[Infoligue] Dématérialisation - Les CCAS en première ligne pour aider des usagers désorientés

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 31 Jan 08:51:15 CET 2019



Dématérialisation - Les CCAS en première ligne pour aider des usagers 
désorientés

Publié par : https://www.banquedesterritoires.fr/
Le : 29 janvier 2019
Par : Lucas Boncourt pour Localtis

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La "marche forcée à la dématérialisation" provoque un afflux de demandes 
d’aides facultatives, déplore l'Union nationale des centres communaux ou 
intercommunaux d'action sociale (Unccas). Si le plan inclusion numérique 
marque une prise de conscience, le gouvernement est attendu sur les 
moyens alloués à ce qu’il convient de nommer une nouvelle forme de 
dépendance.


Les méfaits de la dématérialisation dénoncés par le récent rapport du 
Défenseur des droits sont tout sauf une surprise pour l’Union nationale 
des centres communaux d'action sociale (Unccas). "A chaque fois qu’un 
guichet administratif ferme, les CCAS constatent un afflux de personnes, 
dont beaucoup ne faisaient pas partie de leur public habituel",  relève 
Benoît Calmels, le délégué général de l'Unccas.
Une dématérialisation double peine

Un phénomène que l’association a quantifié dans une étude sur les aides 
facultatives des CCAS, à paraître en mars 2019. Celle-ci montre que  :

     89% des CCAS/CIAS remarquent un impact de la fermeture des guichets 
ou de la dématérialisation sur les sollicitations,
     77% estiment que la cause principale du non-recours serait la 
complexité des démarches,
     67% le manque d’informations,
     54% la dématérialisation.

"L’Etat a fait de la dématérialisation l’Alpha et l’Omega de sa 
politique de "simplification". Sa seule obsession est cependant la 
réalisation d’économies budgétaires. Or la dématérialisation n’est qu’un 
outil et génère aujourd’hui essentiellement de la complexité", déplore 
le directeur de l’Unccas. Et celui-ci de préciser qu’il n’est pas 
"hostile par principe à la dématérialisation" mais qu’elle implique que 
tout le monde ait accès au numérique, maîtrise l’informatique et soit en 
mesure de comprendre ce qu’on demande à l’usager... Or, aujourd’hui 
encore, la dématérialisation est dans la plupart des cas un 
copier-coller du formulaire papier qui utilise un vocabulaire 
incompréhensible pour de nombreux usagers. Un phénomène qui n’est 
cependant pas une fatalité, note Benoît Calmels : "L’exemple des impôts 
montre qu’avec la déclaration en ligne préremplie et la possibilité 
d’arrêter la formalité en cours de route pour la reprendre 
ultérieurement, on peut simplifier… à condition d’y mettre les moyens".

Les CCAS à la rescousse des usagers

A court terme, la dématérialisation provoque un afflux de demandes 
d’aides facultatives auprès des CCAS. "Certains usagers n’arrivent pas à 
réaliser la formalité tout simplement parce qu’ils n’ont pas 
d’ordinateur et de scanner pour joindre une pièce justificative. 
D’autres n’ont pas reçu le mail ou l’alerte SMS et voient l’aide qu’ils 
recevaient brutalement stoppée",  détaille Hélène Joseph, chargée de 
projets sociaux transversaux au CCAS d’Echirolles. Le CCAS se voit ainsi 
obligé de prendre le relais de l’administration défaillante, le temps 
que les droits de la personne soient rétablis. Une mission loin d’être 
évidente pour des agents qui se retrouvent face à des formalités ne 
relevant pas de la commune. Ils sont en outre de plus en plus 
fréquemment amenés à manipuler des informations personnelles, voire 
sensibles, hors de tout cadre juridique. Pour mieux prendre en compte 
ces nouvelles demandes, Echirolles a équipé tous ces centres sociaux de 
postes à disposition des usagers et met l’accent sur la formation des 
travailleurs sociaux. Réalisée par Emmaüs connect, celle-ci intègre en 
particulier la maîtrise des principaux portails administratifs (CAF, 
Pôle emploi, caisses de retraite…). Ouverte aux agents du CCAS, elle 
bénéficie aussi aux personnes intervenant dans les quartiers prioritaires.

Reconnaître une forme de dépendance numérique

Formation des agents en contact avec les usagers, dissociation des 
responsabilités entre aidants et aidés, simplification des formalités, 
maillage territorial… Autant d’éléments évoqués par le plan numérique 
inclusif actuellement promu auprès des territoires (lire ci-dessous). A 
Echirolles, la création de "France connect aidants" – pour dissocier la 
responsabilité de l’usager et de l’agent remplissant le formulaire – 
fait partie des pistes jugées "intéressantes". Du côté de l’Unccas, on 
estime qu’"une loi est attendue depuis des années sur ce sujet". 
L’association attend surtout le gouvernement sur la question des moyens. 
"La nécessité de mieux mailler le territoire est une évidence car la 
dématérialisation affecte plus particulièrement les zones rurales. 
Maintenant, il ne faudrait pas renouveler ce qu’on a vu avec les maisons 
de services au public (MSAP). Elles promettaient de simplifier l’accès à 
l’administration, or, dans les faits, on constate qu’elles ont surtout 
servi à justifier des fermetures de guichets de proximité. L’usager doit 
désormais faire des kilomètres pour réaliser des formalités qu’il 
pouvait réaliser dans sa commune". Enfin, au-delà du plan, les 
professionnels de l’action sociale appellent les politiques à ne pas se 
voiler la face. "La formation massive de la population est un leurre. 
Une part très significative de nos publics – illettrés, personnes âgées 
ou handicapées… - ne maîtrisera jamais le numérique. Il nous faut 
imaginer de nouveaux dispositifs et accepter de prendre en charge ce 
qu’il convient d’appeler une 'dépendance numérique'", conclut Hélène 
Joseph.

Des chartes locales pour lutter contre l’illectronisme

Le secrétaire d’Etat au numérique, Mounir Mahjoubi, fait actuellement la 
tournée des bons élèves de la lutte contre l’illectronisme, néologisme 
et traduction de "information-illiteracy", qui transpose le concept 
d’illettrisme dans le domaine de l’informatique. Les 
Pyrénées-Atlantiques, la Gironde, la Creuse, la Charente-Maritime, le 
syndicat des inforoutes (Drôme-Ardèche), la région 
Bourgogne-Franche-Comté, le Sicoval et les métropoles de Tours et 
d’Amiens ont ainsi signé une charte pour un numérique inclusif. Un 
document avant tout symbolique qui "reconnaît, appuie et soutient les 
actions mises en œuvre localement qui visent à identifier les publics 
fragiles, apporter un premier niveau d’aide numérique, développer des 
ateliers de formation et coordonner les acteurs de la médiation sociale 
et numérique". Des actions qui pourront bénéficier d’une prise en charge 
partielle via le dispositif de "pass numérique" que finalise le 
gouvernement. Un outil calqué sur le "pass culture" dont le financement 
reste cependant encore très hypothétique puisqu’il s’agit avant tout de 
mobiliser des financements privés… voire de collectivités.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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