[Laicite-info] Saint Siège - République française : un accord anti-laïque sur la reconnaissance des diplômes

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mer 13 Mai 09:00:12 CEST 2009


Saint Siège - République française : un accord anti-laïque sur la 
reconnaissance des diplômes

Auetur : Charles Conte, chargé de mission laïcité à la Ligue de 
l’enseignement.
Publié par : 
http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/05/13052009Accueil.aspx
Le : 13/05/09

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Un accord signé entre la République française et le Saint Siège sur "la 
reconnaissance des grades et diplômes dans l'enseignement supérieur" 
remet en cause les principes laïques. De quoi s'agit-il ?



La situation actuelle

Les établissements d'enseignement supérieur privés sont régis par 
l'article L 731 du Code de l’Education. Il existe des instituts 
catholiques à Paris, Lille, Lyon, Toulouse et Angers (qui a essaimé à La 
Roche-sur-Yon en 1990). Contrairement à la loi (Article 4 de la Loi du 
18 mars 1880), ces instituts utilisent la dénomination "universités 
catholiques". Il existe également des facultés de théologie protestante 
à Paris, Montpellier, Vaux-sur-Seine et Aix-en-Provence. Par ailleurs, 
dans le cadre du droit local, les facultés de théologie protestante et 
de théologie catholique sont intégrées dans l'Université publique de 
Strasbourg.

Le 18 décembre 2008 un accord sur "la reconnaissance des grades et 
diplômes dans l'enseignement supérieur" a été signé par Bernard 
Kouchner, Ministre des affaires étrangères et européennes, et Dominique 
Mamberti, secrétaire au Saint Siège pour les relations avec les Etats. 
Un décret du 16 avril 2009 en porte publication. Cet accord pose une 
série de problèmes : il remet en cause la laïcité de la République ; il 
n'a pas été validé par le Parlement ; il met fin au monopole de la 
collation des grades. Il doit par ailleurs être examiné dans le cadre du 
processus de Bologne sur la reconnaissance mutuelle des diplômes en Europe.



Inadmissible pour trois motifs

La laïcité de la République est mise à l'épreuve dans son principe même 
de non reconnaissance des cultes affirmé dans la Loi de séparation des 
Eglises et de l'Etat de 1905. Celui-ci est décliné dans la laïcité de 
l'enseignement public selon le Titre IV du Code de l’Education. On voit 
mal comment la République française pourrait reconnaître la validité de 
"diplômes ecclésiastiques" portant sur des disciplines telles que la 
théologie ou le droit canonique. Les termes même de "diplômes 
ecclésiastiques" ravalant au rang de "matières profanes" toutes les 
autres disciplines.

De plus l’article 53 de notre Constitution est très clair : "Les traités 
de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs à 
l'organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l'Etat, 
ceux qui modifient des dispositions de nature législative, ceux qui sont 
relatifs à l'état des personnes, ceux qui comportent cession, échange ou 
adjonction de territoire, ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu'en 
vertu d'une loi". Un simple décret de publication, tel que celui du 16 
avril, ne saurait escamoter le passage impératif devant le Parlement. 
Les structures de consultations telles que le Haut conseil de 
l’Education, le Conseil supérieur de l’éducation ou le Conseil national 
de l’enseignement supérieur devraient également être mises à 
contribution. La Conférence des présidents d’université a d’ores et déjà 
explicitement condamné cet accord dans une lettre au président de la 
République.

Enfin, la Loi du 18 mars 1880 affirme dans son Article 1 : "Les examens 
et épreuves pratiques qui déterminent la collation des grades ne peuvent 
être subis que devant les facultés de l'État" et, dans son article 5, 
"Les titres ou grades universitaires ne peuvent être attribués qu'aux 
personnes qui les ont obtenus après les examens ou concours 
réglementaires subis devant les professeurs ou jurys de l'État".  Ce 
principe du monopole de la collation des grades est inscrit dans 
l'article 613-1 du Code de l’Education et a été réaffirmé par un avis du 
Conseil d'Etat en 1984. Or, selon l’accord en question, les titres et 
grades délivrés par les établissements privés supérieurs catholiques 
seraient reconnus par l'Etat. On peut se demander dans quelle mesure ces 
dispositions pourront être utilisées par les établissements catholiques 
de formation des maîtres pour éviter de se rattacher à une Université.



Pour protester et préparer l’avenir

Cet accord contrevient donc manifestement à plusieurs dispositions 
fondamentales du droit français. Il a suscité une levée de boucliers. 
Les organisations laïques ont émis de nombreuses protestations et 
préparent des recours auprès du Conseil d'Etat. Le "Comité 1905 du Var" 
a été le premier à le faire, en y associant une pétition sur son blog.

Toutefois la dénonciation légitime de cet accord doit s'accompagner 
d'une réflexion plus globale. En 1999 une conférence à Bologne (Italie), 
suivie d'une déclaration commune de 29 pays européens, a lancé le 
processus de Bologne visant à assurer la cohérence en Europe des 
systèmes universitaires nationaux. Ce processus s'est élargi à 
l'ensemble des 47 pays de l'Europe continentale. Il vise à créer un 
Espace européen de l’enseignement supérieur d’ici 2010. Le Saint Siège 
est partie prenante de ce processus. On ne saurait ignorer cette 
dimension, devenue fondamentale.

Charles Conte, chargé de mission laïcité à la Ligue de l’enseignement.

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