[Laicite-info] A petits pas, l'exécutif tente de réinvestir les questions de laïcité

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 13 Déc 08:23:34 CET 2012


A petits pas, l'exécutif tente de réinvestir les questions de laïcité

Publié par : LE MONDE
Le : 12.12.2012

Par Stéphanie Le Bars

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Jules Ferry (1832-1893), ministre de l'instruction et président du 
Conseil sous la IIIe République fit adopter d'importantes mesures de 
réforme de l'enseignement public dont la laïcité, la gratuité, 
l'enseignement primaire obligatoire.

Après un début de quinquennat plutôt discret sur les questions de 
laïcité, le gouvernement et le Parti socialiste cherchent-ils à 
reprendre pied sur un terrain où la gauche est traditionnellement 
attendue ? Le président de la République a annoncé, dimanche 9 décembre, 
la création d'un Observatoire national de la laïcité, initiative saluée 
par les tenants du camp laïque. Et, mardi 11, pas moins de trois 
ministres se sont succédé aux troisièmes rencontres de la laïcité, 
organisées par les députés socialistes à l'Assemblée nationale.

Apparus ces dernières années sur la défensive face aux "agressions de la 
droite et du gouvernement précédent" sur les questions de laïcité, les 
socialistes assurent aujourd'hui être décidés "à promouvoir la laïcité", 
selon Jean Glavany, spécialiste du sujet au PS. "Ce n'est pas parce que 
nous sommes au pouvoir que nous devons nous endormir sur nos lauriers."

"UNE VALEUR IMMUABLE DANS UN CONTEXTE CHANGEANT"

Si la gauche demeure partagée entre une acception libérale et une 
approche plus restrictive du principe de la laïcité, les intervenants 
socialistes ont livré, mardi, une analyse commune, axée sur la défense 
de la loi de 1905. "Il faut en finir avec une conception chancelante de 
la laïcité. La laïcité est une valeur immuable dans un contexte 
changeant", a insisté Bruno Le Roux, chef de file des députés 
socialistes. M. Hollande l'avait rappelé dimanche, en remettant la 
légion d'honneur au spécialiste de la laïcité, le nonagénaire Emile 
Poulat : "La loi de 1905 n'est pas une loi comme les autres, qui peut 
être modifiée ; elle a fondé des principes immuables qui permettent de 
répondre aux questions du temps présent et à l'irruption de religions 
[dans la société], comme l'islam français."

"La gauche a trop longtemps abandonné l'amour de la patrie, la laïcité", 
a renchéri le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, venu rappeler la 
"vigilance du gouvernement face aux intégrismes religieux". "Il faut 
occuper le terrain des valeurs, faire en sorte que les discours 
intégristes paraissent décalés et sectaires." M. Valls a aussi plaidé 
pour que "les questions religieuses soient abordées de manière apaisée 
et objective, en sortant de la polémique, du dévoiement et de la 
stigmatisation de l'islam".

Confrontée à l'opposition des responsables religieux et de nombre de 
croyants, la ministre de la justice, Christiane Taubira, s'est employée 
à démontrer la dimension "laïque et républicaine du mariage pour tous". 
Dimanche, M. Hollande, dans une allusion à ce texte, avait poliment 
rappelé que "le bien et le mal, les interdits, le licite et l'illicite 
existent en dehors des interprétations qu'en ont les cultes. Ce sont les 
législateurs qui en décident".

TIMIDES RÉALISATIONS

Pourtant, au-delà de ces déclarations d'intention, les réalisations du 
gouvernement demeurent timides. Annoncée il y a tout juste un an devant 
ce même cénacle d'élus et de militants associatifs, la promesse du 
candidat François Hollande d'inscrire les deux articles de la loi de 
1905 dans la Constitution est en souffrance. Face au tollé suscité par 
cette annonce qui invalidait de fait le régime concordataire d'Alsace et 
de Moselle, où les collectivités locales peuvent financer les cultes, le 
programme présidentiel avait dû promettre de protéger le concordat.

Depuis, le gouvernement a pris acte des "incompatibilités juridiques et 
législatives" de cette proposition, pourtant présentée comme la mesure 
phare du quinquennat sur ces questions, et travaille à une solution 
acceptable. Les députés socialistes, dont certains sont partisans de la 
disparition du concordat, se sont aussi attelés à la tâche.

L'observatoire annoncé "pour 2013" par M. Hollande reprend, lui, les 
contours d'une structure définie en 2007 par le gouvernement de 
Dominique de Villepin, sans précisions sur les contenus de sa mission ou 
la personnalité qui en aura la charge. M. Hollande a juste indiqué qu'il 
"ferait aussi des propositions sur la morale laïque".

Devant un auditoire conquis, le ministre de l'éducation nationale, 
Vincent Peillon, a défendu son projet d'instaurer cet enseignement, "en 
2014 ou en 2015". Mais, au-delà de la conviction philosophique selon 
laquelle "les valeurs de paix, de respect, de dignité, d'égalité 
hommes-femmes doivent être enseignées", le ministre ne s'est pas avancé 
davantage sur les contenus et la mise en oeuvre de cet enseignement, qui 
seront précisés en mars 2013 par la commission ad hoc. Devant le Haut 
Conseil à l'intégration, M. Peillon a par ailleurs annoncé, mardi, 
l'écriture d'une nouvelle charte de la laïcité adaptée aux 
établissements scolaires. Un tel texte est affiché dans les services 
publics depuis 2007.

Sans rentrer dans les détails, M. Valls a, lui, annoncé une 
"réorientation" des conférences départementales sur la liberté 
religieuse instaurées par le gouvernement précédent. Enfin, alors que le 
candidat Hollande s'était engagé à réécrire les décrets d'application de 
la loi Carle, qui, sous conditions, oblige un maire à payer les frais de 
scolarité d'un enfant de sa commune scolarisé dans l'établissement privé 
d'une autre ville, M. Peillon a avoué son "extrême prudence face à ce 
sujet complexe".

Stéphanie Le Bars

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Un livre pour une meilleure transmission à l'école

Plus encore que de la contestation dont elle est parfois l'objet, la 
laïcité souffre "d'ignorance ou d'incompréhension", affirme le ministre 
de l'éducation nationale dans la préface de l'ouvrage écrit pour le Haut 
Conseil à l'intégration et le ministère par le philosophe Abdennour 
Bidar. Face à ce constat, ce livre, intitulé Pour une pédagogie de la 
laïcité à l'école (Documentation française) et présenté mardi 11, 
propose aux enseignants des ressources réglementaires, conceptuelles et 
pédagogiques afin de les aider à répondre aux situations d'enseignement 
(cours de français, de philosophie, d'histoire, de sciences et vie de la 
Terre) ou de vie scolaire (cantine, tenues vestimentaires) dans 
lesquelles le principe de laïcité peut être mis en cause.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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