[Laicite-info] La laïcité est d’abord une liberté

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 11 Juin 10:59:40 CEST 2015


La laïcité est d’abord une liberté

Publié par : http://www.lab-afev.org
Le : 08 juin 2015
Par : Jean-Louis Bianco et Nicolas Cadène, respectivement président et 
rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité

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Le thème de la laïcité est régulièrement repris par la classe politique 
et les médias français. Mais il est régulièrement utilisé comme un 
concept « fourre-tout » pour définir des situations qui relèvent en 
réalité d’une multitude de champs, tels que les politiques publiques, la 
situation sociale, la lutte contre les discriminations, la sécurité 
publique ou la mixité sociale. Tous ces sujets ne sont pas directement 
liés à la laïcité. Mais la laïcité, pour garantir son effectivité, a 
besoin de la lutte contre toutes les inégalités et discriminations, 
qu’elles soient urbaines, sociales, scolaires, ethniques ou de genres.

C’est pourquoi il faut se méfier des fausses évidences et des solutions 
législatives qui « renforceraient », en apparence seulement, la laïcité. 
Celle-ci n’est pas un simple cadre administratif mais un principe 
constitutionnel. La loi du 9 décembre 1905 est ancienne mais a posé un 
cadre dont les limites restent intangibles : l’indépendance de l’État et 
sa neutralité, le respect de l’ordre public et de la liberté d’autrui.

C’est pourquoi, l’Observatoire de la laïcité s’est opposé à une nouvelle 
législation qui étendrait de façon excessive le principe de neutralité. 
Nous avons ainsi été très satisfaits des amendements apportés à la « loi 
Baby-Loup » qui se limite finalement à l’explicitation de la 
jurisprudence. Parce que le droit actuel, bien que méconnu, permet déjà 
d’encadrer le fait religieux (y compris les tenues vestimentaires) et 
d’interdire tout prosélytisme au sein d’une entreprise privée.

La laïcité, c’est la liberté de croire ou de ne pas croire et la 
possibilité d’exprimer ses convictions dans la limite de la liberté 
d’autrui. La laïcité, ce n’est pas une « tendance », c’est le cadre qui 
autorise toutes les convictions dans le respect de chacun. C’est la 
séparation entre les organisations religieuses et l’État pour assurer 
leur indépendance et parce que la loi religieuse ne saurait prévaloir 
sur la loi républicaine. C’est la garantie de l’impartialité de l’État 
et de l’égalité des droits et des devoirs pour tous, quelles que soient 
leurs convictions. Enfin, la laïcité, c’est la neutralité de l’État et 
du service public, ce n’est pas la neutralité d’une société où toutes 
les singularités seraient effacées.

Ce n’est pas au foulard qu’il faut s’attaquer, c’est aux racines du mal 
français : l’intégration inégale à la République selon sa condition, le 
manque de confiance dans les autres ; les discriminations sociales, 
ethniques, de genre ; les « ghettos », etc.

Faisons connaître et aimer la laïcité. Faisons-la respecter avec fermeté 
chaque fois qu’elle est attaquée ou mise en cause. Mais ne sombrons pas 
dans une laïcité répressive et stigmatisante, contre-productive et qui 
ne ferait qu’alimenter le discours victimaire et ainsi le radicalisme.

Mettons un terme aux « lois d’émotion » et appliquons déjà le droit 
existant. Les problèmes existent, mais ils se règlent d’abord par le 
dialogue et le bon sens, et si nécessaire par la sanction. Ne nous 
obsédons pas sur l’apparence, mais plutôt sur les comportements. Ce sont 
eux qui s’attaquent à la République en voulant imposer une supériorité 
de règles « religieuses » sur nos règles de vie commune.

La loi du 9 décembre 1905 a tranché le débat sur la liberté dans 
l’espace public. Charles Chabert et Émile Combes exigeaient déjà 
l’interdiction du port de tout vêtement religieux (soutanes ou voiles 
des religieuses) jusque dans la rue. Aristide Briand leur avait répondu 
fermement mais avec ironie : « Le silence du projet de loi [à ce sujet] 
n’a pas été le résultat d’une omission mais bien au contraire d’une 
délibération mûrement réfléchie. Il a paru que ce serait encourir, pour 
un résultat plus que problématique, le reproche d’intolérance et même 
s’exposer à un danger plus grave encore, le ridicule, que de vouloir par 
une loi qui se donne pour but d’instaurer dans ce pays un régime de 
liberté (…) imposer (…) l’obligation de modifier la coupe de ses 
vêtements. ». Et, à propos de la soutane, obsession de l’époque, il 
répondait : « La soutane une fois supprimée, M. Chabert peut être sûr 
que si l’Eglise devait y trouver son intérêt, l’ingéniosité combinée des 
prêtres et des tailleurs aurait tôt fait de créer un vêtement nouveau, 
qui ne serait plus une soutane. »

Après les crèches et les centres de loisirs, la tentation existe 
aujourd’hui en France d’interdire le foulard des mamans qui accompagnent 
les sorties scolaires, de l’interdire à l’université, pour les usagers 
du service public, dans l’entreprise, etc. En réalité, cela irait à 
l’opposé de la laïcité telle que l’ont défini les pères fondateurs. La 
laïcité, c’est la clé de la construction de la citoyenneté qui nous 
permet d’aller au-delà de nos différences, de les dépasser tout en les 
respectant et, même, en en faisant une richesse.

Jean-Louis Bianco et Nicolas Cadène, respectivement président et 
rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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