[Infoligue] Nouvelles mesures pour l'école : le gouvernement mise plus que jamais sur la mixité

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 23 Jan 08:59:25 CET 2015


A noter : "Les projets éducatifs territoriaux (PEDT) auront désormais un 
volet "laïcité et citoyenneté". Et ce volet sera financé par un fonds 
d'État de 10 millions d'euros dédié, à destination des associations de 
jeunesse et d'éducation populaire."



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Nouvelles mesures pour l'école : le gouvernement mise plus que jamais 
sur la mixité

Publié par : http://www.localtis.info/
Le : jeudi 22 janvier 2015

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Najat Vallaud-Belkacem a présenté, le 22 janvier, un panorama de mesures 
dans le cadre de la "Grande Mobilisation de l'école pour les valeurs de 
la République" déclenchée après la vague d'attentats djihadistes en 
France. Ces mesures représentent un budget de 250 millions d'euros, sur 
3 ans, dont 10 millions d'euros destinés au volet "laïcité" des projets 
éducatifs territoriaux. Le Premier ministre a pour sa part annoncé un 
comité interministériel en mars destiné à renouveler les politiques 
publiques en faveur de la mixité. Et parle de "politiques de peuplement".

"Nous devons réarmer l'Etat. Accomplir une mobilisation sans précédent", 
a déclaré Manuel Valls avant la présentation par sa ministre de 
l'Education nationale d'un "plan Ecole" en faveur de la laïcité et des 
valeurs républicaines, de l'apprentissage de la citoyenneté et de la 
réduction des inégalités.

Un plan élaboré après dix jours d'échanges avec les organisations 
représentatives des personnels enseignants et non enseignants, les 
parents, les lycéens, les étudiants, les collectivités locales (voir 
notre article du 15 janvier), les anciens ministres de l'Education 
nationale, les associations d'éducation populaire, les acteurs de la 
lutte contre le racisme et l'antisémitisme, dans le cadre de la "Grande 
Mobilisation de l'école pour les valeurs de la République".

Un plan en 11 mesures qui représente un effort budgétaire estimé, sur 
les 3 prochaines années, à plus de 250 millions d'euros, dont 71 
millions d'euros sur 2015 financés par le ministère de l'Education 
nationale.

La "politique de peuplement" après l' "apartheid"

"Comment (dans les quartiers populaires) rendre nos politiques publiques 
plus visibles, plus concrètes, au bénéfice du plus grand nombre ?", a 
lancé le Premier ministre avant que Najat Vallaud-Belkacem n'expose son 
plan. Réponse : "début mars", avec la réunion d'un comité 
interministériel "consacré à la lutte contre les inégalités, au combat 
pour l'égalité dans ces quartiers". "Sur la base de ces réflexions et de 
ces propositions, nous prendrons les décisions qui s'imposent", a-t-il 
avancé.

Des décisions budgétaires. Mais aussi des décisions concernant la 
"politique du peuplement". "Pas seulement politique du logement et de 
l'habitat", a précisé Manuel Valls, mais aussi : "politique du 
peuplement pour lutter contre la ghettoïsation, la ségrégation. Egalité 
hommes-femmes, un sujet majeur. Lutte contre la radicalisation, que nous 
faisons dans d'autres domaines", a-t-il énuméré. Sans oublier : l' 
"emploi, bien sûr. Mobilisation aussi des parents, des familles, là où 
il n'y a souvent qu'un seul parent".
Nul doute que l'expression "politique de peuplement", que les élus et 
professionnels du logement utilisent pour désigner une politique de 
l'habitat en faveur de la mixité sociale (parfois ethnique, voire 
générationnelle), donnera lieu à commentaires. Evidemment que l'utiliser 
dans un discours grand public invite à polémique, surtout deux jours 
après le coup de l' "apartheid territorial, social, ethnique" (voir 
notre article ci-contre du 20 janvier 2015). Coup médiatique ou coup de 
poing sur la table pour susciter le débat ? Chacun jugera. Ce qui est 
sûr c'est que le gouvernement devra expliquer ce qu'il entend par une 
"politique de peuplement" qui ne passe pas par l'habitat.

Une politique de "peuplement des collèges" ?

