[Laicite-info] Enseignement laïque de la morale et enseignement laïque des faits religieux

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 9 Oct 14:27:44 CEST 2015


Enseignement laïque de la morale et enseignement laïque des faits religieux

Publié par : 
http://blogs.mediapart.fr/edition/laicite/article/091015/enseignement-laique-de-la-morale-et-enseignement-laique-des-faits-religieux
Le : 09 octobre 2015
Par Charles Conte


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Parmi les débats du Colloque "Laïcité: des combats d'hier au enjeux 
d'aujourd'hui" en figurent deux que nous pouvons mettre en parrallèle: 
l'enseignement laïque de la morale et l'enseignement laïque des faits 
religieux.

Ces deux thèmes seront abordé en particulier lors des tables ronde sur 
la "Laïcité face aux défis des religions" , et "Laïcité et éducation". 
DE plus Isabelle Saint-Martin, directrice de l'Institut Européen en 
Sciences des Religions (IESR) interviendra lors de la dernière table 
ronde "La Laïcité et la cause du peuple". L'IESR avait organisé en 2013 
un colloque sur ces thèmes "Enseignement laïque de la morale et 
enseignement des faits religieux" La Ligue de l'enseignement avait donné 
son point de vue dans une contribution reproduite ci-dessous:

" Cette contribution a un caractère politique. Elle est assortie de 
quelques rappels historiques, même si elle n’est pas le fait d’un 
historien. La Ligue de l’enseignement approuve et soutient 
l’enseignement laïque de la morale et l’enseignement laïque des faits 
religieux. Cet engagement est à la fois ancien et nouveau. Il est fondé 
sur la volonté de « faire société », pour reprendre l’intitulé de notre 
manifeste adopté en 2010, et sur la nécessaire prise en compte du monde 
tel qu’il est. Il est urgent de rebâtir du commun. L’appropriation des 
grands thèmes et des conséquences concrètes d’une morale authentiquement 
vécue y contribuera. La connaissance des faits religieux, qui sont des 
faits culturels, sociaux, économiques… et qui incluent la connaissance 
des dogmes comme de leur critique, est tout aussi nécessaire. Ces deux 
enseignements ne sont pas contradictoires. Ils se complètent. Ils 
doivent être donnés de façon laïque. C'est-à-dire en respectant 
scrupuleusement  la liberté de conscience de tous ceux, croyants, 
athées, agnostiques, indifférents…, qui le recevront. Il ne s’agit en 
aucun cas de dicter des conduites ou d’assener des doctrines. Il s’agit 
de sensibiliser à des réalités humaines, de faire connaître la pluralité 
du monde pour s’y situer de manière autonome et responsable. Ces 
engagements ne se sont jamais démentis. On trouve sur le Portail laïcité 
de la Ligue www.laicite-laligue.org des dossiers complets sur ces thèmes.

Dès ses origines la Ligue a, par la voix et les écrits de ses 
dirigeants, exprimé un intérêt pour les questions de morale. Il y a un 
siècle et demi,  le débat sur la morale laïque se développait. Parmi les 
contributeurs se trouvaient les premiers présidents de la Ligue : Jean 
Macé, Ferdinand Buisson… Celui-ci va jusqu’à donner à notre siège, le 12 
mars 1917, une conférence intitulée « Le fond religieux de la morale 
laïque ». Bien qu’il ait soigneusement distingué les dogmes chrétiens de 
la morale enseignée, la même conférence donnée aujourd’hui surprendrait 
beaucoup ! On retrouve dans les écrits des mêmes auteurs une 
connaissance approfondie et un intérêt réel pour les phénomènes 
religieux compris comme des faits culturels. Dans cette évocation 
rapide, il faut mentionner Albert Bayet. Président de la Ligue de 
l’enseignement de  1949 à 1959, il est l’auteur d’une trentaine 
d’ouvrages. Une bonne moitié de son œuvre est consacrée à la morale : « 
La science des faits moraux », « Histoire de la morale en France », « La 
morale laïque et ses adversaires », « Notre morale »… Bayet est 
rationaliste, et même président de l’Union rationaliste. Il se 
revendique libre penseur, et écrira le « Que sais-je ? » sur la Libre 
Pensée. Il analyse dans d’autres ouvrages, avec autant d’empathie que 
d’esprit critique, les relations entre christianisme et pacifisme, la 
casuistique chrétienne, l’œuvre de Pascal, les origines du christianisme 
et, bien entendu, les morales issues de l’évangile…

