[Infoligue] Service civique, entre engagement et projet professionnel
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 24 Avr 09:33:53 CEST 2012
Service civique, entre engagement et projet professionnel
Compte-rendu de la conférence-débat du 29 mars 2012
Publié par : http://www.injep.fr/Service-civique-entre-engagement
Le : 23/04/12
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Quels sont les impacts du service civique sur les destins professionnels
des jeunes ? Comment mieux prendre en compte cette dimension dans les
parcours des volontaires en évitant les dérives de l’emploi déguisé et
en conservant l’esprit du dispositif : un don de soi au service des
autres ? Compte rendu.
L’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, le
Carrefour des associations parisiennes (CAP), ont organisé le 29 mars
2012, avec le concours de l’Agence du service civique, une
conférence-débat intitulée « Service civique, entre engagement et projet
professionnel ».
Il s’agissait de prolonger les questions évoquées dans le numéro des «
Cahiers de l’action », « L’expérience du service civil volontaire à
Unis-Cité : quels enseignements pour le service civique ? », sous
l’angle de la qualification et de la valorisation de l’expérience des
volontaires en service civique dans leurs parcours professionnels. Cette
conférence a été animée par Christian Cascio, directeur du Carrefour des
associations parisiennes (CAP), Valérie Becquet (maître de conférence en
sociologie, Université Cergy-Pontoise, EMA), Lionel Leycuras, secrétaire
général de l’Agence du Service civique, David Bévière, directeur de la
mission locale du Poitou et de Bastien Engelbach, chargé de mission à
Animafac.
S’appuyant sur une analyse de quatre années du service civique, menées
au sein de l’association Unis-Cité, et reposant sur les points de vue
des volontaires et des structures accueillantes, Valérie Becquet a mis
en évidence trois « traits saillants » dans la motivation des jeunes en
service civique :
* Une dimension altruiste, associée à l’idée d’engagement citoyen et de
responsabilité citoyenne ;
* une logique de parcours, associée à l’idée de changer ou
d’expérimenter une orientation professionnelle, de faire une parenthèse
dans une activité, ou de reprendre une activité, en particulier pour les
plus les précaires ;
* une logique de formation, au sens d’une première expérience
professionnelle ou « professionnalisante ».
Collectivités locales
L’approche des structures d’accueil varie, selon leur nature, estime par
ailleurs Valérie Becquet : « Plus la structure attend des compétences de
la part des jeunes, plus elle se situe du côté professionnel et de la
professionnalisation. En revanche, si son projet relève d’abord de la
mission d’intérêt général, c’est la dimension d’engagement qui va
s’avérer essentielle dans le choix des volontaires et dans celui des
profils recherchés ».
Valérie Becquet s’est ensuite attardée sur le « point de vue des
collectivités locales ». Depuis la loi de mars 2010 sur le service
civique, celles-ci s’engagent dans l’accueil des volontaires. En
fonction de leur approche, les collectivités vont « recruter » des
volontaires "qualifiés". Le service civique est un outils pour
développer une politique de jeunesse (engagement, accès à l’autonomie,
insertion sociale et professionnelle) et pour intervenir auprès des
jeunes en difficulté dans le cadre de la politique de la ville. Il
permet également de mener des actions en direction de publics
spécifiques (personnes handicapées, seniors, etc.). Dans les deux cas, «
on retrouve les logiques du double apport qui correspond au double usage
: le service civique permet le renforcement de l’envie ou le désir de
s’engager dans la société ; mais il permet aussi de reprendre une
formation, des études, d’entrer dans le marché du travail. C’est dire,
si le risque de basculement vers de l’emploi déguisé, avec le recours à
une demande de compétence forte du parcours au détriment de
l’engagement, est réel », a fait valoir Valérie Becquet.
Constat unanime
Citant une étude commandée par l’Agence du service civique, Lionel
Leycuras a dit partager le « constat unanime » que le service civique
peut être utile pour le parcours professionnel puisque « la majorité des
jeunes volontaire considère qu’il s’agit d’un outil utile à leur
parcours professionnel ». Néanmoins, il a rappelé que « ce n’est pas un
dispositif d’insertion professionnelle qui apprend un métier. Conçu pour
donner une meilleure image de la jeunesse auprès de la société française
qui commençait à en avoir peur, le Service civique est la manifestation
de ce don de soi dont les jeunes sont capables, dans une logique
altruiste ». Relevant que « des dispositions de la loi s’appliquent sur
la dimension de reconnaissance, notamment dans l’enseignement supérieur
», Lionel Leycuras a estimé également que le service civique « doit
aussi servir à participer à définir avec les jeunes à l’issue de sa
mission un projet professionnel ».
Insertion professionnelle
Le secrétaire général de l’Agence du service civique a mis en avant deux
cas de figure dans le profil des volontaires : « Des jeunes diplômés qui
veulent faire une pause et développer des qualités, des valeurs que leur
formation n’ont pas développées ; et d’autres jeunes en situation de
décrochage qui y trouvent la possibilité de reprendre confiance et de
gagner en autonomie. Cela induit un accompagnement spécifique à travers,
notamment un partenariat avec les missions locales ». Pressentant le
danger qu’« à trop appuyer sur la dimension d’insertion professionnelle
on aille sur de l’emploi déguisé », l’Agence du service civique s’est
engagée dans des actions d’accompagnement et de contrôle des missions
proposées aux jeunes : politiques d’agrément , modération des missions
publiées sur le site Internet du service civique, conception de guides,
formation des tuteurs, et au-delà, une « réflexion globale sur la notion
de projet d’accueil afin de mieux définir sur ce qu’on doit attendre
d’un volontaire ».
Un faux problème ?
De son côté, David Bévière a considéré le « soupçon récurrent
d’assimilation à l’emploi comme un faux problème », ajoutant : « Les
jeunes s’emparent de ce dispositif parce que pour une fois c’est un
dispositif dont ils peuvent faire ce qu’ils veulent, avec notamment la
possibilité pour eux de bifurquer très vite. L’enjeu c’est que les
missions interviennent fortement sur le champ de l’avenir des jeunes qui
n’est pratiquement pas investi par les structures d’accueil, à
l’exception des organismes importants. »
« Pour beaucoup, le fait d’exercer un métier qui a du sens est plus
important que la rémunération, estime quant à lui, Bastien Engelbach.
Notre génération est une génération pragmatique et utopique qui
construit sa vie autour de valeurs. Le point de départ c’est quand même
l’engagement, la volonté d’agir pour l’intérêt général, avec un temps
d’apprentissage parce qu’on y fait des choses qu’on ne ferait pas
ailleurs, avec également une compréhension des enjeux sociaux et des
ressorts de l’action publique. Pour certains c’est l’occasion de
redéfinir un projet. Pour d’autres, de changer radicalement de
direction. Pour tous, c’est la possibilité d’expérimenter et d’exercer
ce droit à l’erreur que l’on devrait pouvoir accorder à toute personne
en construction ».
Comme toute expérience forte, le service civique participe à une prise
de conscience des volontaires de leurs qualités, de leurs compétences
transversales et transférables, mais aussi des aspirations qu’ils vont
développer dans le cadre de leur engagement. C’est là incontestablement
l’une des forces de ce dispositif, selon David Bévière. « Si les jeunes
considèrent le service civique comme un lieu de révélation de
compétences tant mieux », a-t-il estimé invitant ses détracteurs à «
refaire le débat en situation de plein emploi ».
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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