[Infoligue] ASSO, premier syndicat du secteur, face à ses paradoxes
Denis Lebioda
denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Ven 28 Oct 09:19:38 CEST 2011
ASSO, premier syndicat du secteur, face à ses paradoxes
Publié par : LEMONDE
Le : 26.10.11
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Un droit du travail mal respecté, des relations employeurs-salariés
parfois compliquées, une gestion des ressources humaines souvent
insuffisante : le secteur associatif n'échappe pas aux difficultés
d'organisation du monde du travail. Pourtant, celles-ci restent souvent
peu visibles, les associations étant encore perçues comme
essentiellement liées au bénévolat et à l'engagement. Et le militantisme
propre au secteur rend les revendications des salariés difficiles.
C'est l'un des constats qui a présidé à la constitution, en avril 2010,
d'Action pour les salariés du secteur associatif (ASSO), le premier
syndicat du secteur, affilié à Solidaires. Cette création intervient
dans un secteur qui ne cesse de se professionnaliser : multiplié par
trois en trente ans, l'emploi associatif représente aujourd'hui 1,8
million de salariés. Structurer la parole des salariés "est également un
signe de la professionnalisation du secteur. La création d'un syndicat
affirme le fait que les salariés d'associations, tous secteurs
confondus, forment un groupe", remarque le sociologue Mathieu Hély,
auteur des Métamorphoses du monde associatif (PUF). Même si ASSO, qui a
tenu en octobre 2010 son premier congrès, ne rassemble pour l'heure
qu'une centaine d'adhérents.
Les fondateurs - essentiellement des salariés d'associations de
solidarité internationale et de défense des droits de l'homme - ont été
rejoints par des professionnels venus d'autres secteurs, comme
l'environnement, l'éducation populaire... Une liste à l'image de la
variété du monde associatif. "Notre syndicat se crée dans un milieu
professionnel très éclaté, c'est l'une des premières difficultés",
souligne David Eloy, secrétaire général d'ASSO. Certains problèmes
apparaissent toutefois de façon récurrente : conflits entre des salariés
- qui ont l'impression de ne pas être écoutés, alors qu'ils gèrent la
structure au quotidien - et le conseil d'administration, constitués de
bénévoles qui donnent du temps et ne comprennent pas les revendications
des salariés ; horaires extensibles et faiblesse des salaires ; cas de
harcèlement moral... Dans ces situations, les salariés sont encore
nombreux à ne pas savoir vers qui se tourner. Et le plus souvent, ils ne
disposent pas d'outils dans leurs structures pour se défendre.
"Nous sommes davantage sollicités par des personnes qui veulent mieux
connaître leurs droits que pour des conflits importants, constate David
Eloy. Quand on parle d'associations, beaucoup pensent aux grosses
structures, comme Médecins du monde ou le Secours catholique, mais la
majorité des associations comptent moins de dix salariés, et beaucoup
n'en ont qu'un, en particulier en région. Ces professionnels sont
particulièrement isolés." C'est pour les accompagner qu'ASSO s'apprête à
ouvrir, à Paris, une permanence juridique hebdomadaire.
Au manque d'information s'ajoutent les difficultés que rencontrent ces
salariés à trouver l'équilibre entre engagement et revendication. "Nous
sommes prisonniers de certains fonctionnements : dès lors que l'on aime
son association et que l'on donne beaucoup de soi, il devient difficile
de faire valoir ses droits. On accepte plus souvent des horaires
extensibles, des bas salaires, etc., explique Hélène, membre d'ASSO, qui
préfère - justement - garder l'anonymat. D'où une situation paradoxale :
nous passons notre temps à revendiquer pour la cause que nous défendons,
mais nous ressentons la plupart du temps de la culpabilité à demander
des choses pour nous-mêmes. Les salariés associatifs ont en général une
forte identification à leur structure, ou du moins à la cause défendue.
Or si l'on est engagé, si l'on partage une cause avec ses employeurs,
pourquoi se battre contre eux ? C'est un véritable frein à la défense
des droits."
Un paradoxe si fréquent que les initiateurs d'ASSO avaient un temps
envisagé de s'appeler le "collectif pour le syndrome de Stockholm".
Nombreux sont les salariés qui craignent que leurs demandes ne causent
du tort à l'association. Lors des réunions d'ASSO, certains n'ont
d'ailleurs pas voulu donner le nom de la structure avec laquelle ils
avaient eu des problèmes, même s'ils n'y travaillaient plus, de peur de
lui nuire.
"Nous connaissons les difficultés du secteur, mais il n'y a pas de
raison pour que la -pression ne pèse que sur les salariés, insiste David
Eloy. Au-delà de la défense des droits des salariés, nous voulons
participer à la réflexion sur l'avenir du secteur et la spécificité du
salarié associatif. Il faut que nous puissions porter avec les
employeurs un combat collectif auprès de la puissance publique."
Catherine Petillon
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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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