[Laicite-info] Mohamed Sifaoui : pourquoi Jean-Louis Bianco doit partir

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 29 Jan 09:22:52 CET 2016


Mohamed Sifaoui : pourquoi Jean-Louis Bianco doit partir

Publié par : http://www.lefigaro.fr
Le : 28/01/2016
Par Alexandre Devecchio

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FIGAROVOX/ENTRETIEN - Cent cinquante unversitaires et chercheurs ont 
apporté leur soutien au controversé président de l'Observatoire de la 
laïcité. Pour Mohamed Sifaoui, maintenir Jean-Louis Bianco à son poste 
n'est pas acceptable.

Mohamed Sifaoui est journaliste et écrivain, spécialiste de l'islam radical.

LE FIGARO-. Alors qu'il est contesté par Manuel Valls, dans une missive 
au président de la République, 150 universitaires et chercheurs 
apportent leur soutien à Jean-Louis Bianco et Nicolas Cadène à la tête 
de l'Observatoire de la laïcité. Partagez-vous ce point de vue? Et Pourquoi?

MOHAMED SIFAOUI-. D'abord, je vous remercie de me donner l'occasion 
d'exprimer mon point de vue au sujet de cette polémique. Ensuite, il est 
quand même cocasse de voir un homme de gauche défendre aujourd'hui la 
laïcité à travers un journal de droite. Même si je n'ignore pas que la 
plupart de vos lecteurs sont attachés à cette valeur essentielle, il 
reste que traditionnellement et historiquement, c'est une idée qui est 
défendue par les médias de gauche qui, pour certains, préfèrent de nos 
jours offrir des tribunes et une plus grande surface médiatique aux 
ennemis de la laïcité et aux islamistes. Cette attitude illustre, à elle 
seule, à quel point la gauche française est devenue faible, bête et 
incapable de défendre et d'incarner ce qu'elle est censée représenter. 
Dans cette faillite morale et politique de toute la gauche, sur des 
questions aussi essentielles que la laïcité, seul le courant de pensée 
qui se reconnaît dans le discours de Manuel Valls, arrive à tirer son 
épingle du jeu.

Pour répondre à votre question, je dirais que nous sommes en démocratie 
et chacun est libre de soutenir qui il veut et ce qu'il veut. Ce qu'il y 
a de formidable dans un espace démocratique, c'est que même les idées 
les plus dangereuses pour elles-mêmes ont le droit à l'expression. Je 
pense que le débat ne doit pas être situé au niveau du nombre de 
personnes ni de leur qualité ou de leur statut social qui apportent leur 
soutien à telle ou à telle démarche, car je rappelle que ce qui est 
reproché à Jean-Louis Bianco et à son collaborateur ne relève pas du 
simple conflit de personnes.

     Jean-Louis Bianco et son collaborateur ont passé plus de temps à 
critiquer et à fustiger les défenseurs de la laïcité que les vrais 
ennemis de cette valeur.

Le problème doit être résumé ainsi: voilà un homme, M. Bianco, qui, 
depuis son installation à la tête de cet observatoire, choisit d'être 
d'abord dans un total déni expliquant qu'il n'y avait aucun problème 
avec la laïcité alors que depuis plusieurs années, nous avons dans ce 
pays des pressions contre la mixité homme/femme, des groupes intégristes 
qui occupent l'espace public pour y accomplir la prière ou pour essayer 
d'imposer le voile islamiste et en faire un standard féminin musulman, 
alors que le débat n'est même pas tranché dans le monde musulman, d'un 
point de vue théologique. Ce déni les pousse à ne pas voir que des 
groupes islamistes tentent de fragiliser le cadre laïque. La seconde 
bizarrerie, c'est que Jean-Louis Bianco et son collaborateur ont passé 
plus de temps à critiquer et à fustiger les défenseurs de la laïcité que 
les vrais ennemis de cette valeur. Ils sont allés jusqu'à s'approprier 
cette novlangue imposée insidieusement par les islamistes qui tentent de 
faire passer des laïcs pour des racistes. C'est dire, cette facilité 
qu'ils ont à fustiger Elisabeth Badinter, une grande dame, féministe et 
républicaine, et à se montrer docile avec Tariq Ramadan, un intégriste 
notoire chantre de la pensée des frères musulmans. Pour enfin, signer un 
texte, a priori anodin, mais ô combien dangereux, qui, dès le 14 
novembre, dédouanait totalement l'islamisme, voire même l'État islamique.

