[Infoligue] « La liberté de s’associer » vue par Jean-Michel Ducomte
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 15 Nov 09:44:29 CET 2011
« La liberté de s’associer » vue par Jean-Michel Ducomte
Publié par : http://cpca.asso.fr
Le : Lundi 14 novembre 2011
*********************
A l'occasion de la publication de son ouvrage La liberté de s'associer
coécrit avec Jean-Marc Roirant, Jean-Michel Ducomte, président de la
Ligue de l'Enseignement, a accepté de nous accorder cet entretien.
Pourquoi avoir choisi d’écrire sur La liberté de s’associer?
Notre souci n’a pas été simplement d’apporter une nouvelle contribution
à l’étude de la liberté d’association. Nous pensons, dans le droit fil
de ce qu’a été l’engagement de la Ligue de l’Enseignement depuis ses
origines, qu’il ne peut y avoir de démocratie sans une construction et
donc une appropriation civique des enjeux du débat politique. Une telle
construction, une telle appropriation ne sont concevables qu’au travers
d’une organisation de la société civile, dont les associations
constituent la modalité la plus évidente. Derrière la liberté, ce qui
nous avons cherché à démontrer, c’est la nécessité, l’impérieuse
nécessité de s’associer. Jamais les ravages d’une individualisme réduit
à une cynique valorisation du chacun pour soit, n’ont été aussi
évidents. Rarement le désinvestissement de la puissance publique de ses
fonctions de solidarité n’a été aussi intense. La réponse politique à
cette désagrégation du lien social et du lien politique, à cette
entreprise de démontage de la res publica, ne peut être que collective
et organisée. Le choix de s’associer constitue un moyen de partir à la
redécouverte de cette « société de égaux », dont Pierre Rosenvallon
vient opportunément de rappeler que son abandon explique nombre des
impasses dans lesquelles se sont fourvoyées les politiques d’inspiration
libérale.
De façon moins conjoncturelle, nous souhaitions rappeler, en
interrogeant l’histoire, les fondements idéologiques et les pratiques,
que l’association constitue le symbole, en même temps qu’elle en est
l’actrice, d’une démocratie qui ne se limite pas à l’expression d’un
consentement, mais considère les citoyens comme capables de concevoir et
de construire ce qui leur advient, qu’elle s’est avérée un acteur majeur
du développement d’une économie sociale et solidaire.
Quelles raisons vous ont poussé à publier ce livre ?
Deux raisons cumulatives justifiaient la publication de cet ouvrage
aujourd’hui.
En 2016, la Ligue de l’Enseignement fêtera son cent cinquantième
anniversaire. Dans cette perspective, en partenariat avec les éditions
Privat, nous avons créée une collection, « Le comptoir des idées », au
sein de laquelle trouveront place des rééditions de grands textes autour
desquels s’est construite l’identité de la Ligue de l’Enseignement,
ainsi que des réflexions destinées à éclairer le présent et à nous aider
à préparer l’avenir. « La liberté de s’associer » constitue le premier
ouvrage de cette nouvelle collection.
En second lieu, le délitement du pacte social se manifeste avec une
intensité telle qu’il nous est apparu difficile de rester silencieux.
L’an dernier déjà, le Manifeste que notre Congrès de Toulouse a adopté –
« Faire société » – traduisait nos préoccupations et notre volonté de
remplir pleinement la fonction d’éducation populaire qui est notre.
L’accélération de la crise sociale nous a conduit à réitérer, sur un
mode différent, notre appel à l’engagement militant.
L’engagement militant aujourd’hui est-il différent ?
Oui le militantisme est devenu complexe. L’absence de projets d’avenir
clairement identifiables, la survalorisation de l’instant, les
interrogations qui s’expriment concernant l’aptitude des représentants
du peuple a assumer leur rôle, constituent autant de facteur de
fragilisation de l’engagement militant. Les partis politiques, les
syndicats subissent les conséquences d’un tel phénomène. Cela ne veut
pas dire que des revendications ne s’expriment pas, que des projets
communs ou des protestations communes ne voient pas le jour. Mais elles
sont animées d’une impatience – le plus souvent compréhensible – qui
pousse à réfléchir à des modalités nouvelles d’agrégation des
engagements. Ainsi le mouvement des « Indignés » qui de Madrid à Athènes
dit le refus des nouvelles générations d’être la variable d’adaptation
des médecines qu’impose l’abdication de la proposition politique devant
les dictats des marchés financiers. L’engagement, plus que jamais
s’inscrit dans une logique de miroir. Je milite parce que je suis
concerné et pas nécessairement parce que je suis convaincu. Toute la
difficulté est de faire se rejoindre logique de conviction et logique
d’implication.
La vitalité du monde associatif a rarement été aussi évidente. Les
motifs de s’associer sont sans cesse plus nombreux, induisant une
augmentation constante du nombre d’associations. Aux associations
disposant d’un périmètre local – les plus nombreuses – s’ajoutent des
regroupements associatifs, au poids économique conséquent. Le cadre
national ne constitue plus une limite. L’espace européen, la société
internationale, en s’organisant, ont suscité l’émerge d’une société
civile qui voit dans la forme associative le cadre le plus naturel de
son expression. Face à la capitulation des politiques publiques de
solidarité, il est fréquent que le monde associatif prenne le relais,
dépouillé de la vieille culture charitable qui le caractérisait jadis,
en acceptant de s’inscrire résolument dans une logique d’intérêt général.
--
-----------------------
Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
-----------------------
Nos sites :
http://www.laligue-alpesdusud.org
http://www.laligue-alpesdusud.org/associatifs_leblog
-----------------------
Plus d'informations sur la liste de diffusion Infoligue