[Infoligue] Démocratie participative : du concret derrière l'effet de mode ?
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Lun 11 Mai 09:34:02 CEST 2015
Démocratie participative : du concret derrière l'effet de mode ?
Publié par : http://www.localtis.info
Le : jeudi 7 mai 2015
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Plus un projet d'aménagement sans que ne soit brandie la nécessité d'une
concertation citoyenne. Mais prend-elle vraiment ? Enrichit-elle le
projet mis en débat ? Et quels sont les retours des collectivités qui
font des efforts en la matière ? Le 5 mai, à l'occasion d'un colloque
organisé par le ministère de l'Ecologie à Paris, présenté comme un point
d'étape du vaste chantier de modernisation du dialogue environnemental,
des élus ont témoigné de la pertinence ou non de certains dispositifs
testés localement.
Où commence et se termine l'effort de concertation ? La question a été
posée le 5 mai, lors d'un colloque au Muséum national d'histoire
naturelle, où des ébauches de la réforme annoncée sur la démocratie
participative ont été timidement révélées. Pour Alain Richard, sénateur
socialiste du Val d'Oise et président de la commission du Conseil
national de la transition écologique (CNTE) spécialisée sur la
démocratie participative, c'est dès la planification, en amont d'un
projet ou programme, qu'elle doit débuter si elle veut enrichir la prise
de décision publique. Un vœu partagé par les associations
environnementales. Appliqué aux schémas régionaux - SRCAE (air-énergie)
et SRE (éolien) - cet effort est déjà valable et le Conseil d'Etat a
déjà rappelé, dans une décision prise l'an dernier, qu'avant qu'un tel
schéma soit arrêté par le préfet sa mise à la disposition au public doit
durer au minimum un mois. Les régions dans lesquelles ces schémas n'ont
pas encore été adoptés veilleront donc à ne pas négliger cette place à
accorder à la participation du public.
Mais le consulter, l'interroger, sans que puissent dialoguer les parties
prenantes, n'est pas concerter. Toute concertation réussie implique en
effet une forme d'ingénierie de projet. Et un travail approfondi du
maître d'ouvrage, ou avec lui quand il choisit de s'appuyer sur un
prestataire. "Concerter, animer des démarches participatives, cela ne
s'improvise pas, c'est un métier !", insiste Chantal Gaudichau,
directrice de l'association Graine (Poitou-Charentes). Des diplômes
universitaires en ce sens émergent, dont un en formation continue à La
Rochelle. "Ce n'est pas réservé aux étudiants ou professionnels, les
élus aussi ont besoin d'être formés", ajoute-t-elle. Au niveau local,
les outils rodés pour que cette concertation ne soit pas un pis-aller
existent : le rôle des chartes pour les maîtres d'ouvrage et des Agendas
21 pour les collectivités a été rappelé. Pas un mot ou presque, en
revanche, au sujet des "conférences de citoyens" un temps évoquées. En
vogue dans les pays nordiques, elles se comptent en France sur les
doigts d'une main. Le rapport de cette commission du CNTE sur la
démocratie participative, qui sera transmis d'ici la fin du mois à la
ministre de l'Ecologie, en touchera-t-il un mot ?
A Nantes, un cap franchi
Place aux retours d'expériences. Par exemple à Nantes, ce sont des
projets de franchissement de la Loire qui viennent d'être mis au débat.
Et ce dans le cadre d'un plus large débat lancé l'été dernier sur la
Loire et ses usages, qui se clôturera le 30 mai par un événement.
Cahiers d'acteurs, site dédié, les outils s'inspirent de ceux utilisés
par la Commission nationale du débat public (CNDP, dont l'idée
d'augmenter le budget a par ailleurs été soulevée). Cette concertation
nantaise s'appuie sur deux piliers : un comité citoyen d'une vingtaine
de participants et une journée de consultation qui en a réuni dix fois
plus. Les participants sont bénévoles mais nourris et indemnisés pour
leurs déplacements. "Pour en réunir autant, nous avons envoyé 2.000
courriers. Et veillé à une juste représentativité, tant en termes de
répartition entre habitants du centre-ville et de la périphérie, que de
parité, de tranche d'âge. D'autres critères ont aussi joué. Le but est
de ne rien perdre des propositions formulées. Un rapport issu de cet
exercice est attendu dans les prochains mois. Il s'adressera aux élus
mais aussi aux techniciens des collectivités, qui sont toujours
importants dans le système décisionnel", explique Philippe Audic, à la
tête du conseil de développement de Nantes. Quels sont les points de
crispation et les difficultés propres à ce type d'initiative ? "Les
habitants se demandent si ce qu'ils ont dit sera bel et bien pris en
compte. Il y a en outre des demandes d'open-data, de mise à disposition
d'études, auxquelles on a du mal à répondre", ajoute l'élu.
