[Laicite-info] Laïcité et duplicité

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Mar 22 Jan 08:54:39 CET 2013


Laïcité et duplicité

Publié par : 
http://blogs.mediapart.fr/blog/lucas-martin/210113/laicite-et-duplicite
Le : 21 janvier 2013
Par : Lucas Martin

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Dans un article récemment publié dans le journal Libération, l'écrivain 
et philosophe Henri Pena-Ruiz déplore le « triste sort (de) la laïcité » 
en France. Selon l'écrivain, celle-ci est sans cesse bafouée, en 
particulier dans le domaine scolaire. Il en veut pour preuve la « hargne 
» de Eric de Labarre – secrétaire général de l'enseignement catholique – 
qui « tente d'enrôler les élèves de ces écoles dans des débats sur le 
mariage pour tous. » Henri Pena-Ruiz dénonce le « prosélytisme » caché 
et « l'hypocrisie » de Eric de Labarre. Selon le philosophe, la faute en 
revient à la loi Debré.

Cette loi du 31 décembre 1959 reconnaît un « caractère propre » aux 
écoles privées en ce qui concerne leur orientation religieuse. Selon 
Henri Pena-Ruiz, npous sommes en présence ni plus ni moins d'un « 
prosélytisme financé sur fonds publics. » La conclusion est claire et 
sans appel : la loi Debré est « antilaïque. » À la lecture de cet 
article, je suis étonné d'autant d'imprécisions et de contre-vérités de 
la part d'un ancien membre de la Commission Stasi.

Monsieur Pena-Ruiz est un ardent partisan de l'école publique et laïque. 
Selon lui, cette école possède un avantage immense : elle est « ouverte 
à tous. » Ceci est inexact ; l'école publique française interdit son 
accès aux élèves juifs (à cause du port de la kippa) et musulmanes (à 
cause du port du voile). Pour ces élèves, le signe d'appartenance 
religieuse – que la loi interdit – qu'ils portent sur eux ne peut pas 
être enlevé sans transgresser leur croyance. Ainsi, l'école publique 
française pêche par une sorte de prosélytisme laïque (ou selon certains 
: une catholaïcité). Pourtant, cette attitude ne semble pas déranger 
monsieur Pena-Ruiz.

Monsieur Pena-Ruiz regrette qu'à une époque où l'école publique « 
souffre d'un manque de moyens », l'État finance les écoles privées. 
Pourtant, l'immense majorité du budget consacré à l'enseignement privé, 
resterait une charge pour l'État, même si celui-ci décidait d'y mettre 
fin du jour au lendemain. De fait, il existe près de 900 000 élèves qui 
étudient dans le privé. Imaginons que la totalité de ces élèves 
rejoignent l'enseignement public : l'État aurait immédiatement besoin 
d'augmenter la capacité d'accueil des locaux dans lesquels se tient 
l'enseignement. Dans ce cas, où se trouverait l'économie pour les 
finances publiques ?

Monsieur Pena-Ruiz se bat au nom de la justice. Que se passerait-il, 
selon lui, « si les libres penseurs demandaient de l'argent public pour 
financer des école privées » ? Dans ce cas, les « contribuables croyants 
se sentiraient trompés. » Pourtant, c'est exactement ce qui se passe 
aujourd'hui. Les contribuables français – croyants ou athées – financent 
l'enseignement public (laïc) grâce aux impôts qu'ils paient. À ma 
connaissance, les contribuables croyants ne crient pas à l'injustice. 
Monsieur Pena-Ruiz possède-t-il d'autres informations ?

Enfin, le philosophe reproche aux écoles privées religieuses « 
d'empêcher l'émancipation laïque. » On s'étonne : tous les citoyens 
français doivent-ils être de bons petits soldats avec le doigt sur la 
couture du pantalon et répondre présents à l'appel de la laïcité ? Pour 
ma part, je me sens privilégié de vivre dans un pays où chacun peu 
penser ce qu'il désire et vivre selon ses croyances : religieuses ou 
laïques. L'État étant laïque, ses écoles le sont. D'autre part, les 
citoyens croyants peuvent envoyer leurs enfants dans des écoles qui 
correspondent à leurs choix. N'est-ce pas cela la liberté ?

En conclusion, il me suffit de dire que selon moi, le coût moyen d'un 
élève (environ 7 410 euros) doit être pris en charge par l'État. Peu 
importe où l'élève étudie – dans le privé ou le public – le coût de son 
éducation est une des obligations principales que doivent assumer les 
autorités politiques. Cependant, si l'enseignement privé représente un 
coût plus élevé, il doit être pris en charge uniquement par les parents 
qui ont choisi d'envoyer leurs enfants dans ce système. En d'autres 
termes, si les contribuables français ne doivent pas payer le surcoût de 
l'enseignement privé, l'État français ne devrait pas faire d'économies 
sur le dos des contribuables croyants.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
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