[Infoligue] Réforme de l'Etat > Un rapport sénatorial sévère sur la RGPP dans les préfectures

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 21 Oct 09:22:53 CEST 2010


Réforme de l'Etat > Un rapport sénatorial sévère sur la RGPP dans les 
préfectures

Auteur : Hélène Lemesle
Publié par : http://www.localtis.info/
Le : 20 octobre 2010

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Ille-et-Vilaine, Puy-de-Dôme, Côtes-d'Armor, Seine-et-Marne, Creuse, 
Pas-de-Calais, Bouches-du-Rhône, Alpes-Maritimes... c'est à un véritable 
tour de France des préfectures que s'est livrée ces derniers mois la 
sénatrice Michèle André (PS, Puy-de-Dôme). Au total, la parlementaire a 
rencontré une centaine de personnes, du préfet au syndicaliste en 
passant par les secrétaires généraux, directeurs de service et chargés 
de mission. L'objectif de cette enquête ? Savoir comment est mise en 
oeuvre la révision générale des politiques publiques (RGPP) dans les 
préfectures et sous-préfectures. La parlementaire, qui suit toute 
l'année ces sujets en tant que rapporteur de la mission "administration 
générale et territoriale de l'Etat", a présenté le 13 octobre les 
conclusions de son travail devant la commission des finances du Sénat.
Or, ces conclusions sont pour le moins critiques. Extraits : "Le pari de 
la RGPP paraît en passe d'être perdu dans les préfectures. Ce pari 
consistait à compenser les réductions de postes par des efforts de 
productivité, via une organisation plus performante des services et un 
recours accru aux nouvelles technologies. En pratique, cette politique 
débouche aujourd'hui sur une dégradation des conditions de travail des 
agents, ainsi que sur la mise en péril de la qualité du service rendu à 
l'usager." La sénatrice demande donc "une pause dans la RGPP", 
c'est-à-dire de ne pas "réaliser les suppressions de postes prévues pour 
2011". Elle recommande également de faire porter désormais les efforts 
davantage sur les services centraux du ministère de l'Intérieur que sur 
les préfectures et sous-préfectures.

Economiser sept postes par département et par an

Dans le détail, le rapport a le mérite de revenir sur les origines et 
les objectifs de ces réformes. Ainsi, la RGPP s'inscrit dans un 
mouvement de long terme : les passeports biométriques étaient par 
exemple un projet engagé bien avant 2007. De même pour le ciblage du 
contrôle de légalité. Le rapport rappelle également les trois objectifs 
de la RGPP : améliorer la qualité du service rendu aux usagers 
(satisfaire 8 usagers sur 10), réduire les dépenses publiques (arriver 
sur la période 2008-2013 à 17 milliards d'euros d'économies) et 
"moderniser la fonction publique et valoriser des initiatives des 
agents". Dans les préfectures, les réformes portent sur trois domaines 
principaux : la délivrance des titres d'identité, le contrôle de 
légalité et la gestion des fonctions support.
29.000 agents travaillent actuellement en préfecture et sous-préfecture. 
Entre 2009 et 2011, 700 postes chaque année doivent être supprimés, soit 
en moyenne sept par département et par an. Ces suppressions visent à 
économiser autour de 120 millions d'euros. Le ministère de l'Intérieur 
espère faire des économies de personnel principalement grâce à la 
réorganisation des fonctions support (48% des postes), puis des titres 
d'identité (29%), et enfin du contrôle de légalité (22%). Le rapport 
revient également sur la nouvelle architecture de l'administration 
territoriale de l'Etat (création des directions départementales 
interministérielles) et le renforcement du rôle du préfet de région (sur 
ces sujets, voir nos articles ci-contre). Il souligne la nécessité de 
stabiliser les instances de concertation au niveau régional (comité de 
l'admnistration régionale - CAR - et pré-CAR).

"Des doutes sur les résultats de la RGPP"

La sénatrice passe ensuite en revue les principales réformes. Ainsi, si 
le passage au passeport biométrique est intervenu conformément aux 
engagements européens de la France, "il a induit dans un premier temps 
une dégradation des délais de délivrance, sans permettre de dégager les 
gains de productivité attendus". Sur le nouveau système 
d'immatriculation des véhicules, les immatriculations des véhicules 
neufs se font effectivement chez les garagistes et les concessionnaires, 
mais pour les véhicules d'occasion les particuliers continuent de se 
tourner vers les services préfectoraux. "Les gains de productivité [pour 
les préfectures, ndlr] sont donc limités sur ce secteur." De plus, "de 
graves dysfonctionnements du système informatique ont débouché sur une 
détérioration très nette du délai de traitement des dossiers". La 
sénatrice fait également état de pratiques de garagistes et 
concessionnaires qui font payer l'immatriculation. Elle s'interroge donc 
sur la logique "qui consiste, en définitive, à faire financer par 
l'usager et au profit d'acteurs privés, d'incertains gains de 
productivité dans la sphère publique" (p. 37). Concernant le contrôle de 
légalité (p. 39 à 42), la parlementaire rappelle les principales 
évolutions : rassemblement de l'activité en préfecture, maintien de la 
capacité d'appréciation du sous-préfet et ciblage sur les actes "les 
plus sensibles et à fort enjeu". Elle "s'interroge sur le rétrécissement 
du périmètre du contrôle" et s'inquiète de l'insécurité juridique qu'il 
pourrait occasionner.

