temps d’une
manifestation le plus souvent pacifique. On retrouve ce même désir
sur les plateaux de télévision où, sans parler en leur nom, les «
gilets jaunes » invités représentent avec sincérité, et parfois
éclat, la place légitime du citoyen ordinaire, à égalité avec les
responsables politiques et les professionnels de la communication.<br>
Il n’est donc pas surprenant qu’au-delà des mesures financières
annoncées par Emmanuel Macron sur le smic et la CSG des retraités,
notamment, la revendication phare du mouvement soit le référendum
d’initiative citoyenne (RIC), manifestant qu’à l’avenir le peuple
souhaite être associé à la vie politique du pays par de nouvelles
formes de procédures démocratiques. En définitive, la forme
associative de l’événement compte sans doute autant que le fond des
revendications multiples, quoi qu’on en pense, parfois utopiques ou
contradictoires.<br>
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Nouvelle « associativité »<br>
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L’erreur de diagnostic sociologique du nouveau quinquennat, comme
des précédents, a été de croire à un individualisme forcené,
enfermant les individus sur eux-mêmes dans une société atomisée,
facile à manipuler, n’attendant que la figure du Commandeur pour
l’unifier et la représenter. Sans voir que l’individualisation en
question est de plus en plus « relationnelle », qu’elle ne
s’accomplit réellement que dans la libre relation d’égalité à
l’autre et aux autres. C’est cette nouvelle « associativité » des
individus qui a créé les réseaux d’où est parti, sur Internet, le
mouvement des « gilets jaunes », tout étonnés de se retrouver
ensemble alors qu’ils se croyaient seuls.<br>
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« Le lien associatif fragilisé dans les territoires accentue les
fractures qui les traversent »<br>
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Cette expérience ne s’effacera pas des mémoires ; elle ouvre une
nouvelle modalité du lien social marqué par l’esprit d’association.
Il suffit aussi de consulter les nombreuses enquêtes sur les valeurs
des Français, qui démontrent qu’avec la famille l’association figure
en tête, loin devant les autres institutions. On ne peut que
regretter que le mouvement associatif ait été au départ si peu
considéré, subissant une réduction de ses ressources, des emplois
aidés et la fin les dons qui provenaient précisément de l’ISF, autre
revendication des « gilets jaunes ». Le lien associatif fragilisé
dans les territoires accentue les fractures qui les traversent.<br>
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Mais l’avenir est au grand débat annoncé par le premier ministre,
avec un volet sur la participation démocratique. Dans un délai très
court, on peut craindre que les réunions en mairie entraînent une
moindre participation et paraissent pilotées par le haut.
L’animation par des associations qui s’engagent au jour le jour
auprès des populations dans les territoires, ou des « gilets jaunes
» eux-mêmes, paraît aussi indispensable. Associations qui sont moins
un corps intermédiaire que l’émanation directe du corps social qui
les crée et les modèle à son image, comme possibilité toujours
renouvelée d’articuler l’individuel au collectif.<br>
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N’est-ce pas Jean-Jacques Rousseau qui déclarait que, sans
l’association préalable, le contrat social ne serait qu’un « contrat
de dupes » ? A méditer aujourd’hui quand on évoque de toutes parts
la nécessité de refonder le contrat social.<br>
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : <a class="moz-txt-link-abbreviated" href="mailto:denis.lebioda@laligue-alpesdusud.org">denis.lebioda@laligue-alpesdusud.org</a>
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Nos sites :
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