[Laicite-info] Laïcité, école et complexité...

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Lun 18 Jan 09:33:18 CET 2016


Laïcité, école et complexité...

Publié par : http://www.cafepedagogique.net/
Le : 18/01/16

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"L'institution scolaire est-elle encore à la hauteur de sa mission 
fondatrice, former le citoyen ?", se demande l'AFAE en éditorial du 
dernier numéro de sa revue Administration & Education (n°4 2015). Ce qui 
fait douter cette revue destinée aux cadres de l'Education nationale, 
c'est la question de la laïcité. La laïcité "à la française" est-elle 
l'exception ou la norme des pays démocratiques ? Est-elle compatible 
avec les religions ? Comment la transmettre dans la France d'aujourd'hui 
? Autant de questions auxquelles ce numéro, apporte des réponses variées 
et complexes. Les rapports entre laïcité , école et religions 
nourrissent des interrogations et des inquiétudes nécessaires pour 
l'avenir de l'école.

Il est rare que l'AFAE, longtemps association des administrateurs de 
l'Education nationale, exprime ainsi des doutes. Rédigé dans les 
semaines qui ont suivi les attentats de janvier 2015, avant ceux de 
novembre, ce numéro porte les interrogations des dirigeants d'une 
institution qui est interrogée dans ses fondements mêmes. Aussi ce 
numéro cherche à définir la "laïcité à la française en interrogeant ses 
fondements mais aussi en questionnant des experts et même en tentant une 
approche comparative.

Profs et élèves face à la laïcité..

De façon inattendue, on entre tout de suite dans la complexité avec deux 
tables rondes, une réunissant des élèves (surtout des lycéens) et 
l'autre des professeurs. Et le moindre qu'on puisse dire c'est que les 
visions sont clairement différentes. Les élèves mettent les pieds dans 
le plat. La charte de la laïcité ? "J'ai lu cela mais je me suis demandé 
si quelque chose existait vraiment" dit une lycéenne. Si tous sont 
d'accord sur le respect nécessaire au  vivre ensemble, la loi sur le 
voile est critiquée, la vision française définie comme au moins 
frileuse. Les élèves montrent les réticences au débat dans l'école : 
pour eux l'EMC ce sont des cours magistraux. Ils récusent aussi 
l'enseignement du fait religieux : "on n'apprend pas les valeurs que 
portent les religions".

Du coté des enseignants, on témoigne plutôt des difficultés à 
transmettre les valeurs de la République. Pas seulement parce que 
certains élèves portent des convictions religieuses puissantes. Mais 
aussi parce que les enseignants sont mal préparés : "il "être " aussi " 
dit une enseignante en LP. Et certains enseignants "ne sont pas 
forcément en accord" avec ces valeurs. Jean-Paul Delahaye aborde lui la 
question sous l'angle social : "c'est la pauvreté économqiue, sociale, 
culturelle de bon nombre d'élèves qui rend très difficile aux 
enseignants leur transmission de savoirs fondés sur la raison", note-il. 
"Quelle citoyenneté en partage pour les 5 millions de chômeurs et leurs 
enfants, pour les 1.2 million d'élèves.. qui vivent dans la grande 
pauvreté ?"

Qu'en est-il ailleurs en Europe ?

Alors la revue va interroger les référents traditionnels :M. Ozouf, Y 
Gaudemet, par exemple. Elle interroge même les religions catholique, 
juive, musulmane, pour savoir si elles sont compatibles avec la laïcité. 
Elle questionne les programmes et leur histoire. Parmi ces référents, 
Claude Thélot propose un recadrage de l'enseignement du fait religieux 
et appelle à une prise en compte de la spiritualité dans cet enseignement.

Mais peut-être que la partie la plus intéressante est l'approche 
comparatiste qu'ose ce numéro. Plusieurs articles montrent la 
singularité de la laïcité française. Non pas que la séparation de l'Etat 
et de l'Eglise ne soit pas la norme dans les pays développés. Etienne 
François , par exemple, montre très bien que l'Allemagne non seulement 
poursuit la même vision de la société avec un Etat qui garantit à tous 
l'exercice du culte et l'égalité mais aussi est parcourue des mêmes 
interrogations que la société française avec le recul des religions 
traditionnelles et la montée de l'islam. Mais tout ceci se produit dans 
un pays où le seul enseignement garanti par la constitution est 
l'enseignement de la religion. C. Leleux montre comment une décision 
européenne remet en question un enseignement de la religion qui était 
resté obligatoire dans la partie francophone et comment il va être 
remplacé par in cours de citoyenneté. JP Willaime montre à quel point 
l'enseignement du fait religieux est présent dans les pays européens 
sous une forme confessionnelle ou non confessionnelle, selon les états.

Les coordonnateurs (C Bisson Vaivre, A Boissinot, G Chaix et P Claus) se 
gardent bien de conclure. Mais ils ont ouvert assez de portes pour 
inviter à un élargissement de l'horizon laïc français. Le numéro montre 
la nécessité de passer enfin à un enseignement du fait religieux qui ne 
soit pas que historique, à un enseignement qui soit ouvert au débat, à 
repenser la laïcité comme une base éducatrice.

F Jarraud


 > Laïcité, école et religions, Revue Administration & Education, 2015 n°4.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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