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Jean Arthuis : "La vraie question, c'est notre vision des sous-préfectures"

Sur le réseau des sous-préfectures, Michèle André souhaite une évolution 
en douceur, "selon une méthode privilégiant le pragmatisme, le consensus 
et les réalités locales". Elle acte que "les fonctions d'accueil du 
public ont vocation à devenir marginales", le contrôle de légalité étant 
pour l'essentiel recentré en préfecture, "les sous-préfectures devront 
investir pleinement le champ des relations avec les collectivités 
territoriales".
Lors de la discussion qui a suivi la remise du rapport, Jean Arthuis 
(Union centriste, Mayenne) a souligné l'importance de ce point : "La 
vraie question, c'est notre vision des sous-préfectures. On n'y a pas 
répondu. Doit-on les maintenir ?" Une question laissée en suspens. Mais 
le président de la commission des finances du Sénat a indiqué que le 
"débat budgétaire pourra être l'occasion de demander au ministre si les 
préfectures sont appelées à disparaître pour devenir des 
sous-préfectures régionales".
A noter enfin que Michèle André a insisté à plusieurs reprises, tant 
dans son rapport que lors des échanges, sur "la motivation du personnel 
des préfectures", en dépit de leur sentiment "à tous les niveaux de la 
hiérarchie" que l'on "fait tourner un moteur sans huile" (p. 65). 
Préfets et secrétaires généraux "font le maximum" ; "les agents sont 
performants, et j'ai vu des syndicats motivés, même lorsqu'ils voient 
fondre leurs effectifs". D'où la demande de la sénatrice de faire "une 
pause dans le processus de suppression des effectifs au sein du 
programme 307 'administration territoriale'". Réponse des parlementaires 
dans quelques semaines lors du vote du budget 2011 de ce programme.

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Références : Sénat, rapport d'information fait au nom de la commission 
des finances sur la mise en oeuvre de la révision générale des 
politiques publiques dans les préfectures, Michèle André, 13 octobre 2010.

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Brice Hortefeux : "Pas de suppressions généralisées de sous-préfectures"

A l'occasion de l'inauguration de la nouvelle sous-préfecture de 
Saint-Malo, le 11 octobre dernier, le ministre de l'Intérieur a présenté 
sa politique en direction des préfectures et sous-préfectures. Après 
avoir salué "l'engagement et la motivation du corps préfectoral et des 
agents des préfectures et sous-préfectures", Brice Hortefeux a rappelé 
les principes d'une réforme "d'une ampleur inédite depuis trente ans". 
Les services de l'Etat doivent s'adapter à une "société qui change", 
"réduire les délais inhérents au travail administratif" et apporter 
"plus de conseil et d'appui aux élus, avec une vraie valeur ajoutée". 
Concernant les réductions d'effectifs, le ministre a annoncé 699 emplois 
en moins en 2011, mais "il s'agit de la dernière année à un tel niveau 
car j'ai obtenu dans le cadre du budget triennal, un infléchissement net 
des réductions d'emploi, compte tenu justement des efforts déjà 
réalisés". Pour aller plus loin dans la démarche de modernisation, il 
souhaite "pouvoir lancer la carte nationale d'identité électronique en 
2011, rendre possible l'inscription sur les listes électorales par 
internet et la dématérialisation du timbre fiscal".
Sur les sous-préfectures, il "n'y a en aucun cas de projet de 
suppressions généralisées de sous-préfectures", ce qui n'empêche pas des 
"ajustements possibles" en particulier "en zone urbaine où la densité 
des services publics est importante". "Dans les zones fragiles, qu'elles 
soient urbaines ou rurales, la présence de l'Etat sera réaffirmée mais 
sous des formes diverses." Cependant, dans tous les cas, il "faut passer 
d'une administration de guichet à une administration de projet" et faire 
des sous-préfectures "des administrations de mission tournées vers le 
développement des territoires et la sécurité des populations".

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Denis Lebioda
Chargé de mission 
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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