Ce n'est pas directement du ressort de Najat Vallaud-Belkacem. Encore 
que, parmi les 11 mesures que la ministre de l'Education nationale a 
présentées ce 22 janvier, l'une d'entre elles évoque la mise en place 
d'une "politique active de mixité pour agir sur la composition des 
collèges" (1er volet de la mesure 8). De là à parler de "peuplement des 
collèges"…

A y regarder de près, il ne s'agit en rien d'une annonce mais de la mise 
en œuvre d'un décret paru cet été en application de la loi pour la 
Refondation de l'école et "relatif à la coopération entre les services 
de l'État et le conseil général en vue de favoriser la mixité sociale 
dans les collèges publics" (voir notre article du 22 juillet 2014 Carte 
scolaire calée sur un périmètre de transports urbains : un décret invite 
à passer des conventions). Décret qui a tout récemment donné lieu à une 
circulaire adressée le 7 janvier aux préfets (voir notre article Mixité 
sociale dans les collèges : une circulaire suggère un mode de 
concertation entre conseils généraux et rectorats du 9 janvier 2014). En 
résumé : depuis la loi Peillon du 8 juillet 2013, les collèges publics 
situés à l'intérieur d'un même périmètre de transports urbains peuvent, 
"lorsque cela favorise la mixité sociale", partager un même secteur de 
recrutement (article 20). Le décret et la circulaire posent les cadres 
de la coopération entre les services départementaux de l'Education 
nationale et les conseils généraux. Ils doivent, ensemble, réaliser un 
état des lieux 2015-2016 sur la "mixité sociale" des collèges publics et 
privés sous contrat, puis définir des objectifs en matière de mixité 
sociale au sein des collèges publics, à l'échelle du département, et à 
l'échelle de territoires infra-départementaux "identifiés comme 
pertinents". Dès lors, les directions des services départementaux de 
l'Éducation nationale (DSDEN) mettront en place une "procédure 
d'affectation des élèves permettant de renforcer la mixité sociale des 
établissements des nouveaux secteurs de recrutement".

Un partenariat "renouvelé" avec les collectivités locales

Mais parmi les 11mesures annoncées par Najat Vallaud-Belkacem ce 22 
janvier, c'est certainement la 5e qui attirera les collectivités. 
Intitulée "Mobiliser toutes les ressources des territoires", elle porte 
la promesse d'un "partenariat renouvelé avec les collectivités locales 
pour la réussite éducative des jeunes" et sera mis en œuvre en 
partenariat avec le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

Les projets éducatifs territoriaux (PEDT) auront désormais un volet 
"laïcité et citoyenneté". Et ce volet sera financé par un fonds d'État 
de 10 millions d'euros dédié, à destination des associations de jeunesse 
et d'éducation populaire.

Il y aura aussi un volet "laïcité et citoyenneté" dans les contrats de 
ville. Ces contrats devront également aborder la "prévention des 
ruptures sociales et scolaires", mais aussi l'accompagnement des 
parents, l'accompagnement des jeunes vers l'insertion et l'emploi. Les 
maisons des adolescents et les maisons de la justice et du droit devront 
être partenaires.

Le "plan Ecole" prévoit également, sans plus de précision, de 
"développer les programmes de réussite éducative qui ont montré leur 
efficacité dans le suivi et l'accompagnement individuel des jeunes, sur 
tout le territoire". Il s'agirait notamment de "favoriser la 
participation des acteurs de l'Education nationale" qui fait aujourd'hui 
défaut.

Un "cadre commun" pour la mise en oeuvre de la laïcité dans les services 
publics locaux

La ministre entend aussi "engager avec les élus la construction d'un 
cadre commun facilitant la mise en oeuvre du principe de laïcité dans 
les services publics locaux". Elle précise qu'il faudra le faire "avec 
vigilance pour que les intervenants auprès des enfants et des jeunes 
connaissent les principes de la laïcité et s'engagent à les transmettre 
et à les appliquer fermement".

Elle compte également encourager "les initiatives des collectivités 
territoriales" pour conduire à la création de nouvelles places 
d'internat, notamment au niveau du collège, dans le cadre de la 
politique des internats de la réussite et du programme d'investissement 
d'avenir (PIA). Un point qui serait également prioritaire pour 
l'enseignement agricole, dont la majorité des élèves sont internes.