     Ne pas désigner le totalitarisme qui a coûté la vie à 150 personnes 
durant l'année 2015, ce n'est rien d'autre qu'une nouvelle forme de 
négationnisme.

Il suffit de le relire pour s'apercevoir qu'à aucun moment le terrorisme 
n'est qualifié, comme s'il n'y avait aucune idéologie derrière cette 
violence. Et cela n'est pas un fait anodin, mais très grave. C'est la 
raison pour laquelle je demande le limogeage ou la démission de 
Jean-Louis Bianco: le président de l'observatoire de la laïcité a signé 
un texte qui dédouane l'islamisme et qui réduit le terrorisme du 13 
novembre en un simple fait divers, une simple criminalité. Ce qui étaye 
ce que j'avance c'est cette phrase: «…ce crime dont seuls les auteurs 
sont coupables…». Non! Derrière ce crime il y a une organisation 
terroriste qui s'appelle Daesh, une idéologie qui s'appelle le 
salafisme, une pensée qui s'appelle l'islamisme et en définitive, ce 
crime est l'illustration de ce que notre regretté Abdelwaheb Meddeb 
appelait «la maladie de l'islam». Ne pas désigner le totalitarisme qui a 
coûté la vie à 150 personnes durant l'année 2015, ce n'est rien d'autre 
qu'une nouvelle forme de négationnisme.

Pour finir, ce texte a été signé aux côté certes de quelques personnes 
respectables, mais trop naïves, avec des associations islamistes comme 
le CCIF ou des militants proches des Frères musulmans.

Quel est le bilan de Jean-Louis Bianco à la tête de cette institution?

Le bilan? Quel bilan? Je vais le résumer en une phrase: la laïcité n'a 
jamais été autant fragilisée. Et les islamistes n'ont jamais autant été 
légitimés.

L'observatoire de la laïcité est placé sous la responsabilité de Manuel 
Valls. Pourquoi ce dernier n'agit-il pas au-delà des déclarations 
d'intention?

Manuel Valls est, je le sais, très sensible à ces sujets depuis très 
longtemps. Mais je sais qu'au dessus de lui, il y a un Président de la 
République qui tente toujours de faire dans l'art de la synthèse et 
d'entretenir une certaine ambigüité. J'espère qu'il va mesurer les 
ravages que cette énième affaire est en train de causer. Pour l'instant, 
Bianco compte sur sa proximité avec Ségolène Royal pour s'imposer. S'il 
reste à son, poste, c'est que nous sommes chez la gauche des copains et 
des coquins, mais j'ai bon espoir de voir le Président se rendre compte 
de la nocivité, pour la laïcité, de Jean-Louis Bianco à la tête d'une 
institution censée «observer» la laïcité.

Le président de la ligue de l'enseignement, Jean-Michel Lecomte, 
soutient également Jean-Louis Bianco à travers une tribune intitulée: 
«Non, la laïcité ne peut pas être islamophobe». Une manière de répondre 
à Elisabeth Badinter qui a récemment déclaré: «Il ne faut pas avoir peur 
de se faire traiter d'islamophobe.» Que pensez-vous du concept 
d'islamophobie?

