[Laicite-info] Laicité > Edito du Monde : "Entorses"
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 15 Déc 14:10:49 CET 2009
Laicité > Edito du Monde : "Entorses"
Publié par : LE MONDE
Le : 14.12.09
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Signe de vitalité ou symptôme de malaise, il ne se passe pas une saison
sans que le monde de l'éducation s'enflamme. Au printemps, les
universitaires partaient en guerre, pendant des semaines, contre la
réforme de l'enseignement supérieur. Cet automne, ce sont tous les
historiens de France et de Navarre qui font chorus pour dénoncer la
suppression de l'enseignement obligatoire de l'histoire en classe de
terminale scientifique.
Pendant ce temps, l'enseignement privé s'apprête discrètement à allumer
quelques cierges pour fêter le cinquantenaire de la "loi Debré". Ce
texte entendait mettre un terme à la "guerre" de cent ans entre écoles
publiques et écoles confessionnelles. Globalement, l'armistice de 1959 a
tenu. Ecoles et lycées privés, catholiques pour l'essentiel, ont été
associés par contrat à l'Etat et investis d'une mission de service
public. Contrairement à ce que craignaient ses adversaires, la loi n'a
pas provoqué une inflation du nombre d'écoles privées et, s'ils ont
connu une croissance régulière au fil des décennies, leurs effectifs
plafonnent désormais, avec 2,1 millions d'élèves sur un total de 12,2
millions. Enfin, le choix de l'établissement scolaire n'est plus un acte
militant des familles, tant les allers et retours entre le public et le
privé se sont banalisés.
Pour autant, les braises menacent toujours de ranimer le feu. En 1984,
l'énorme manifestation des défenseurs du privé contre le projet de
"grand service public unifié et laïc" voulu par la gauche avait fait
reculer François Mitterrand. Dix ans plus tard, c'était au tour du
peuple de gauche de mettre en échec la réforme de la loi Falloux engagée
par François Bayrou, ministre de l'éducation du moment.
On comprend donc la prudence du gouvernement, qui avance à bas bruit sur
ce terrain. Au début de l'année, l'accord signé entre la France et le
Vatican reconnaissait les diplômes délivrés par les universités
catholiques et écornait le monopole de l'université publique en matière
de reconnaissance des titres universitaires. En septembre, la loi Carle
était adoptée : elle oblige un maire à participer aux coûts des études
des enfants de leur commune qui sont scolarisés ailleurs, y compris dans
le privé ; sur fond de suppression de la carte scolaire, cela risque
fort de "plomber" un peu plus les établissements publics les plus
déshérités. Aujourd'hui, ce sont cinquante-huit établissements privés du
supérieur qui vont pouvoir passer contrat avec l'Etat, nouvelles
subventions à la clé. Il reste que chacune de ces mesures "techniques"
constitue une entorse regrettable au service public de l'éducation.
Article paru dans l'édition du 15.12.09.
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Denis Lebioda
Ligue de l'enseignement - Chargé de mission Alpes du Sud
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