[Infoligue] Il faut réformer les rythmes scolaires

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 12 Mar 17:03:52 CET 2013


/Une tribune cosignée par Jean-Marc Roirant, secrétaire général de la 
Ligue de l'enseignement/


Il faut réformer les rythmes scolaires

Publié par : LE MONDE
Le : 12.03.2013

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Un débat public intense entoure actuellement la réforme des rythmes 
scolaires. Rappelons-le, cette réforme vise à faire de nouveau 
bénéficier nos écoliers d'une semaine de quatre jours et demi de travail 
scolaire, situation qui prévalait avant la réforme Darcos de 2008. En 
ajoutant une demi-journée de classe, elle permet d'alléger les quatre 
longues journées scolaires, inefficaces en termes d'apprentissage, tout 
en continuant à accueillir les écoliers jusqu'à 16 h 30 dans le cadre 
d'études surveillées et d'activités périscolaires, ces dernières étant 
organisées par les municipalités.

Mais alors que, aujourd'hui, la réforme est débattue, ce n'est plus 
l'intérêt de l'enfant qui est au coeur des échanges publics. Le débat se 
centre désormais sur les nouvelles contraintes qui s'imposeront aux 
adultes (les enseignants doivent-ils travailler une demi-journée 
supplémentaire, comme avant 2008 ?), ou des réflexions 
organisationnelles (la demi-journée supplémentaire doit-elle s'organiser 
le mercredi ou le samedi ?).

Pourquoi la réforme des rythmes scolaires entraîne-t-elle un débat si 
confus et de telles résistances récurrentes, alors même que lors de la 
concertation autour de l'école qui s'est tenue à l'été 2012, tous les 
professionnels et partenaires de l'école - les syndicats des 
enseignants, les fédérations de parents d'élèves, les représentants des 
associations de collectivités territoriales, les chercheurs, les 
représentants du secteur touristique - se sont accordés pour juger cette 
réforme à la fois pertinente et nécessaire.

NOUVEAUX COÛTS

Elle touche à la vie quotidienne des professionnels de l'école. Elle 
aura pour conséquence majeure de modifier l'emploi du temps des 
enseignants en rajoutant une demi-journée de cours qu'ils ne 
dispensaient plus depuis la réforme Darcos de 2008. La réforme est aussi 
remise en question par des municipalités ou conseils généraux qui y 
voient de nouveaux coûts, dans une période de contrainte budgétaire.

Elle bouleverse également les représentations sociales et les valeurs 
des professionnels de l'école. Elle donne la possibilité aux 
municipalités de développer de nouvelles activités périscolaires durant 
ce qui est vécu par les enseignants comme le temps scolaire historique, 
le sacro-saint "8 h 30 - 16 h 30". Faire passer la réforme, c'est 
changer ces représentations, une tâche plus ardue que tout changement 
d'organisation scolaire.

Enfin, elle implique que dans chaque municipalité se construise un 
projet et donc un consensus engageant un grand nombre d'acteurs porteurs 
de cultures et d'identités professionnelles différentes : éducation 
nationale, municipalités, conseils généraux si des transports scolaires 
sont impliqués, associations oeuvrant dans l'éducatif, établissements 
publics chargés d'infrastructures... Elle est aussi ardue parce qu'elle 
concerne l'enseignement primaire, dont la gestion est atomisée entre des 
milliers de municipalités.

Le gouvernement précédent avait bien compris la difficulté. Luc Chatel, 
après avoir réuni une commission sur les rythmes scolaires en 2010 dont 
les préconisations étaient similaires à celles de la réforme aujourd'hui 
engagée, avait préféré en différer l'application. L'amorce du débat sur 
le sujet dès le quinquennat précédent démontre que cette réforme dépasse 
largement le clivage droite-gauche, car elle implique très 
fondamentalement l'intérêt des enfants les plus jeunes.

Faut-il renoncer devant tant de difficultés ? Non, car il s'agit d'une 
réforme cruciale qui, de plus, conditionne l'efficacité des autres 
politiques prévues dans l'enseignement primaire.

L'EXCEPTION FRANÇAISE

Elle vise, avant tout, à redonner à chaque écolier sa pleine capacité 
d'apprentissage, en répartissant plus harmonieusement les heures 
d'enseignement strictement scolaire sur un nombre plus important de 
jours. Aujourd'hui, avec une semaine scolaire de quatre jours travaillés 
seulement, alors que la norme en Europe est à la semaine d'au moins 4 
jours et demie, avec 144 jours d'école par an contre 180 en moyenne dans 
les 34 pays membres de l'Organisation de coopération et de développement 
économiques (OCDE), la France est une exception sur la scène 
internationale par le faible nombre de jours dont bénéficient nos écoliers.

Par ailleurs, les chercheurs chrono-biologistes ont démontré qu'une 
semaine d'apprentissage sans la rupture constituée par un jour non 
travaillé respecte le rythme biologique de l'enfant. L'argument 
aujourd'hui avancé selon lequel les enfants se reposeraient le mercredi 
est non fondé scientifiquement, cette journée sans école dérègle leur 
horloge biologique. Grâce à ce changement dans le temps scolaire, 
l'écolier bénéficiera aussi soit d'un accompagnement au travail 
scolaire, soit d'activités périscolaires.

La réforme est particulièrement importante pour les enfants issus de 
milieux défavorisés, qui bénéficient d'un faible encadrement du travail 
scolaire à la maison. Certes, animer ces activités a un coût, c'est 
pourquoi le ministère a créé un fonds d'amorçage avec une aide 
financière différente selon la richesse des municipalités. Une 
évaluation régulière de la réforme est nécessaire pour s'assurer que la 
qualité de ce nouveau service éducatif ne diverge pas selon les 
territoires, une mutualisation entre collectivités locales des 
savoir-faire en matière d'activités périscolaires également.

Enfin, la réforme est aussi cruciale car elle conditionne l'efficacité 
d'autres réformes en cours. Bénéficier d'un jeune maître bien formé, de 
nouvelles pédagogies dans le cadre du dispositif "Plus de maîtres que de 
classes" qui permet la co-intervention de deux professeurs, d'un accès à 
l'école maternelle dès 2 ans, trouvent leur efficacité si l'élève est 
disponible intellectuellement pour les apprentissages. Il s'agit donc 
d'une réforme à la fois centrale mais urgente. Chaque année passée sans 
réforme conduit nos écoliers à perdre une part non négligeable des 
heures utiles pour leurs apprentissages. Faut-il continuer à en différer 
la décision ?

Collectif

Parmi les cosignataires de ce texte

Christian Forestier, copilote du dispositif de concertation autour de 
l'école et coprésident du comité de pilotage de la Conférence nationale 
sur les rythmes scolaires ; Nathalie Mons, sociologue et copilote du 
dispositif de concertation autour de l'école ; Jean-Marc Roirant, 
secrétaire général de la Ligue de l'enseignement ; Odile Quintin, 
coprésidente du Comité de pilotage de la Conférence nationale sur les 
srythmes scolaires ; Dominique Schnapper, directrice d'études à l'EHESS 
; ...

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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