[Infoligue] Les associations d'aide à la personne en état d'asphyxie financière

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 11 Fév 15:04:59 CET 2010


Les associations d'aide à la personne en état d'asphyxie financière

Publié par : LE MONDE
Le : 10.02.10 | 13h37

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Le secteur associatif de l'aide à domicile pour les personnes âgées et 
handicapées (300 000 salariés environ) va mal. Le 22 janvier, le Codapa, 
une importante association d'Eure-et-Loir, a été mis en liquidation, 
entraînant le licenciement de 250 auxiliaires de vie. Le 17 décembre 
2009, c'était l'UNA, premier réseau français de l'aide, des soins et des 
services à domicile (1 200 associations, soit 40 % des actes en 
direction des publics les plus fragiles), qui déposait son bilan.

Selon un communiqué du 22 décembre 2009, signé par l'ensemble des 
acteurs du secteur de l'aide à domicile - UNA, Aide à domicile en milieu 
rural (ADMR), Croix-Rouge, centres communaux d'actions sociale (CCAS), 
etc. -, une centaine d'associations frôlaient le dépôt de bilan en 2009, 
menaçant l'emploi de 10 000 salariées (aides à domicile et auxiliaires 
de vie). Pour 2010, indiquait le texte, "le nombre d'associations 
concernées pourrait atteindre 300 à 400".

Pour Thierry d'Aboville, secrétaire général de l'Union nationale ADMR, 
la raison principale est "la non-reconnaissance du coût de la 
prestation". En d'autres termes, les conseils généraux financent une 
heure d'aide ménagère entre 16 et 22 euros, une somme qui ne permet plus 
de payer les salaires d'un personnel aujourd'hui mieux formé qu'hier.

Ce refus d'augmenter les heures payées aux associations tient au 
vieillissement de la population. Les plus de 75 ans sont aujourd'hui 5,5 
millions (4,3 millions en 2000) et plus de 1,1 million sont éligibles à 
l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA) contre 828 000 en 2004. Du 
coup, les budgets sociaux des départements explosent : 6,1 milliards 
d'euros en 2008 pour les aides aux seules personnes âgées contre 1,7 
milliard en 2000. A sa manière très médiatique, Arnaud Montebourg, 
député et président (PS) du conseil général de Saône-et-Loire, en a tiré 
les conclusions : il a procédé à une augmentation spectaculaire des 
impôts locaux pour financer les dépenses en faveur des personnes âgées. 
"En 2004, l'APA se montait à 37 millions d'euros pour mon département, 
et l'Etat en finançait la moitié. Aujourd'hui, on dépense 57 millions et 
l'Etat n'en met que 20 millions. Je n'avais pas d'autre choix que 
d'augmenter les impôts", assure M. Montebourg.

DÉRÉGLEMENTATION

Ce malaise financier a été aggravé par la déréglementation engendrée, en 
2005, par le plan de Jean-Louis Borloo, alors ministre du travail et de 
la cohésion sociale, sur le développement des services à la personne. De 
grosses entreprises de services profitent ainsi largement des aides 
fiscales du gouvernement (réduction d'impôt pour l'utilisateur et TVA 
réduite pour les entreprises) pour développer une offre compétitive 
auprès des conseils généraux et de la Caisse nationale 
d'assurance-vieillesse (CNAV). Domidom services, créée en 2003, est de 
celles-là : 1 250 aides à domiciles en contrat à durée indéterminée 
oeuvrent sur une quarantaine de départements auprès des personnes âgées. 
Ménage, repassage, jardinage... "Nous prenons soin de leur formation et 
le volume des heures nous permet de réaliser des gains de productivité : 
la paie, la facturation, les ressources humaines... tout est 
centralisé", explique son gérant, Damien Cacaret.

Par comparaison, bon nombre d'associations n'ont ni la trésorerie ni la 
taille critique (400 aides à domicile minimum) qui permettrait au mieux 
d'équilibrer leurs comptes. Les grandes fédérations n'ont guère incité 
au regroupement de leurs adhérents et la question de la productivité n'a 
jamais été posée. Pour ajuster leurs comptes, elles ont en permanence 
tendu la main aux élus départementaux pour réclamer une hausse du prix 
de l'heure d'aide à domicile.

Les associations sont également concurrencées par le bas : les 
préfectures délivrent un agrément à des entreprises ou des associations 
qui cassent les prix sans toujours mettre à disposition des publics 
fragiles le personnel adapté à leurs besoins.

Pour sortir de l'épuisement financier, les acteurs du secteur demandent 
aux pouvoirs publics la création d'un fonds de secours de 50 à 100 
millions d'euros. Mais la demande n'en finit plus d'être examinée. Comme 
si le gouvernement n'était pas fâché de cette restructuration forcée. 
Une solution pourrait venir de la réforme du financement de la 
dépendance, promise par le gouvernement pour 2010. L'APA sera-t-elle 
réservée aux personnes démunies ? Les conseils généraux se 
financeront-ils en étant autorisés à récupérer les aides distribuées sur 
la succession des personnes âgées ?

Yves Mamou

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Deux formules en concurrence dans le monde associatif

Prestataire. Le secteur associatif est dit "prestataire" quand il 
demeure employeur et gère lui-même les aides à domicile qu'il met à la 
disposition des personnes âgées. C'est le prestataire qui définit les 
conditions de travail, les horaires, les compétences et les absences. 
L'utilisateur paie - cher - un service qui le débarrasse des tâches 
administratives : calcul des charges sociales, respect du droit du 
travail, etc.

Mandataire. La personne âgée a le statut juridique d'employeur du ou des 
salariés que l'association mandataire lui présente. C'est elle qui 
décide ou non de conserver un intervenant, convient des congés légaux et 
des périodes de formation. L'association fournit un service minimal de 
recrutement, un bulletin de paie et organise la formation. Le prix de 
revient est moins élevé pour l'utilisateur et le secteur mandataire 
s'équilibre mieux que le prestataire.



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Denis Lebioda
Chargé de mission 
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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