Je le répète depuis plusieurs années le concept d'islamophobie entretenu 
par les milieux islamistes et leurs alliés, vise à anesthésier le débat 
démocratique et à atrophier la réflexion. Ce chantage à l'islamophobie 
vise à interdire le blasphème, à bailloner ceux qui voudraient fustiger 
les intégristes, et à empêcher de défendre les grands principes de la 
République. Car au nom du relativisme culturel, on a voulu introduire 
l'idée qu'il serait malvenu de réclamer une égalité de traitement pour 
l'ensemble des citoyens en faisant fi de leur croyance ou de leur non 
croyance. Ceux-là même qui critiquent l'Église catholique vont vous 
qualifiez, y compris si vous êtes vous-même de culture ou de confession 
musulmane, «d'islamophobe» si vous critiquez le dogme islamique et même 
si vous critiquez le fanatisme qui s'exprime au nom de l'islam. C'est 
cette logique faite de bêtise, d'hypocrisie et d'ignorance qui a permis 
à l'extrême-droite de s'approprier ce débat en faisant croire qu'elle 
était la seule à défendre la «laïcité». Je vous dis que cette gauche là 
est ringarde et c'est elle qui remplit les rangs du Front national et à 
certains égards les rangs des islamistes.

     Je soutiens totalement Elisabeth Badinter qui a toujours été dans 
les grands combats.

Dans cette affaire, je soutiens totalement Elisabeth Badinter qui a 
toujours été dans les grands combats. Généralement, quand les lâches et 
les munichois regardent ailleurs, elle monte au front.

Ce débat révèle-t-il deux conceptions de la laïcité?

Il y a eu historiquement deux conceptions de la laïcité. Mais là, ce 
n'est pas de cela qu'il s'agit. Car si l'ancien débat opposait les 
«bouffeurs de curés» et les laïcs, celui-ci est différent car il oppose 
les alliés des islamistes et les laïcs.

Peut-on dire qu'il existe deux conceptions de la laïcité: une ouverte et 
une fermée?

Lorsqu'on veut vider la laïcité de sa substance, on lui rajoute un 
adjectif. C'est ce qu'avait tenté de faire Nicolas Sarkozy notamment. Je 
pense qu'au-delà de la laïcité, il convient, alors que nous sommes en 
guerre contre les terroristes islamistes, de répondre à quelques 
questions. C'est ce que j'ai fait tout en apportant les réponses qui me 
permettent, chaque jour, de me regarder dans une glace, même si les 
risques que je prends - et j'en suis conscient - sont énormes.

D'abord. Qui sommes-nous? Ou qui voulons-nous être? Une société 
démocratique, antiraciste, laïque, ouverte, croyant en l'altérité, 
défendant ses valeurs essentielles et les principes qui constituent son 
âme, consacrant la liberté, l'égalité et la fraternité dans le cadre de 
l'état de droit.

Ensuite. Qui est l'ennemi? En l'espèce tous les tenants de la haine, de 
l'homophobie, du racisme et de l'antisémitisme et singulièrement ceux 
qui sont abreuvés des pensées totalitaires, en premier lieu l'islamisme, 
qu'il soit d'inspiration wahhabite ou issu de la pensée des Frères 
musulmans, sans oublier les tenants de l'extrême-droite, même si ceux-ci 
s'attaquent aux valeurs universelles sans tuer les gens à coups de 
kalachnikov.

Enfin comment devons-nous agir? Fermement, toujours dans le cadre de 
l'état de droit, pour préserver ce que nous partageons en commun et pour 
éloigner tous ceux qui mettent en danger l'équilibre qui nous permet 
d'évoluer dans une société, qui n'est plus malheureusement apaisée, mais 
qui doit le redevenir. Et pour assurer cette paix civile, les religions 
doivent demeurer chez elles et les fanatismes religieux doivent être 
combattus sans relâche.

     Les islamistes veulent fragiliser les valeurs fondamentales de ce pays.

Comprenez une chose: les islamistes veulent fragiliser les valeurs 
fondamentales de ce pays. Nous devons les en empêcher coûte que coûte et 
éloigner tous ceux qui, par bêtise ou par ignorance, par calcul ou par 
cynisme, leur facilite les choses. Il est tout de même grave de 
constater que la laïcité est fragilisée de l'intérieur au moment ou 
Daesh, dans sa dernière publication, s'attaque justement à la laïcité.

François Hollande dit que nous sommes en guerre contre le terrorisme 
islamiste. Il a raison de le dire. Mais aux côtés de qui compte-t-il 
mener cette guerre idéologique contre l'islamisme? Aux côté de Bianco et 
de Cambadélis? Bon courage…

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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