A Cergy, un nouvel outil
A Cergy (Val d'Oise), qui soumet à concertation jusqu'en novembre
prochain son plan local de déplacement, le choix a été fait du recours
régulier à un spécialiste. La ville lui délègue alors cette mission
d'animation, d'accompagnement jusqu'à la restitution de la concertation.
En l'occurrence à Res publica, bureau de conseil en stratégie et
ingénierie de la concertation, pour un tarif d'à peu près 60.000 euros
par prestation. Au même titre que Saint-Nazaire pour la révision de son
plan local d'urbanisme (PLU), Cergy soumet des sujets à mettre en débat
par Res publica, via une plateforme, un dispositif de débat en ligne
innovant, sorte de réseau social de concertation, baptisé J'enparle. En
parallèle à la création de plus classiques "conseils d'initiatives
locales" (participants sélectionnés sur tirage au sort), le but est de
desserrer la bride, d'attirer des participants contribuant de façon plus
spontanée. Ce que Jean-Paul Jeandon, maire de la ville, résume ainsi :
"Sur quatre mois et plusieurs thèmes de débats - sur les périscolaires,
la gestion des déchets, la vision qu'ont les habitants de leur quartier
-, cet outil a permis de toucher des personnes qui ne fréquentent pas
les réunions publiques. Des jeunes, des parents de jeunes enfants : dans
une ville où la moitié de la population a moins de trente ans c'est
important. Ces réunions d'ailleurs ne fonctionnent plus, il y a toujours
les mêmes opposants et arguments. On tourne en rond. Via cet outil c'est
plus riche, plus constructif. Même s'il faut tenir compte du phénomène
de fatigue participative, plusieurs mois sur un sujet, c'est peut-être
trop long."
Les projets de franchissement amont de la Garonne, en vue de relier
entre elles les villes de Bègles et Floirac, via un pont de 550 mètres,
ont aussi fait l'objet d'un exercice inédit de concertation, comme l'a
expliqué Bertrand Arnauld de Sartre, chef de projet Métropole de
Bordeaux. "Inédit par son ampleur, il a duré deux ans, concerné les
populations des deux rives et coûté 350.000 euros, essentiellement pour
rétribuer le modérateur-animateur et financer les études particulières
et contre-expertises".
Morgan Boëdec / Victoires Editions
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Alain Richard favorable à l'inscription de la démocratie participative
dans la loi
La concertation en amont des grands projets d'aménagement doit être
inscrite dans la loi, a suggéré le 5 mai le sénateur PS Alain Richard,
président de la commission chargée de faire des propositions sur la
démocratie participative. L'idée est d'"instaurer par la loi un
mécanisme qui organise une concertation en amont sur les projets, lors
de leur déclaration d'intention," a-t-il expliqué à l'AFP. Ce mécanisme
"s'appliquerait d'office pour l'élaboration des plans et programmes"
(les grands schémas nationaux et régionaux). Pour les grands projets
d'infrastructures (investissements supérieurs à 300 millions d'euros),
"là encore nous considérons que ce sont des projets à évolution lente"
et qu'ils doivent faire l'objet d'une concertation. Pour les autres,
"sur lesquels on doit faire attention à ne pas prolonger les délais
abusivement, nous disons que le maître d'ouvrage peut le faire de son
initiative; ou s'il ne le fait pas, on donne la possibilité à une
'initiative représentative' de demander à l'autorité 'une participation
amont'", a expliqué Alain Richard.
Les modalités d'application de cette initiative n'ont cependant pas
encore trouvé de compromis au sein de la commission, qui réunit experts,
élus, représentants d'ONG, syndicats et patronat. Ces principes devront
s'accompagner en même temps de mesures pour faciliter les démarches des
entreprises et porteurs de projets, a ajouté Alain Richard : système
d'autorisations uniques, possibilité de recours si le temps
d'instruction d'un projet soumis à l'administration se prolonge, etc.
Pour ce qui est de la possibilité de votes citoyens, évoquée par le
président François Hollande en novembre dernier après l'émotion suscitée
par la mort d'un opposant au barrage de Sivens, dans le Tarn, la
commission ne devrait pas se positionner sur le fond, mais
éventuellement proposer des recommandations pour encadrer ce processus,
a dit le sénateur. Les mesures retenues de nature législative seront
intégrées dans le projet de loi sur la biodiversité, qui sera en
discussion au Sénat en juillet, a indiqué Ségolène Royal lors du
colloque sur la "modernisation du dialogue environnemental". Source AFP
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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