[Laicite-info] L'inquiétante offensive traditionnaliste sur l'Ecole
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 28 Jan 08:42:00 CET 2014
L'inquiétante offensive traditionnaliste sur l'Ecole
Publié par : http://www.cafepedagogique.net
Le : 28/01/14
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Les deux premières "journées du retrait" organisées par des mouvements
traditionnalistes ont été marquées par l'absence de plusieurs centaines
d'élèves. Si le phénomène reste très localisé et communautaire, sa
violence envers l'Ecole et parfois des enseignants et le climat de
méfiance qu'il développe envers l'Ecole inquiètent le ministère et les
syndicats.
"Ma fille a été absente pour cause que nous nous opposons à
l'enseignement de la théorie du genre dans les établissements
scolaires". Plusieurs dizaines d'enseignants ont eu droit à ces
remarques portées sur le bulletin de correspondance d'une de leurs
élèves le 24 ou le 27 janvier. Plus nombreux encore ont été les
enseignants qui ont constaté des absences injustifiées ou qui ont dû
faire face à des questions surprenantes de la part de parents affolés.
Difficile d'évaluer l'impact national de la campagne menée contre
l'Ecole. Si elle a pris une dimension nationale, elle n'est présente que
sur des territoires précis. Ainsi dans le Loiret, un département où le
mouvement est très présent, Bruno Chirouse, secrétaire national du
Snuipp signale des absentéismes très importants mais très localisés. "A
Montargis les collègues et les inspecteurs n'ont pas senti venir le
phénomène. On a enregistré jusqu'à un tiers d'élèves en moins dans des
écoles très localisées, en ZEP, en lien avec la communauté turque". Une
autre commune du département a été ciblée, Saint Jean de Ruelle, mais
là les enseignants ont anticipé le phénomène. A Strasbourg, c'est aussi
dans des écoles qui scolarisent des enfants de la communauté turque que
l'absentéisme est important, nous a signalé Christian Chevalier,
secrétaire général du Se Unsa. Dans le Rhône, Yannick Le Du , secrétaire
départemental du Snuipp, signale des absences à Vaulx-en-Velin, Lyon La
Duchère et Villeurbanne, là aussi dans des écoles accueillant des
enfants issus de l'immigration turque ou maghrébine. Dans les Pyrénées
atlantiques c'est dans les ZEP de Mourenx et de Pau que le mouvement est
présent. Au retrait d'élèves s'ajoutent des dégradations commises contre
les locaux syndicaux du Snuipp (dans le Loiret par exemple), la
dénonciation nominative publique d'enseignants sur des blogs.
"C'est un véritable harcèlement de l'école républicaine", nous a confié
Christian Chevalier, "parce qu'elle propose une éthique qui ne convient
pas à certains parents comme l'égalité garçons filles". Derrière ce
phénomène il y a une organisation poussée et rigoureuse avec un cadre
national et des déclinaisons locales qui se dévoilent sur des blogs et
des pages Facebook. Au coeur de "la journée du retrait", Farida
Belghoul, une personnalité apparue lors de la marche des Beurs dans les
années 1980 qui a évolué vers des thèses communautaires. Son mouvement
est soutenu par les traditionnalistes catholiques de la Manif pour tous,
des mouvements islamistes, des identitaires d'extrême droite et les
traditionnalistes éducatifs de l'association Lire écrire. On a là un
regroupement d'organisations d'horizons opposés mais qui rejettent les
valeurs républicaines. Le mouvement dispose de fichiers de parents et
envoie mails et SMS pour monter ses mobilisations.
Les accusations portées sur l'Ecole feraient rire si elles n'étaient
prises au sérieux par certains parents. Sur le site de la Journée du
retrait on affirme que "la pudeur et l'intégrité de nos enfants sont
profondément attaqués par la théorie du genre... Le pouvoir actuel
prévoit de véritablement rééduquer nos enfants". L'Ecole est accusée de
diriger les enfants vers des mouvements homosexuels "pour les inciter à
explorer de nouvelles pratiques sexuelles". Sur les réseaux sociaux
l'argumentation va encore plus loin dans le délire. Les enseignants
obligeraient les garçons à porter des robes. Ils organiseraient des
cours de masturbation. Ce n'est pas seulement le soi-disant enseignement
de la théorie du genre qui est dénoncé mais la perversion de l'école,
son caractère démoniaque. Les mensonges sont énormes mais l'idiotie de
cette campagne n'empêche pas une partie des parents de partager ces
rumeurs. "On est face à l'obscurantisme", nous confie Yannick Le Du.
"Ces gens salissent les instits. Ils fabriquent de la défiance envers
l'Ecole et ses valeurs".
Que faire face aux rumeurs ? Pour Christian Chevalier il faut "que
l'institution soit ferme, qu'elle soutienne les enseignants et là où
c'est nécessaire faire oeuvre de pédagogie auprès des parents". "Des
consignes ont été données aux recteurs d'être attentifs et d'être auprès
des enseignants qui seraient attaqués", nous a dit Jean-Paul Delahaye,
directeur de l'enseignement scolaire. "Les enseignants remplissent une
mission essentielle de l'Ecole, celle de transmettre les valeurs de
l'Ecole et de la République. le programme ABCD de l'égalité (cible des
traditionnalistes) à aucun moment ne transmet une supposée théorie du
genre. Il enseigne les valeurs de la loi, l'égalité entre les filles et
les garçons". Le ministère invitera aussi les directions à recevoir les
parents là où c'est nécessaire pour dialoguer avec eux. Certaines
n'avaient pas attendu les instructions. Des réunions spontanées ont été
organisées pour tordre le cou à ces rumeurs obscènes.
François Jarraud
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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