Cet intérêt sera exprimé sous des formes nouvelles à partir des années 
80. Lors de son assemblée générale de Montpellier, en juillet 1982, la 
Ligue est au cœur du combat pour construire un service public unifié et 
laïque de l’Education nationale. Dans un texte précurseur, les 
congressistes promotionnent une « école de l’éducation permanente plus 
ouverte ». Ils prônent notamment « l’élargissement des temps éducatifs, 
sous la responsabilité des personnels enseignants en direction de 
l’ensemble du champ des connaissances sans exclusive, incluant les 
idéologies, les philosophies, les religions ainsi que les autres 
problèmes culturels, technologiques, économiques et sociaux de notre 
temps dans le respect des principes de la laïcité, seule garantie des 
droits de l’enfant ». Les dix années suivantes, la Ligue se lance dans 
une vaste entreprise de ré-interrogation de la laïcité avec un rapport « 
Laïcité 2000 », des assises, des publications (« Laïcité en mémoire », « 
Laïcité en miroir »…). Dans ce cadre la position de principe adoptée en 
1982 sera reprise et mise en œuvre. Guy Gauthier, responsable du secteur 
culturel, coordonne un numéro spécial de la revue « Panoramiques ». 
Intitulé « Les religions au lycée : le loup dans la bergerie ? » (n° 2, 
4° trimestre 1991), il rassemble une vingtaine de textes représentant 
toutes les positions. Pour la petite histoire, l’auteur de la présente 
contribution (convaincu depuis par le Rapport Debray) y défendait la 
ligne la plus opposée. La Ligue est ensuite partenaire du colloque 
international organisé par le Centre régional de documentation 
pédagogique à Besançon les 20 et 21 novembre 1991 « Enseigner les 
religions dans une démarche laïque ». Parmi les nombreuses autres 
initiatives, conférences, textes divers… il faut mentionner un cycle de 
conférences données entre 2004 et 2005 à l’IUFM d’Auxerre à l’initiative 
du Cercle Condorcet d’Auxerre, affilié à la Ligue, avec la participation 
de l’IESR. Les actes ont été publiés sous le titre « Comprendre les 
faits religieux. Approches historiques et perspectives contemporaines » 
par le CRDP de Bourgogne en 2009. Cet investissement se traduit  
également par notre présence au conseil de direction de l’IESR.

La même démarche se retrouve dans la réflexion sur l’enseignement laïque 
de la morale. La Ligue, en tant que mouvement d’idées, a beaucoup œuvré 
dans ce domaine, en particulier au travers de trois colloques. Le 
premier confronte éthique laïque et éthique religieuse en janvier 1994. 
Il est organisé avec les Cercles Condorcet et le journal La Vie et fut 
suivi d'une publication "Quelle place pour la morale ?"  (Editions 
Desclée de Brouwer, 1995). En 2005 un autre colloque est organisé sous 
l’impulsion de Vincent Peillon, alors président de la Ligue de 
l'enseignement de la Somme et de notre région Picardie. Intitulé  « 
Quelle morale laïque aujourd'hui ? », les actes « Ecole, morale laïque 
et citoyenneté aujourd’hui » sont publiés par Laurence Loeffel aux 
Presses du Septentrion en 2009. Dernier colloque en date : « Pourquoi et 
comment faut-il développer une culture éthique à l’école publique ? ». 
Il s’est déroulé sur deux jours lors du Salon européen de l’éducation en 
novembre 2011, avec partenariat avec l’association d’intellectuels 
chrétiens « Confrontations ». Les actes seront publiés aux Editions 
Privat dans la collection « Le comptoir des Idées ». Lors de leur 
audition par la mission du Ministère de l’Education Nationale le 3 
décembre 2012, les représentants de la Ligue ont souligné que ce 
mouvement d’éducation populaire « peut utilement contribuer à un 
enseignement de la morale qui se construit autour des questionnements 
que nous renvoie une société fracturée, multiple, traversée de 
revendications de reconnaissances et de tentations à l’irrédentisme 
culturel et cultuel, au sein de laquelle la question sociale voisine la 
question laïque. Cet enseignement doit accepter de se dépendre des 
commodités universalistes qui nourrissent les nostalgies mais aussi des 
paresses identitaires qui fracturent les logiques de sociabilité. La 
morale laïque est moins faite pour être sue que pour être pratiquée au 
travers de véritables débats, c’est-à-dire d’échanges nécessairement non 
conclusifs afin de promouvoir une morale qui soit à l’opposé de 
l’imposition d’une vérité unique mais qui recherche des convergences 
fondées sur une écoute et un respect réciproques. Au fracas des arbres 
que l'on abat, préférons le silence des forêts qui poussent, la laïcité 
en sera le terreau fertile !  ».

Contribution donnée par Charles Conte, chargé de mission laïcité et 
formation militante à la Ligue de l'enseignement

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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