Une "réserve citoyenne" d'appui aux écoles dans chaque académie

Toujours au registre de la mobilisation de "toutes les ressources" des 
territoires, Najat Vallaud-Belkacem annonce que les liens de l'Education 
nationale avec l'éducation populaire seront "renforcés". Un engagement 
d'autant plus utile que, comme on l'a vu, la ministre compte sur 
l'implication des associations d'éducation populaire dans les PEDT, et 
particulièrement pour le nouveau volet "laïcité".

Le contenu des conventions pluriannuelles d'objectifs des réseaux 
d'éducation populaire sera donc redéfini "au regard des enjeux actuels", 
avec le souci de parvenir à des engagements communs de tous les 
ministères concernés "dans un cadre stabilisé et durable". Une 
"simplification" et une "reconnaissance inédite de la part de l'État", 
insiste-t-elle. Elle compte sur "l'intervention de l'éducation populaire 
dans les territoires les plus fragiles" pour "porter et transmettre les 
valeurs de la République". Les liens avec les associations de lutte 
contre le racisme et l'antisémitisme seront également redéfinis "afin de 
renforcer la mise en œuvre de leurs actions éducatives et pédagogiques 
spécifiquement sur les problématiques du vivre-ensemble, de la lutte 
contre les préjugés, le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie".

Nouveauté : "une réserve citoyenne d'appui aux écoles et aux 
établissements, sur le modèle de la réserve citoyenne de la Défense" 
sera constituée "dès ce printemps" dans chaque académie, sous l'autorité 
des recteurs. Seront notamment sollicités pour y participer : "les 
personnes désireuses d'apporter leur concours aux missions de l'école, 
les bénévoles d'associations partenaires au plan local et les délégués 
départementaux de l'Education nationale (DDEN)".

Plus de moyens budgétaires pour la lutte contre le décrochage scolaire

La mesure 7 est entièrement dédiée à l'accélération de la mise en œuvre 
du plan de lutte contre le décrochage scolaire. Il est rappelé que les 
recteurs sont mobilisés pour décliner opérationnellement la "stratégie 
de lutte contre le décrochage". Il leur est demandé d' "être en première 
ligne" avec les autres services de l'État "et ceux de la région", pour 
mettre en oeuvre le "droit au retour en formation". Pour rappel, il 
s'agit de faire accéder à la qualification les 620.000 jeunes sortis du 
système scolaire, aujourd'hui ni en emploi ni en formation, et les 
140.000 jeunes qui chaque année quittent l'école sans qualification. 
"Les moyens budgétaires seront renforcés sans délai", a promis la ministre.

Par ailleurs, une campagne de communication sera mise en place en 
direction des jeunes bénéficiaires de ces nouvelles dispositions du 
droit au retour en formation.

Accompagner individuellement les enfants les plus fragiles

Parmi les 11 mesures, de-ci de-là, quelques-unes concernent de près les 
collectivités sans en avoir l'air.

Il est par exemple redit que, comme l'exige désormais la loi Peillon, 
"les espaces de parents seront développés dans chaque école et 
établissement (un point de la mesure 4).

Si on prend par exemple le renforcement de la prise en compte des 
enfants "en situation de pauvreté" (un point de la mesure 9), les 
collectivités liront avec plaisir que "l'Éducation nationale doit 
concilier une logique d'intervention collective à l'échelle des 
établissements scolaires et une capacité à accompagner individuellement 
les enfants les plus fragiles en lien avec les services de l'Aide 
sociale à l'enfance (du conseil général)". A cet effet, le financement 
des fonds sociaux sera porté à 45 millions d'euros (soit une 
augmentation de plus de 20%), a annoncé la ministre, rappelant au 
passage la "mobilisation accrue" en faveur de la scolarisation des 
enfants de moins de 3 ans, qui permet une socialisation précoce 
"d'autant plus profitable à l'enfant qu'il est fragile au plan social".
Les maires ayant un rôle de contrôle de l'obligation scolaire, ils 
seront intéressés de lire cet autre point noyé dans la mesure n°9 : 
"l'instruction à domicile fera l'objet d'un contrôle renforcé, 
impliquant des équipes pédagogiques en appui aux corps d'inspection 
effectuant actuellement les contrôles. À cette fin, des professeurs 
seront missionnés pour venir en appui aux corps d'inspection effectuant 
actuellement ces contrôles" (voir aussi notre article du 7 avril 2010, 
Lutte contre les sectes : comment faire respecter l'obligation scolaire ?)

Valérie Liquet avec l'AFP

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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