[Laicite-info] PROMOUVOIR LA LAÏCITÉ À L'ÉCOLE : UN NOUVEL IMPÉRATIF

Denis Lebioda denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
Jeu 14 Juin 08:07:28 CEST 2018


PROMOUVOIR LA LAÏCITÉ À L'ÉCOLE : UN NOUVEL IMPÉRATIF

Le Comité national d'action laïque, fédération de cinq organisations 
(dont la Ligue de l'enseignement) publie à l'occasion d'un colloque ce 
13 juin un sondage (IFOP) qui montre que 59 % des enseignants sondés 
estiment la laïcité en danger. Pour Jean-Philippe Moinet, fondateur de 
la Revue Civique, il y a urgence à agir car « le relativisme sur les 
valeurs essentielles ne peut servir d’introduction à la vie en société ».

Publié par : 
https://www.nouveau-magazine-litteraire.com/idees/promouvoir-la-laicite-a-lecole-un-nouvel-imperatif
Le : 13/06/2018
par Jean-Philippe Moinet - Journaliste, chroniqueur, fondateur de la 
Revue Civique, Jean-Philippe Moinet a été président de l'Observatoire de 
l'extrémisme et Secrétaire général du Haut Conseil à l'intégration.

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Le temps passe, l’inquiétude persiste et, pourtant, l’époque de 
l’aveuglement devrait être révolue depuis longtemps. Mais comme beaucoup 
d’œillères ont perduré, comme beaucoup d’hésitations, de passivités 
surtout, ont prévalu, l’un des principes phares de notre République, la 
Laïcité, est frontalement mis à mal : ce n’est pas une vague impression 
des Français, c’est le point de vue, Ô combien d’expérience, des 
enseignants, de celles et ceux qui, tous les jours, sont en première 
ligne du lien sensible avec les plus jeunes, subissant un lot de 
contestations aussi diverses que persistantes et lancinantes. Résultat : 
dans le cadre d’une étude d’opinion réalisée par l’IFOP pour le Comité 
national d’action laïque (CNAL), ils sont 59 % à considérer que la 
Laïcité est aujourd’hui en danger. Un chiffre lourd de sens.

Les contestations concernent même une loi qu’on croyait bien établie, 
celle de 2004 sur le port ostensible de signes religieux à l’école 
publique. Les auditions de la Commission Stasi avaient déjà fait 
remonter le cri d’alarme des enseignants. Le législateur, dans un 
consensus gauche-droite, avait jugé nécessaire d’établir une nouvelle 
règle, stricte, qui permettait d’épargner à l’école les assauts répétés 
d’un prosélytisme avéré, qui avait pris la « liberté vestimentaire » 
comme vecteur de diffusion. Et bien voilà que 14 ans plus tard, cette 
loi est contestée dans son application, surtout en zone d’éducation 
prioritaire, relève l’étude : les contestations atteignent un « score 
préoccupant » de 34%  des élèves en ces zones, où l’Etat est censé 
produire des efforts supplémentaires.

Le livre-alerte date de 2002 !

Mais, au-delà de ces zones prioritaires, c’est la multiplicité des 
contestations qui suscite l’inquiétude : critique des cours 
d’histoire-géo (constatées par 35% des enseignants), des règles de 
mixité pour le sport (32%), mise en cause de l’enseignement du fait 
religieux (27%) ou des cours de sciences (22%). Le livre-alerte Les 
territoires perdus de la République, que certains avaient voulu mettre 
sous le boisseau, date de 2002 ! L’officiel rapport Obin de l’Éducation 
Nationale, lui aussi victime du même syndrome et qui énumérait 
précisément les dérives, date de 2004. Et toujours le même désarroi des 
enseignants, souvent laissés à eux-mêmes. Comme dans le cas des « 
incivilités » qui les frappent, surtout quand il s’agit de femmes 
enseignantes, contestées dans leur rôle de simple autorité à respecter.

Le dialogue, bien mené, permet certes de réduire les vives tensions. Les 
enseignants le disent très largement aussi dans cette étude. Mais ils 
sont plus d’un tiers à reconnaître s’être autocensurés en classe pour 
éviter des incidents.  Et ils sont plus de la moitié à reconnaître cette 
forme d’abdication, en zone d’éducation prioritaire. Inquiétant constat. 
Car, dans une société si ouverte et libre que la société française, pour 
éviter l’irruption des obscurantismes et des menaces qu’ils portent, 
c’est bien le respect de l’institution scolaire, et non sa contestation, 
qui devrait prévaloir, en toutes circonstances. Le relativisme sur les 
valeurs essentielles ne peut servir d’introduction à la vie en société. 
Or, ce relativisme progresse : 27% des enseignants se disent aujourd’hui 
inquiets quant au principe même de l’adhésion des élèves aux valeurs de 
la République.

Accompagner les enseignants, une priorité

Il est donc devenu évident et urgent qu’une promotion active et positive 
des valeurs de la République, et en premier lieu du principe de Laïcité, 
puisse se développer rapidement et concrètement à l’école, à tous les 
étages, du primaire au lycée en passant par le collège. Un nouveau guide 
de la Laïcité, destiné aux enseignants, vient d’être élaboré par le 
ministère de Jean-Michel Blanquer. Un outil qui ne sera vraiment pas de 
trop, vu l’ampleur de la tâche. Aujourd’hui, toujours selon cette étude 
de l’IFOP, 94% des enseignants disent en effet ne bénéficier d’aucune 
formation continue sur cette question, pourtant centrale, de la Laïcité 
! Face aux défis et aux contestations, l’institution socle de la 
République ne peut plus rester durablement inerte. Car le silence et le 
laisser-faire, en ce domaine comme dans d’autres, c’est laisser la voie 
ouverte aux plus forts, aux plus bruyants, aux plus prosélytes ou 
provocateurs. Les principes de base du pacte républicain ne peuvent plus 
passer après tout le reste, n’être qu’une option. Le risque est trop 
grand pour l’institution toute entière, et demain pour le pays, pour que 
ne soit pas réactivé, avec volontarisme et pédagogie, son rôle premier : 
sur l’essentiel, assurer la cohésion sociale.

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Denis Lebioda
Chargé de mission
Ligue de l'enseignement dans les Alpes du Sud
Mel : denis.lebioda at laligue-alpesdusud.org
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