[Infoligue] Equipements sportifs : le CNDS va-t-il tourner le dos au sport pour tous ?
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Lun 27 Oct 09:58:54 CET 2014
Equipements sportifs : le CNDS va-t-il tourner le dos au sport pour tous ?
Publié par : http://www.localtis.info
Le : vendredi 24 octobre 2014
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Le mode d'attribution des subventions du Centre national pour le
financement du sport (CNDS) pourrait être bientôt profondément remanié.
Cible privilégiée envisagée à l'avenir : les grands équipements
structurants, dans le cadre de politiques contractuelles entre l'Etat et
les collectivités. Un rôle de chef de file pourrait alors être dévolu
aux régions.
Décidément, le CNDS (Centre national pour le développement du sport)
n'en finit plus de faire parler de lui. Après l'annonce, lors de la
présentation du projet de loi de finances pour 2015, d'une baisse
significative des crédits sur le prochain triennal (-41 millions
d'euros), après la révélation d'une coupe conséquente dans l'enveloppe
réservée aux subventions d'équipements lors de la session d'automne (de
quelque 25 millions à 10 millions d'euros), voilà que c'est la formule
même de l'attribution de ces subventions qui devrait être profondément
remaniée.
Lors d'une réunion d'information tenue le 22 octobre en présence des
parties prenantes du CNDS (mouvement sportif et élus locaux), le
directeur des Sports a confirmé que l'effort budgétaire porterait à
l'avenir sur les crédits du centre, tandis que le budget du ministère
des Sports serait, lui, préservé. En conséquence, les subventions
d'équipements devraient se concentrer sur des équipements structurants,
dans l'optique notamment de l'organisation par la France de grandes
compétitions internationales, et devraient se faire sur la base de
politiques contractuelles. La "mise en sommeil" de l'enveloppe générale
est ainsi quasiment actée.
Une politique contractuelle, avec qui ?
Cette enveloppe générale qui, en 2013, a octroyé près de 70 millions
d'euros à 185 projets de construction ou de rénovation d’équipements
sportifs, était répartie par un comité de programmation. Or le mode de
fonctionnement du comité de programmation, qui examinait plusieurs
centaines de demandes de subventions par an, est jugé trop coûteux,
notamment parce qu'il sollicite les services déconcentrés du ministère
des Sports (DRCSJS) pour l'instruction des dossiers.
L'avenir serait donc à une politique contractuelle par laquelle l'Etat
lancerait des appels à projets correspondant à ses intérêts, partagés
avec le mouvement sportif et les élus. Une formule inédite pour les
équipements sportifs qui posent deux questions principales.
La première est celle du cocontractant. A qui l'Etat fera-t-il appel ?
On imagine mal qu'il contracte directement avec les communes, celles-là
même qui devraient désormais voir leurs projets pas assez structurants
écartés. Le premier niveau de collectivité qui vient à l'esprit est donc
la région, probable chef de file d'une compétence sport partagée.
Jacques Thouroude, président de l'Andes (Association nationale des élus
en charge du sport), ne voit pas d'un bon oeil un futur tandem
Etat-région à la manoeuvre dans le domaine des équipements sportifs :
"Les régions prendront demain un tel poids qu'il est à craindre que les
directions régionales Jeunesse et Sport n'aient plus aucune marge de
manœuvre, ce sera leur mort telles qu'on les connaît aujourd'hui. Ça ne
tiendra pas la route. Le CNDS est un lieu de concertation qui rassemble
tous les acteurs. Si on supprime le comité de programmation, il n'y aura
plus cette concertation."
Pour Pascal Bonnetain, président de la commission Sport de l'Association
des régions de France (ARF), il ne faut pas voir de menace de la part
des régions : "Le chef-de-filat, ce n'est pas être propriétaire de la
clause de compétence. Il y a des conférences régionales, comprenant
l'ensemble des collectivités et des acteurs du sport. Cela devrait
donner une belle feuille de route. La conférence régionale doit aboutir
à un schéma régional pour organiser la mise à niveau des équipements
existants. Je ne parle donc pas de responsabilité de la région, qui
s'applique à une collectivité, mais du territoire qui implique tout le
monde."
