[Laicite-info] Taubira défend une laïcité ouverte : elle a raison. C'est un principe d'émancipation
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 3 Avr 09:26:02 CEST 2015
Taubira défend une laïcité ouverte : elle a raison. C'est un principe
d'émancipation
Publié par : http://leplus.nouvelobs.com/
Le : 02-04-2015
Par Mehdi Thomas Allal et Asif Arif - Militants anti-discriminations
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Menus de substitution, voile à l'université... La campagne des
départementales a généré de nombreux débats et polémiques au sujet de la
place de l'islam en France. Dans un entretien accordé à "L'Obs" cette
semaine, Christiane Taubira défend une vision ouverte de la laïcité. Un
rappel aux fondements de la loi de 1905 bienvenu, selon Mehdi Thomas
Allal et Asif Arif.
De nos jours, les amalgames vont bon train, les langues se délient. Les
personnes n’hésitent plus à dire ce qu’elles pensent. Elles ont bien
raison, donner et prendre la parole étant l’essence même de la
démocratie. Mais nous nous arrêtons ici sur un concept d’une importance
cruciale, qui est celui de la laïcité.
Aux lendemains de la victoire de l’UMP aux départementales, il est plus
que nécessaire de dresser un bilan de cette victoire qui, semble-t-elle,
s’est beaucoup reposée sur une vision agressive de cette laïcité.
Une vision dévoyée de la laïcité
Nous croyons fermement que les menus de substitution, le voile à
l’université et les autres débats qui touchent et affectent nos
concitoyens musulmans deviennent d’une bassesse telle qu’elle en est
nauséabonde.
Depuis cette campagne, on a appris à regarder en face une nouvelle
vitrine de la laïcité, celle de son instrumentalisation politique. À des
fins électorales, beaucoup sont prêts à tout.
La preuve en est que le parti des Radicaux de gauche, allié traditionnel
du PS, vient de proposer une loi entendant imposer la neutralité
religieuse dans les structures éducatives privées subventionnées par
l'État, qui accueillent des mineurs : un vaste univers fait de crèches,
mais aussi de centres de vacances et de mouvements de scoutisme…
Dans un colloque intitulé "laïcité et liberté de conscience : quelle
avenir pour la spécificité française ?", organisé par le Forum européen
interreligieux pour la liberté de religion, nous nous sommes rendus
compte à quel point la France a du mal à "exporter" son modèle en dehors
des frontières de l’Hexagone. Car cette spécificité française telle
qu’elle est "détournée", personne n’en veut !
Revenir à une approche plus progressiste
Dans l'interview qu'elle accorde à "L’Obs" cette semaine, la ministre de
la Justice Christiane Taubira affirme que la loi de 1905 n’est pas une
loi de "restriction" et elle a tout à fait raison.
Nous pensons effectivement que l’ancien président de la République
française, Nicolas Sarkozy, a engagé un processus d’instrumentalisation
de cette loi, dans lequel le Front national s’est lui aussi "engouffré".
Nous ne sommes toutefois pas dupes : toute la classe politique a
tendance à suivre. Pourtant, il existe bien une approche davantage
progressiste, développée par exemple par l’Observatoire de la laïcité
dirigé par Jean-Louis Bianco : il s'agit d'en revenir aux sources
juridiques et avoir une approche concrète et réaliste des textes.
Grâce à cette vision, il sera possible de promouvoir une conception de
la laïcité consensuelle, favorable à l’expression, mais également à la
coexistence, des cultes et des confessions.
Combattre les fausses idées reçues
Nous pensons également que la société civile dans son ensemble doit
faire preuve d’initiatives intéressantes, dans une approche ascendante,
pour combattre ces fausses idées reçues qui se distillent et qui minent
la cohésion : la rencontre lors d’un dîner avec une famille musulmane
portée par l’ahmadiyya en est une. Mais il faut qu’elles se multiplient
et que nous lancions davantage d’initiatives inclusives.
N’oublions pas que nous ne pouvons pas tourner le dos aux religions,
tout comme nous ne pouvons pas imposer d’interdiction générale et
absolue, sous peine d’être en contradiction avec plusieurs articles de
la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales.
Alors oui, nous sommes d’accords avec la ministre de la Justice :
"La loi de 1905 n'est pas une loi de restriction, c'est une loi
d'émancipation. Le défi qui nous est posé aujourd'hui est de rendre la
République capable d'offrir à chacun une appartenance collective
crédible et enthousiasmante pour dépasser nos identités individuelles et
singulières."
À nous de faire en sorte que cela se traduise en réalité concrète dans
notre société. Sinon, que laisserons-nous à nos enfants demain ?
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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