[Infoligue] Service civique : pour un parcours de «citoyenneté»
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 6 Fév 09:34:24 CET 2015
Service civique : pour un parcours de «citoyenneté»
par François CHEREQUE (Président de l'Agence du service civique)
Publié par : http://www.liberation.fr/
Le : 4 février 2015
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TRIBUNE
Il est illusoire de penser qu’il suffirait d’un service civique
obligatoire pour faire de la jeunesse française un groupe homogène de
citoyens convaincus des valeurs de la République et désireux d’un vivre
ensemble harmonieux et respectueux !
C’est pourtant cela qu’un pays démocratique comme la France doit espérer
et transmettre à ses enfants, nés en France ou accueillis, de «souche»
ou issus de l’immigration. C’est aussi ce sentiment que nous avons
ressenti lors des manifestations du 11 janvier. Nous voulons retrouver
ce désir d’unité et de fierté collective et faire corps autour de ces
valeurs inscrites sur nos édifices publics.
Comment s’étonner qu’une partie de la jeunesse française ne se
reconnaisse plus dans ces valeurs alors que la plupart d’entre nous en
avaient oublié les vertus au point de douter de nous-mêmes. Nous voulons
que toute la jeunesse soit fière de la France alors que nous la
dénigrons tous les jours. Comment faire aimer la France alors qu’elle ne
s’aime plus elle-même.
Nous ne répondrons pas à cette question par des solutions miracles. La
reconstruction d’un destin collectif partagé, l’accès à la culture, la
défense de notre modèle social, la réduction des inégalités et le recul
du chômage sont évidemment des objectifs incontournables. Mais en tant
que président de l’Agence du service civique, je souhaite insister sur
ce que j’appelle le parcours citoyen de nos enfants, que nous pourrions
mettre en place pour être à la hauteur de ces enjeux.
En effet, nous assistons depuis quelques jours à un concours Lépine de
la recette miracle pour une jeunesse citoyenne et républicaine ! Les
deux propositions les plus débattues étant la restauration d’un service
militaire de quelques mois et la mise en place d’un service civique
républicain obligatoire, avec une partie qui semble elle aussi
curieusement «militarisée».
Ce débat est utile, sain et montre une prise de conscience salutaire, en
particulier de la part de parlementaires réticents pour donner les
moyens financiers à l’Agence que je préside, afin de répondre
positivement aux quelque 150 000 jeunes qui souhaitent faire un service
civique. 45 000 missions de service civique sont difficilement financées
pour 2015, et ils pensent pouvoir le faire spontanément chaque année
pour plus de… 750 000 jeunes !
Mais si cela n’était qu’une question d’argent, nous pourrions faire.
Comme le général de Gaulle le disait : «L’intendance suivra !»
Sortons de l’illusion qu’il suffirait de mettre ensemble les jeunes
Français pendant quelques mois, même pour mener collectivement des
actions d’intérêt général, pour qu’ils deviennent de bons citoyens. Ce
n’est pas d’une unique solution dont nous avons besoin, mais d’un
ensemble cohérent et coordonné que j’appellerai «un parcours citoyen».
Celui-ci commence à la naissance par l’éducation donnée par les parents,
qu’il ne faudrait pas occulter et que l’on peut accompagner en cas de
carences. Le travail social est là pour détecter les familles en rupture
et, éventuellement, la justice pour engager des actions d’aides ou de
substitution si celles-ci deviennent nécessaires.
Ensuite, il y a bien sûr l’école et son rôle fondamental, comme vient de
le rappeler la ministre qui en a la charge. Peut-on envisager également
que chaque collégien fasse une semaine de la citoyenneté dans une
association, auprès d’un élu, dans un syndicat, avec la police ou
l’armée, comme il y a une semaine de découverte de l’entreprise en
troisième ?
D’autres moments peuvent être utilisés dans ce parcours, comme la
fréquentation d’un club de sport, d’une école de musique, pendant les
activités périscolaires, tous ces moments où les jeunes sont ensemble et
réceptifs à un autre mode d’apprentissage et de transmission des valeurs.
Nous n’oublierons pas, bien sûr, la journée défense et citoyenneté, déjà
obligatoire, et qui pourrait très bien devenir deux ou trois journées
avec vraiment des moments de vie commune, de rappel des valeurs et des
règles essentielles de la République et du vivre ensemble. Et, à cette
occasion, pourquoi ne pas demander à chaque jeune s’il souhaite faire
son service civique en signant une demande d’engagement volontaire ? A
nous ensuite de lui trouver une mission qui corresponde à son souhait et
un organisme d’accueil, association, école, collectivité locale,
hôpital, maison de retraite, armée, police, caserne de pompiers…
Ce serait une forme de droit à l’engagement, rythmé par des moments
collectifs de rassemblement de volontaires issus d’horizons différents,
nourri d’une formation civique et citoyenne, valorisé par une
reconnaissance écrite et publique de cet engagement par des
représentants de l’Etat lors de cérémonies dédiées, ainsi que le font
déjà certains préfets ou dont prennent l’initiative certaines maires. Ce
serait alors un service civique vraiment universel, accessible à tout
jeune de 16 à 25 ans qui le voudrait.
Le service civique deviendrait alors incontournable pour une grande
majorité de filles et garçons, au bout d’un parcours de citoyenneté où
chaque composante de la société apporterait sa contribution, solidaire
et responsable, sans attendre les effets hypothétiques d’un engagement
obligatoire de chaque jeune de 18 ans pour devenir un bon citoyen.
Les jeunes Français sont dans leur immense majorité prêts à s’engager
pour l’intérêt général, ils sont respectueux des autres, friands d’un
vivre ensemble positif mais, comme le reste de la population, ils n’ont
que peu confiance dans l’action politique.
C’est aussi cette confiance qu’il faut restaurer et je ne pense pas que
ce soit par la contrainte que celle-ci surgisse par miracle, mais plutôt
en accompagnant la jeunesse française dans ce parcours citoyen et en
donnant la même chance à chacun de le réussir.
Pour cela, des décisions s’imposent. Décider des formes de valorisation
des différentes étapes de ce parcours, mais surtout des moyens que la
nation veut mettre à disposition de celui-ci et tout particulièrement au
financement de ce service civique universel. Il serait dangereux de
faire croire que l’on peut promettre ce type d’engagement à qui le veut
sans se donner les moyens d’y répondre. Promettre à tous les jeunes qui
le souhaitent de faire leur service civique et y attirer ceux qui en
seraient naturellement le plus éloignés, c’est aussi leur ouvrir les
portes des collectivités locales, des hôpitaux, des services publics et
ne pas demander aux associations de répondre seules à la demande alors
qu’aujourd’hui, elles accueillent déjà plus de 80% de ces jeunes
volontaires.
La citoyenneté ne se décrète pas, elle est le fruit d’une maturation
progressive, de moments et de rencontres. A nous d’être garants de ces
parcours.
François CHEREQUE (Président de l'Agence du service civique)
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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