[Infoligue] Cour des comptes : un rapport pour quel modèle sportif ?

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 22 Jan 08:38:24 CET 2013


Cour des comptes : un rapport pour quel modèle sportif ?

par Patrick Bayeux
Publié par : Lettre d'information des Acteurs du Sport 389
Le : 22/01/2013

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Le rapport de la cour des comptes intitulé « Sport pour tous et sport de 
haut niveau : pour une réorientation de l'action de l'Etat » publié le 
17 janvier est sans concession. Finalement il n'y a aucun point positif 
à retenir de l'intervention de l'Etat dans le domaine du sport.

Le constat est dur mais juste selon V Fourneyron.


Des carences de pilotage

Pas d'évaluation, pas de compte satellite du sport, pas de mesure de 
l'impact de la pratique sportive sur la santé, sur l'employabilité, sur 
la cohésion sociale, indicateurs imparfaits. Saupoudrage , dissémination 
des subventions, manque de cohérence, manque de coordination des 
dispositifs, pas de coordination entre les ministères, utilité des 
subventions loin d'être prouvée,... A lire le rapport rien ne fonctionne 
dans la gouvernance du sport.

Aucun point positif

Qu'il s'agisse du CNDS dont le rapport pointe que « L'évaluation de 
l'efficacité de ces subventions est inévitablement très limitée, en 
raison du nombre élevé de versements et de bénéficiaires. Leur utilité 
est de ce fait même loin d'être prouvée ». Les subventions aux 
équipements ne sont pas mieux loties « la direction des sports et le 
centre national pour le développement du sport ne sont pas en mesure de 
démontrer l'existence ou non d'effets de levier des subventions du 
centre sur la construction d'équipement sportifs ».

Qu'il s'agisse du sport pour tous pourtant considéré comme le fondement 
de l'intervention de l'Etat avec le sport de haut niveau, dont le 
rapport souligne que qu' »il est essentiellement porté par les clubs et 
les fédérations » et est «
Fragilisé » en raison d'un mouvement sportif qui « ne rassemble 
finalement qu'une minorité des pratiquants, et ses effectifs licenciés 
comme ses dirigeants ne reflètent pas la diversité de la population 
française ». La politique de l'Etat en faveur du sport pour tous passant 
principalement selon la cour par le soutien aux fédérations.

Qu'il s'agisse du sport scolaire et universitaire « qui apparaît 
aujourd'hui en marge de la politique de développement du sport, 
notamment du fait de sa forte distanciation avec les fédérations 
sportives. » pire « Les objectifs de l'éducation physique et sportive, 
en tant que discipline d'enseignement, ne sont pas assortis d'indicateurs
permettant d'évaluer l'efficacité et l'efficience des moyens financiers 
accordés par l'État. »

Qu'il s'agisse du haut niveau dont la commission nationale n'a plus tenu 
de séance plénière depuis le 23 novembre 2007, dont le fameux double 
projet ne fait l'objet d'aucun dispositif national de suivi, dont le 
rapport considère qu'il faut donner plus de cohérence à l'utilisation 
des moyens consacrés, qu'il faut lutter contre le saupoudrage en 
resserranr les disciplines. Tout juste la cour concède que « Les 
résultats sur la scène internationale paraissent encourageants au regard 
des indicateurs reconnus, mais ils restent fragiles" mais enfonce le 
modèle en comparant le haut UK sport le modèle anglais doté de 100 M€ 
alors que la France dispose d'un budget prés de trois fois supérieur 
pour environ trois fois moins de médailles d'or.

Qu'il s'agisse des relations entre l'Etat et les fédérations dont le 
rapport souligne que « Ni le montant de ces subventions, ni le nombre de 
conseillers techniques sportifs placés auprès des fédérations ne 
semblent fondés sur des critères répondant à une stratégie claire ».


Qu'il s'agisse des conseillers sportifs dont « la position déroge à 
celles reconnues par le statut général de la fonction publique » qui « 
cumulent pour les mêmes fonctions une rémunération publique et une 
rémunération privée, sans que cette dernière soit encadrée, si bien que, 
lorsqu'il est particulièrement important, le complément de rémunération 
est susceptible de remettre en cause le lien de subordination 
hiérarchique entre l'État et l'agent ».

Au final rien ne trouve grâce aux yeux de la cour des comptes. On aurait 
aimé que la cour se penche aussi sur le système de formation (cf notre 
édito Formation aux métiers du sport : indignons nous ! ).

Un constat sans recul et sans mise en perspective.

Si on partage certains constats on est toutefois interrogatif par 
exemple sur l'affirmation de la cour quant à l'absence d'impact des 
subventions sur les équipements sportifs. Comment peut on d'un coté 
constater que la pratique sportive ne se limite pas aux seuls licenciés 
(et réclamer une analyse plus fine des pratiquants) et de l'autre 
mesurer l'impact des subventions sur les équipements aux seuls nombres 
de licenciés ?
Comment peut on également examiner le sport pour tous par le seul prisme 
de l'Etat. Certes il s'agit d'un parti pris mais très parcellaire.
On aurait aimé surtout une prise de recul historique par rapport au 
modèle sportif.
Nous considérons que notre modèle actuel est en fin de vie.

Le premier des années d'après guerre aux années 70 a permis au sport de 
se développer essentiellement sur une logique de compétition et 
d'éducation avec une forte intervention de l'Etat, du mouvement sportif 
et le soutien des communes.

Le second des années 70 à la fin de la première décennie du 21ème siècle 
les pratiques sportives se sont largement démocratisées, le nombre de 
licencié a été multiplié par 3. Au-delà du nombre de pratiquants, c'est 
toute l'organisation du sport en France qui a été modifiée. L'invention 
de nouvelles pratiques physiques et sportives, la libéralisation du 
paysage audiovisuel français et son corolaire la professionnalisation 
des sportifs et des structures ont été de nature à favoriser 
l'implantation d'acteurs privés dans ce qu'il convient d'appeler la 
gouvernance du sport. Les premières lois de décentralisation, le 
renforcement de l'intercommunalité ont facilité l'intervention des 
collectivités à tous les échelons. L'Etat a largement accompagné cette 
mutation.
C'est à la fin de ce modèle que nous assistons, et l'histoire retiendra 
que le rapport de la cour des comptes a signifié son arrêt de mort 
précipité par l'obligation de réduire la dette publique !

Dans ce contexte les propositions de la cour pourraient paraître 
anecdotiques tellement le rapport remet en cause le modèle et ne propose 
pas une vision complète d'une nouvelle gouvernance.

La question est bien là :
- faut il améliorer le modèle comme le suggère la cour qui propose de 
réformer le CNDS, positionner l'INSEP comme pivot opérationnel du Haut 
niveau et responsabiliser les fédérations sportives pour qu'elle gagnent 
en autonomie
- ou faut-il réfléchir à un autre modèle, le troisième qui ne peut 
s'envisager qu'avec tous les autres acteurs du sport et à tous les 
niveaux de son organisation. Dommage que la cour ne se soit pas inscrite 
dans cette perspective.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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