D'ailleurs, selon la physionomie finale que prendra la réforme des
collectivités, il n'est pas impossible que des acteurs différents soient
impliqués dans la nouvelle politique de contractualisation. L'éventuel
maintien de départements en zones rurales pourrait faire de ceux-ci
l'interlocuteur de l'Etat. Le cas des métropoles pourrait, pourquoi pas
?, déboucher sur un partenariat inédit. Les modalités de mise en œuvre,
assure-t-on, ne sont pas encore arrêtées. Elles feront prochainement
l'objet de directives qui seront soumises au conseil d'administration du
CNDS, le 19 novembre prochain.
Des équipements structurants dans des régions spécialisées ?
Deuxième question : les équipements structurants doivent-ils être une
priorité ? L'éventuelle candidature de Paris aux JO 2024 étant dans
toutes les têtes, l'Etat se demande de quels équipements ont besoin les
équipes nationales pour l'entraînement des athlètes de haut niveau, mais
aussi pour accueillir de grandes compétitions. "Il manque actuellement
des grands équipements dans certaines disciplines, plaide Denis
Masseglia, président du CNOSF (Comité national olympique et sportif
français). Les Pays-Bas ont dix-huit anneaux de vitesse sur glace, on
n'en a pas un seul. Et c'est parce qu'on a le vélodrome de
Saint-Quentin-en-Yvelines qu'on a obtenu l'organisation des Mondiaux de
cyclisme 2015."
Du côté des élus territoriaux, le son de cloche est différent. S'il
reconnaît le retard français dans certaines disciplines, plaide pour une
spécialisation des régions, car "on ne pourra pas faire du haut niveau
partout", et juge que des équipements structurants pour le territoire
peuvent être un atout pour une candidature à l'organisation d'un grand
événement, Pascal Bonnetain reconnaît toutefois que "les maires ont
aujourd'hui plus envie de rénover et de mettre à niveau leurs
établissements que d'en construire". Quant à Jacques Thouroude, il pense
que "mettre un nouveau coup de ciseau sur l'enveloppe équipements serait
une erreur pour le développement du sport dans notre pays".
De fait, la perspective de voir les subventions du CNDS s'orienter vers
des équipements structurants, qui plus est dans la perspective de
l'organisation de grandes compétitions, éloigne singulièrement du
premier objectif visé par l'article R. 411-2 du Code du sport qui
stipule que le CNDS contribue "au développement de la pratique du sport
par le plus grand nombre". "Le CNDS, rappelle Denis Masseglia, a été
conçu pour être au service du développement du sport. Si l'on comprend
que tout le monde doit faire un effort, il faut que celui-ci soit
partagé. Il ne faut pas qu'il y en ait un qui ait tout le temps raison,
fût-il l'Etat. Le mécontentement actuel n'est pas que celui du président
du CNOSF, il émane du terrain. Ce qui émane du terrain, c'est la
difficulté de cogestion. Le mouvement sportif a peur."
Mais ce n'est pas tout. Après les subventions d'équipements, la part
territoriale du CNDS (subventions aux associations locales) maintenue à
132 millions d'euros pour les trois ans à venir, pourrait à son tour
subir un toilettage complet. Pour abonder les crédits en faveur des
grands événements sportifs, comme cela semble être la volonté
gouvernementale, son niveau est sans doute appelé à diminuer après 2017.
Une prochaine enquête sur l'effet de levier de ces subventions, sur le
modèle de ce qu'a été le rapport Mauvilain pour les équipements (lire
ci-contre notre article du 31 juillet 2014), n'est pas à exclure…
Jean Damien Lesay
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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